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ASSE-OL: ce livre qui fourmille d'anecdotes sur le derby

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Bon dernier du championnat, l'AS Saint-Étienne espère lancer sa saison à l’occasion du derby contre l'OL ce dimanche en clôture de la neuvième journée de Ligue 1. En marge de la parution du livre "Derbyrama" consacré à ce choc entre les Verts et les Gones, RMC Sport vous raconte pourquoi cette affiche est plus qu’un simple match et déchaîne les passions.

65 kilomètres séparent les villes de Saint-Etienne et Lyon. Et depuis le 28 octobre 1951, 122 épisodes en ont rythmé la saga, ballon au pied et chambrage en bandoulière. A la veille du dernier match de la neuvième journée de la Ligue 1 (ce dimanche à 20h45) qui verra les Lyonnais emprunter l’A47 via Givors pour atteindre Geoffroy-Guichard, il faut s’échauffer en lisant Derbyrama, Football, amours et querelles (co-écrit par Cyril Collot et Sébastien Vuagnat aux Editions du Volcan). Indispensable plongée dans les petites histoires dans la grande histoire de ce derby à nul autre pareil.

En refermant le livre, dévoré d’un trait avec cet appétit jamais rassasié d’entamer le court chapitre suivant avec gourmandise et délectation, une forme de douce nostalgie s’installe. Car au fil des 232 pages de l’ouvrage écrit par "deux amis journalistes lyonnais comme se décrivent d’emblée, Cyril Collot (ex-journaliste à OLTV) et Sébastien Vuagnat (correspondant de l’AFP aux USA) se dessine cette disparition, désormais irréversible, de ce "chambrage" d’antan et bon enfant des derbies d’avant, fait de petites phrass et d’attitudes provocantes. Mais juste ce qu’il faut. Car il faut désormais compter avec la violence qui gangrène aussi ce match et coupe les ailes de tous ceux (acteurs notamment) qui voudraient blaguer publiquement et "lancer" comme avant leurs joueurs et fans de l’équipe d’en face.

La région vibre pour le derby pendant des jours

Cyril et Sébastien sont avant tout amoureux du "derby". Autant vous prévenir, si vous lisez ces lignes hors de la région, vous risquez de ne pas tout comprendre du sel de cet affrontement. Oui, aucun autre match de l’année fait autant monter la pression dans la semaine qui précède et plonger le lundi matin, le perdant dans le brouillard, et le vainqueur, dans une tempête de ciel (vert ou rouge et bleu).

Il n’y a que les lendemains de match nul que les sourires sont partagés. Et encore. Car il y a toujours à dire et à redire sur un Sainté-Lyon ! "Et même si nous sommes Lyonnais, Derbyrama peut-être lu par des Stéphanois, il y en a pour tout le monde", expliquent-ils en chœur.

Un derby qui fourmille de petites histoires

Et la force de l’ouvrage est d’aller plus loin que les histoires traditionnelles racontées entre 42 et 69 fois, suivant qu’on est de la Loire (42) ou du Rhône (69): les phrases de l’emblématique Roger Rocher ("en matière de foot, St Etienne est la locomotive, Lyon, les wagons"), les deux protège-tibias (un devant et un derrière …) de Salif Keita, l’icône malienne de Saint-Etienne qui avait la "trouille de jouer contre Lyon".

On y trouve aussi le but de Kastendeuch contre son camp qui offre le derby à Lyon dans l’un des hold-up qui a fait la légende. ou encore le but victorieux de Sidney Govou en 2004 qui vient le fêter devant ses amis du Puy, installés en tribune et tous fans des… Verts!

Sidney Govou célèbre son but à Saint-Etienne en 2004
Sidney Govou célèbre son but à Saint-Etienne en 2004 © AFP

Le soir du 100e derby perdu à Gerland sur un coup-franc de Dimitri Payet et Jean Michel Aulas, obligé d’aller défendre son entraîneur (un certain Claude Puel) devant ses supporters avec la célèbre formule: "Eux, la Ligue des Champions, ils la jouent à la play-station", ou encore les différences histoires de banderole de bon ou de mauvais goût et les lyonnais, fraîchement champions de France en 2006 qui arrivent grimés sur le terrain.

Plus loin car les auteurs ont trempé leur plume ailleurs pour revisiter "leur match préféré" dont ils avaient déjà, il y a 15 ans, narré de "façon exhaustive et journalistique, avec des photos, les fiches techniques et les résumés de match" (Sébastien Vuagnat) tous les derbies. Ailleurs, cela veut dire quoi? Cyril Collot affine: "Nous l’avons écrit avec notre cœur car tous les acteurs, suiveurs et supporters que nous croisons, tous, nous disent que c’est un match à part. Mais que veut dire ce à part? Nous, nous l’avons compris car il se vit avec émotion et donc, avec le cœur."

"Ce livre, c’est une déclaration d’amour au derby"

Ce cœur, ce lien charnel d’un Sainté-Lyon, dès l’enfance ils ont appris à vivre avec, deux fois l’an quand les deux formations jouent dans la même division: "Moi, mon premier souvenir, c’est le derby à la radio dans la chambre que je partageais avec mon frère, se souvient Cyril. Lui était fan des Verts, moi de l’OL. Et au milieu, il y a ce poste qui symbolise le ballon et l’entre deux. Au final, je me suis endormi vaincu…"

Quand son comparse se ruait sur Onze, le mensuel qui avant le derby proposait un poster central: "D’un côté, l’équipe de Lyon, de l’autre, celle de St Etienne. Il fallait choisir son camp. L’une allait rester dans l’ombre et l’autre prendre la lumière", retient de son côté Sébastien Vuagnat. Et chacun de raconter à travers leurs proches et leur ressenti: "Ce livre, c’est une déclaration d’amour au derby", résume Cyril Collot.

Il n’y a qu’eux qui peuvent analyser la figurine Panini de Bernard Lacombe quand il doit poser avec le maillot vert: "si on regarde bien, il a les yeux plissés de Bernard, décrit Sébastien Vuagnat, comme s’il ne voulait pas voir la vérité en face."

Quand Lyon et Saint-Étienne ont joué un match ensemble

Il n’y a qu’eux qui peuvent revivre avec nostalgie (on y revient) le 32e de finale de Coupe de France de 1953-54 que "le président Pierre Faurand accepte de jouer à Gerland et d’abandonner la recette (7 millions d’anciens francs, environ 10 000 euros) pour aider le jeune club lyonnais (né en 1950) en difficultés financières."

Il n’y a qu’eux qui peuvent faire réapparaître un match à part en juin 1956 quand "la sélection de Budapest" de Ferenc Puskas, vice-championne du Monde et championne olympique vient à Lyon disputer un match amical dans une tournée promotionnelle en Europe de l’Ouest. En face? "Une entente Lyon-St Etienne avec autant d’éléments de chaque camp sous un maillot rouge et bleu (couleurs de l’OL…) inédit. 7-3 pour les Hongrois", écrivent les auteurs. Une entente pour un jour sans lendemain.

"Nous nous sommes permis des rêveries"

Tellement imprégnés des 122 épisodes tournés à ce jour et au décompte desquels, l’OL a pris les devants le 24 janvier dernier (0-5 à GG) avec une 45ème victoire contre 44 aux Verts, qu’ils se lâchent aussi: "Nous nous sommes permis des rêveries", explique Sébastien Vuagnat. Comme celle qui peut coller à une potentielle actualité ce week-end: "En thérapie, consultation fantasmée du 7 octobre 2019".

Pour les initiés du derby (c’est pour cela qu’on vous dit qu’à l’extérieur de la région, c’est difficile à comprendre!), le 7 octobre 2019 est le jour où Sylvinho, le coach lyonnais vaincu la veille (1-0) à "Geoffroy" (comprenez Geoffroy Guichard) est viré. Le chapitre nous fait côtoyer d’autres techniciens "victimes" du derby.

Toute ressemblance avec un fait qui pourrait exister dimanche soir est totalement fortuit: "Le livre a été écrit au premier semestre 2021", se dédouanent Cyril et Sébastien. N’empêche, la fiction pourrait rejoindre la réalité (ou l’inverse !!) si le bon dernier de la Ligue 1 au coup d’envoi, l’ASSE, perd une nouvelle fois face à son meilleur ennemi…

Question d’actualité du coup? Ce 123e derby entre une équipe sans succès et restant sur cinq défaites de suite (ASSE, 3 points en 8 matches) et l’OL en pente ascendante avec son coach néerlandais Peter Bosz qui va découvrir ce match à part est-il le plus déséquilibré de l’histoire?

"Non, car il est impossible de pronostiquer quoi que ce soit et la "forme" (ou pas) du moment n’y fait rien", résument-ils. Et avec le cœur alors? "Un record de buts, plus que le 5-4 de 1963, je dis 5-5, annonce Cyril Collot quand Sébastien évoque un "2-2". Même des journalistes lyonnais ne veulent pas prendre parti! Quand on vous disait qu’il est à part ce derby.

Edward Jay