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Tour de France: "Les attaques qu’ils se mettent !", la baston Pogacar-Vingegaard impressionne le peloton

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Envoyé dans les cordes vingt-quatre heures plus tôt par Jonas Vingegaard, Tadej Pogacar a répondu ce jeudi pour la première arrivée au sommet du Tour de France. Vainqueur à Cauterets-Cambasque, il a totalement relancé le suspense.

Le Tour de France est-il déjà joué ? Bien qu’un peu provocatrice, la question pouvait se poser mercredi après le numéro réussi par Jonas Vingegaard, parvenu à prendre plus d'une minute à Tadej Pogacar dès la première étape de montagne à Laruns. Au moment de regagner son bus, le Slovène affichait un visage inhabituellement fermé, reconnaissant avoir pris "un gros coup sur la tête" en ayant été décroché dès la première giclette de son rival sur les pentes de Marie Blanque. Au final, il avait coupé la ligne avec plus d'une minute de retard sur Vingegaard pour se retrouver 53 secondes derrière lui au général. Autant dire qu’une revanche était attendue ce jeudi pour la première arrivée au sommet de cette 110e édition, à Cauterets-Cambasque, dans un décor de rêve sur les hauteurs pyrénéennes.

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Tout était réuni pour avoir une nouvelle explication entre cadors : une étape courte (144,9 km) mais musclée avec quatre ascensions répertoriées dont l'Aspin (12km à 6,5%) et surtout le Tourmalet (17,1 km à 7,3%). C’est là que la Jumbo-Visma a tenté une nouvelle entreprise de démolition fatale à l’éphémère maillot jaune Jai Hindley, relégué ce soir au troisième rang. A 50 bornes de l’arrivée, la machine jaune et noire a fait le ménage, avec un travail de sape signé Sepp Kuss, parfait dans le rôle du dernier lieutenant. Longtemps accompagné par son sherpa américain, déjà précieux en mai pour aider Primoz Roglic à gagner le Giro, Vingegaard a placé une mine à l’approche du sommet du Tourmalet mais n’est cette fois pas parvenu à décramponner Pogacar, le seul à s’accrocher parmi les favoris. Le chef de file des UAE-Emirates, pourtant abandonné par Adam Yates et tous ceux censés être ses soldats, a même fait mieux que ça. Dans les cordes vingt-quatre heures plus tôt, il a su être patient, avant de coller un terrible uppercut à Vingegaard en s’envolant dans la montée vers Cauterets-Cambasque. 

"La bataille va être difficile entre les deux"

Une accélération foudroyante pour s'adjuger l'étape en faisant une révérence sur la ligne - sous les yeux d'Emmanuel Macron - et donc empocher le deuxième round d’un duel terriblement palpitant. Le voilà revenu à 25 secondes du Danois, qui n’a pas tout perdu dans l’affaire. Même s’il n’est pas dit que le maillot jaune récupéré à Hindley soit de nature à le rassurer pleinement malgré les discours de façade. "Je suis extrêmement heureux d'être à nouveau en jaune, j'adore la couleur, c'est le plus grand symbole de notre sport, c'est énorme pour moi, disait-il à l’arrivée. Pogacar avait de meilleures jambes aujourd'hui, on a essayé dans le Tourmalet, je crois que ça s'est vu ! Mais je n'ai pas réussi à le décrocher à ce moment. J'aurais aimé. Ça aurait été parfait de le lâcher dans le Tourmalet mais il était en bien meilleure forme aujourd'hui qu'hier. Je continuerai de me battre."


Au bus des Jumbo-Visma, qui avaient placé Wout van Aert dans l’échappée pour servir d’appui à Vingegaard, l’ambiance était évidemment moins enjouée que la veille. "Ce n'était pas possible de lâcher Pogacar aujourd'hui, c'est un coureur extraordinaire. Comme Jonas. La bataille pour le jaune va être très difficile entre les deux", confiait Nathan Van Hooydonck, alors que Sepp Kuss admettait que l’idée était au départ de "prendre encore du temps" sur Pogacar. Vingt-et-unième de l’étape et spectateur du blockbuster Pogacar-Vingegaard, Guillaume Martin n’a lui aucun mal à reconnaître qu’ils "sont une jambe au-dessus" de la concurrence. "Je pense que Jumbo voulait enfoncer le clou aujourd’hui, expliquait le coureur de Cofidis. Le tempo était vraiment rapide dans le Tourmalet. Moi je me suis accroché mais je n’évolue pas dans la même cour que les deux de devant. Il y a deux courses en une. Quand on voit l’écart qu’a mis Vingegaard hier en quatre kilomètres dans Marie Blanque…"  

"Ils sont au-dessus du lot"

Même impression du côté d’Aurélien Paret-Peintre (AG2R-Citroën) : "Il y a forcément un peu de fatalisme. Depuis le départ du Pays basque, on ne peut que viser la troisième place, ils sont au-dessus du lot, même si la densité est élevée. On espère se glisser entre leurs mailles. Ils sont impressionnants. Les attaques qu’ils se mettent dans le final ! C’est comme s’ils venaient de commencer la course ! Ce sont deux grands champions au-dessus du lot. Tant mieux, c’est bien d’avoir deux coureurs à ce niveau, ça laisse du suspense alors que beaucoup de gens pensaient que c’était plié hier." Du côté de Pogacar, c’est le "soulagement" qui primait. "Je ne dirais pas que c'est une revanche, je suis content d'avoir gagné. C'est bien de prendre un peu de temps. Quand Jonas a commencé à rouler dans le Tourmalet, je me suis dit ‘Merde, ça va encore m'arriver comme hier, on va prendre le vélo et on va rentrer à la maison.’ Heureusement, j'avais de bonnes jambes, j'ai pu le suivre dans le Tourmalet. Je me sentais plutôt bien et après quand j'ai senti le bon moment, j'ai attaqué à la fin. Ce sera une grosse bagarre jusqu'à la dernière étape." 

Si les deux prochains jours sont promis aux sprinteurs, il faudra ressortir les popcorns dès dimanche. A la veille de la première journée de repos, le peloton se dirigera vers le Puy-de-Dôme, où Raymond Poulidor a écrit l'une des pages les plus mémorables de l'histoire du Tour en se battant contre Jacques Anquetil en 1964. L'ascension du géant d’Auvergne, avec les quatre derniers kilomètres à 12%, promet d'être épique.

Rodolphe Ryo, à Cauterets-Cambasque