
Mort de Sala: le conflit Nantes-Cardiff en trois questions
Cela fera un mois, jeudi 21 février, qu’Emiliano Sala est tragiquement décédé dans un accident d’avion au-dessus de la Manche. Après de longues opérations de recherche, le corps de l’attaquant argentin a pu être retrouvé, et ce dernier a eu droit à des funérailles dans son pays natal. Mais le dossier de son transfert, de Nantes à Cardiff City, est lui loin d’être clos, étant donné que la formation galloise n’a toujours pas payé la première partie des 17 millions d’euros d’indemnités au FCN. Selon le Guardian, le club français avait laissé à Cardiff jusqu'à mercredi pour effectuer un premier versement de cinq millions de livres (5,75 millions d'euros). Mais les Bluebirds traînent des pieds. Et même un peu plus...
Pourquoi Cardiff ne veut pas payer?
Officiellement, Cardiff City ne refuse pas de sortir son chéquier. "Si nous sommes contractuellement obligés de payer, bien sûr que nous le ferons. Nous sommes un club honorable, expliquait la semaine dernière le président Mehmet Dalman à la BBC. Mais il y a beaucoup d’interrogations qui méritent d’être levées. Et c’est ce que nous cherchons à faire." Officieusement, le club gallois essaye pourtant de faire annuler l’opération, ou du moins de faire baisser le montant des indemnités, et a même contacté d’autres clubs de Premier League pour obtenir quelques conseils.
Pour cela, Cardiff travaille sur plusieurs pistes: le club estime d’abord que le transfert de Sala n’était pas complet le 21 janvier en avançant un non-enregistrement de la part de la Premier League, il considère en outre s’être fait duper par les agents Willie et Mark McKay – mandatés par Nantes – sur le montant de la transaction, et il envisagerait enfin, comme l’indiquait le Telegraph, de faire porter la responsabilité de l’accident aux McKay (qui ont organisé le vol) et par extension au FCN. La formation galloise a en effet mené sa propre enquête, qui aurait révélé que le pilote, David Ibbotson, n’avait pas la licence pour transporter des passagers sur des vols commerciaux. Cardiff attend donc le rapport officiel du Bureau d’enquête sur les accidents aériens (AAIB), dont une première mouture devrait être publiée rapidement, pour voir s’il peut attaquer sur ce point.
Pourquoi le FC Nantes et le clan McKay considèrent que tout est en règle?
Pour les Canaris, le certificat international de transfert (CIT) a été reçu le lundi 21 janvier, avant l'accident d'avion, ce qui marque la fin de la relation contractuelle de Sala avec Nantes. Tout ce qui se passe après ne les regarde plus. "A partir du moment où la Fifa a pu enregistrer les documents, on peut considérer qu’Emiliano Sala était un joueur de Cardiff au 21 janvier, a expliqué Badou Sambagué, avocat de Mark McKay, à RMC Sport. Il s’agit tout simplement de respecter le contrat et de verser les fonds au FC Nantes. A partir du moment où le joueur a été transféré, il doit y avoir paiement de l’autre côté..."
Concernant l’organisation du vol, et une éventuelle négligence avant le crash, les McKay sont sortis de leur silence. Willie McKay a accusé Cardiff de le "jeter aux lions" en en faisant une sorte de coupable idéal. Dans des propos tenus dans le Times, il a indiqué que son fils Mark avait organisé tous les vols des parties intéressées dans le transfert, notamment les fois où l'entraîneur Neil Warnock était venu observer Sala en France. "Et en l’occurrence, Cardiff était avisé du déplacement de Sala puisqu’un membre du club l’attendait à l’aéroport", rappelle Sambagué. Sur ce point-là, le FCN ne semble lui absolument pas impliqué.
Quant au prix soi-disant "gonflé" de l’attaquant, la pratique est tellement courante en période de mercato qu’il est difficilement imaginable de voir une instance sportive remettre en cause l’opération…
Comment va se finir cette histoire?
Deux solutions: soit les clubs (à commencer par Cardiff) s’assoient autour d’une table, règlent le litige à l’amiable et décident de conclure cette affaire dignement, soit une procédure – probablement longue – est engagée devant la Fifa ou le Tribunal arbitral du sport (TAS), avec nomination d’un ou plusieurs juges en charge du dossier. "Pour ce genre d'affaire, il y a une obligation de s'adresser à des organismes liés au football ou au sport", précise l'avocat sportif Gianpaolo Monteneri, qui a dirigé le Département du statut des joueurs de la Fifa de 1997 à 2005.
Pour Sambagué, la deuxième option pourrait valoir à Cardiff de débourser plus de 17 millions d’euros. "Puisque si la Fifa confirme que le contrat est validé, on aura non seulement un paiement des indemnités de transfert au FC Nantes, mais aussi des indemnités de retard", détaille-t-il. Théoriquement, une sanction allant jusqu’à un retrait de points est également possible. A moins que la formation galloise ait de bonnes raisons de contester l’opération, et finisse pas avoir gain de cause.