Equipe de France féminine: les défis qui attendent Hervé Renard à la tête des Bleues

• Moins de quatre mois pour préparer le Mondial… avec le souvenir de la CAN 2012 en tête
Pas le temps de tergiverser. Officialisé ce jeudi à la tête de l’équipe de France féminine, Hervé Renard doit d’ores et déjà se tourner vers la préparation d’un tournoi majeur: la Coupe du monde. Organisé en Australie et Nouvelle-Zélande, le Mondial débute le 20 juillet prochain. Pour sa première expérience avec une équipe féminine, le coach de 54 ans a donc moins de quatre mois pour préparer son groupe à cette échéance.
Mais ce challenge est loin d’effrayer Renard, qui va se retrouver dans une configuration proche de ce qu’il avait connu lorsqu’il a remporté la Coupe d’Afrique des Nations avec la Zambie en 2012. Il y a 11 ans, il avait pris les commandes de la sélection seulement deux mois avant le début de la compétition. Résultat: une phase de groupes lors de laquelle les Chipolopolos ont terminé invaincus (deux victoires, un nul), un quart puis une demi-finale rondement menés avec des qualifications face au Soudan et le Ghana... puis une victoire en finale aux tirs au but face à la Côte d’Ivoire. Le tout avec une équipe de soldats, sans aucun nom ronflant dans l’effectif.
Hervé Renard connaît donc la recette. Et c’est tant mieux, puisqu’il n’a pas vraiment le droit à l’erreur. "On a les meilleures joueuses européennes, les meilleures joueuses du monde, lançait Aulas au micro d’Europe 1 mi-mars. Ce qu’ont fait les joueuses n’est pas bien. Elles ont pris directement la parole mais, ceci étant, elles avaient essayé de le faire depuis pas mal de temps au niveau des instances. On est responsable. Il fallait les écouter mais aussi les mettre dans l'obligation, avec les solutions qui vont leur être apportées, de gagner." Les joueuses étant attendues au tournant, leur sélectionneur l’est - automatiquement - lui aussi.
Le nouveau sélectionneur des Bleues et son staff ont quatre matchs amicaux pour peaufiner des automatismes: face à la Colombie (7 avril), le Canada (11 avril), l’Irlande (6 juillet) puis l’Australie (14 juillet). Ce vendredi, après les rencontres de l’OL et du PSG en Ligue des champions, Hervé Renard doit annoncer sa toute première liste pour le rassemblement d'avril.
• Ressouder un groupe usé par des mois de tension
Pour mener à bien sa mission et tenter d’offrir à la France un premier titre international, Hervé Renard va devoir apaiser un groupe profondément marqué par des mois (voire années) chahutés sous Corinne Diacre. Les relations entre l’ex-sélectionneure et plusieurs de ses joueuses se sont peu à peu détériorées, au point d’aboutir à une fronde de plusieurs d’entre elles. Fin février, Wendie Renard, l’une des taulières du vestiaires, a annoncé son départ dans un message publié sur Twitter, visant, sans la nommer, Corinne Diacre.
Dans son sillage, plusieurs autres joueuses (Kadidiatou Diani, Marie-Antoinette Katoto et Perle Moroni) avaient annoncé leur mise en retrait des Bleues, poussant la Fédération à finalement se séparer de la sélectionneure et mettre en place une commission pour établir un état des lieux du climat autour de l’équipe de France féminine. Maintenant qu’une nouvelle page s’est ouverte, la logique voudrait que les "frondeuses" fassent leur retour.
Si Diani, Katoto et Moroni ne se sont pas publiquement exprimées sur le sujet, Wendie Renard a quant à elle déjà fait savoir qu’elle envisageait de revenir. "Il faut aussi que le prochain sélectionneur ait envie de travailler avec moi. C'est le sélectionneur qui me sélectionnera si je suis performante avec mon club (...) mais pourquoi pas? J'aime ce maillot et je veux tout faire pour gagner un titre avec", confiait la défenseure de l’OL à Europe 1 il y a deux semaines.
Quoi qu’il arrive, Hervé Renard aura comme objectif de ressouder un groupe qui est à bout. "Il est important d’avoir du nouveau parce que les filles n’en peuvent plus. C’est vraiment le cas, assurait Diani dans Télefoot début mars. Avec (Philippe) Bergeroo, mon premier sélectionneur, j’étais vraiment joyeuse quand j’arrivais en équipe de France. Je ne retrouve plus ce sentiment." Charge au nouveau sélectionneur de leur redonner le plaisir d’évoluer sous le maillot frappé du coq.
• Ramener le foot féminin français sur le devant de la scène
Qu’elles semblent loin les promesses de la Coupe du monde 2019, quand l’organisation du tournoi dans l’Hexagone laissait présager un avenir radieux pour le foot féminin français. En 2019, avant le Mondial, Noël Le Graët, alors président de la FFF, avait l’ambition de passer de 179.000 à 300.000 licenciées. En juin 2022, les comptes n’y étaient pas, puisqu’on en dénombrait 209.000. Malgré des joueuses parmi les meilleures du monde et de très belles locomotives en championnat (OL et PSG), le foot féminin français a pris du retard sur ses voisins européens. L’été dernier, alors que la FFF annonçait se porter candidate pour l’organisation de l’Euro 2025, la star Ada Hegerberg était montée au créneau. "Organiser des compétitions internationales, c’est bien. S’investir dans notre championnat c’est mieux, avait lâché la joueuse de Lyon dans un message rédigé sur Twitter. On est à la ramasse et la CDM 2019 n’a eu aucun impact."
Au-delà du développement du foot féminin, les Bleues semblent également moins intéresser le public qu’il y a quelques années. Lors de l’Euro 2022, organisé en juillet dernier, 6.23 millions de téléspectateurs ont suivi la demi-finale face à l’Allemagne. Leur meilleur score mais un chiffre bien éloigné du record d’audience établi lors du Mondial 2019 lors de France-Brésil en 8e de finale (11,9 millions).
En enrôlant Hervé Renard, la Fédération française s’offre aussi un personnage charismatique, une "belle gueule" au caractère bien trempé. Grâce à lui, les Bleues entrent dans une nouvelle sphère médiatique avec un nom bien plus identifié par le grand public et les fans de football que ne l’était Corinne Diacre à son arrivée. De quoi braquer les projecteurs sur une équipe toujours en cruel manque de visibilité par rapport à leurs homologues de la sélection masculine.
Tout le monde a encore en tête sa causerie devenue virale à la mi-temps de l’exploit de l’Arabie saoudite face à l’Argentine en phase de poule du Mondial qatari, en novembre dernier. "Messi, il a le ballon au milieu de terrain et vous restez devant la défense ! Prenez vos téléphones et faites des photos avec lui si vous voulez !", se fâchait-il en anglais alors que l'Albiceleste était encore devant au tableau d’affichage (1-0). Finalement, les Saoudiens ont renversé la rencontre (2-1) et infligé aux futurs champions du monde leur unique défaite dans le tournoi. Rien que pour ça, les amoureux de l’équipe de France ne peuvent que l’adopter.