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PSG: prix exorbitants, fans adverses en virage... Ticketplace dans le collimateur des supporters

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Ticketplace, plateforme de revente de billets officielle du PSG, fait l'objet de nombreuses critiques de supporters parisiens, non seulement exaspérés par les prix pratiqués, mais aussi en colère après la présence de supporters du Maccabi Haïfa en dehors du parcage visiteurs en Ligue des champions.

104 euros minimum pour la réception de l'AS Monaco, 140 pour celle du Maccabi Haïfa, 184 pour la Juventus, 230 pour celle du Real Madrid la saison passée... Ces sommes sont les premiers prix qui ont été affichés de premier abord sur la plateforme Ticketplace à des supporters du Paris Saint-Germain en quête de billets pour des matchs au Parc des Princes. Faute de disposer d'un abonnement annuel ou d'avoir la chance d'obtenir un ticket de première main, les fans parisiens peuvent se rendre sur ce "marché secondaire" officiel du club qui facilite et sécurise la revente de places. Mais depuis un certain temps, les prix pratiqués exaspèrent.

Ticketplace, c'est la plateforme de revente utilisée par le PSG pour permettre aux abonnés de revendre leur place, ce qui permet de tacler le marché noir, qui était endémique aux abords du Parc des princes les soirs de matchs, aux abonnés de ne pas "perdre" les places pour les matchs auxquels ils ne peuvent pas assister, et au club d'avoir toujours un stade plein. Un système pensé pour être gagnant-gagnant mais qui a tout de même des dérives.

18% de frais de réservation

Comme aucune contrainte tarifaire n'existe pour les revendeurs sur cette plateforme intégrée au site du PSG, les prix s'envolent lorsque l'affiche est attrayante. Pour certains abonnés, il suffit de quelques matchs pour rentabiliser l'abonnement ou même faire du bénéfice (l'offre de base est à 490 euros). Ce n'est pourtant pas la seule raison de la frustration des supporters. Celle-ci s'explique aussi par une mauvaise surprise au moment de réserver: des "frais de réservation" s'ajoutent systématiquement. Ils s'élèvent à 18% du prix du billet. Et ce n'est pas tout: il faut ensuite ajouter 4€ de "frais de livraison", en dépit du format électronique. Pour une place à 55€ contre Troyes ce samedi 29 octobre en tribune haute dans le populaire virage Auteuil, la facture finale affiche 68,90€.

Supportrice du PSG "depuis petite", Lucie avait l'habitude d'aller au Parc des Princes en famille. "Mais ce n’est plus possible qu’on aille tous au même match depuis l’explosion des tarifs sur Ticketplace. Donc, généralement, j’y vais avec mon père une à deux fois par an quand les tarifs le permettent", confie-t-elle à RMC Sport, après avoir publié une série de tweets avec le hashtag #TicketplaceOut pour dénoncer le fonctionnement de ce système de revente. "J’ai reçu plusieurs messages et commentaires d’autres supporters qui me disent qu’ils n’ont pas pu se rendre au Parc depuis plusieurs années pour la grande partie d’entre eux. Je ne peux pas comprendre qu’on puisse se remplir les poches sur le dos des supporters", fustige-t-elle.

Passer par Ticketplace est presque toujours une obligation pour les supporters qui se rendent occasionnellement au Parc des Princes: le PSG, qui compte 35.000 abonnés, ne met en vente que 7.000 billets par match pour le grand public. Une certaine vivacité s'impose donc lors des ouvertures de billetterie, organisées en fonction des programmes de fidélité du club. Lucie témoigne: "Le temps de se connecter sur le site, il n'y a quasiment plus de places. Même si elles ne sont plus disponibles, on peut voir à quel prix elles ont été vendues dans les minutes qui suivent. Pour PSG-Benfica par exemple, il me semble que les places en virage, les moins chères, étaient vendues 48€ par le club. J’ai vu des places en revente à 150-200€ minimum dans les jours suivants. C’est ce qui me dégoûte!"

Le CUP veut des mesures pour empêcher la "spéculation"

Le Collectif Ultras Paris a annoncé en début de saison avoir trouvé un accord avec la direction du Paris Saint-Germain pour interdire aux membres du groupe de revendre des places sur Ticketplace. Seul le prêt ou le don à des associations est possible. "Cela faisait longtemps que cette demande était faite auprès du club et il n’y a pas eu de réticences particulières à la mettre en place, a fait savoir l'avocat du CUP Cyril Dubois à RMC Sport. Les gens qui prennent cet abonnement le font pour supporter l’équipe, pas pour spéculer. C’est un véritable crève-cœur pour eux de rater un match, il n'y a aucune raison d’en tirer bénéfice. Bien sûr, les événements familiaux ou professionnels font qu’on peut rater un match. Mais en ce cas, on en fait profiter un autre supporter qui n’a pas la chance d’être abonné, afin que la tribune demeure une tribune populaire".

Au-delà du sujet financier, la revente sur Ticketplace a, selon les intéressés, des conséquences sur la vie des tribunes. "C’est systématique qu’on ne soit entourés que de touristes à Boulogne (face à Auteuil, ndlr) qui nous demandent d’arrêter de chanter et de regarder le match assis", déplore Lucie. "Plusieurs abonnés des latérales rapportent que leur plaisir de venir au Parc s’étiole. Avant ils connaissaient leur voisin de stade depuis des années. Ça créait des liens, ils connaissaient les chants", constate aussi le CUP.

Ticketplace peut aussi profiter aux supporters adverses. Ce qui peut aboutir aux images vues contre le Maccabi Haïfa en Ligue des champions, avec ces centaines de fans de l'équipe israélienne installés dans le virage Boulogne au milieu des Parisiens et à côté du parcage visiteurs. Le CUP y voit un "problème de sécurité". Sur ce fait précis, le Paris Saint-Germain salue le comportement apaisé des supporters parisiens du virage et admet avoir préféré regrouper les fans israéliens près du parcage "pour la sécurité de tout le monde".

Ticketplace, la meilleure arme face au marché noir ?

Plus globalement, le CUP aurait aimé que le PSG aille plus loin par rapport à la restriction négociée en début de saison: "Nous avions demandé à ce que la revente soit interdite pour tout le Parc, ou que la vente des places ne puisse pas permettre de gagner plus que le coût de l'abonnement. (...) Il y a un équilibre à trouver comme toujours entre la passion, l’histoire du club et le business".

Mais Ticketplace a un intérêt non négligeable, y compris pour les fervents supporters: c'est un coup porté au marché noir, aux risques d'escroqueries (faux billets, tickets déjà utilisés aux portiques, paiement non conforme) et cela facilite l'accès au stade à tous les Parisiens. Ces arguments sont défendus par le Paris Saint-Germain, où l'on se réjouit aussi que le service contribue à ce que le match contre l'Estac soit le 100e consécutif à guichets fermés.

Pour casser les prix, des tests ont été effectués ces dernières années. Mais la très forte demande alimente mécaniquement la revente non-encadrée. "Si on interdit aux abonnés de revendre leur place sur Ticketplace, cela va aussi favoriser le marché noir", dit-on au club. Le CUP propose une solution: "Avec les conditions générales de vente, le club pourrait résilier les abonnements de ceux qui se livreraient au marché noir".

Quant à l'utilisation du service par les supporters adverses, le Paris Saint-Germain prend quelques dispositions. Si le moyen de paiement provient d'un pays étranger, la transaction peut être bloquée. Mais rien n'empêche finalement un ressortissant français supporter d'une équipe adverse de payer. Le club fait passer comme message: "Si vous êtes des supporters adverses, vous allez dans le parcage. Mais si vous êtes neutre, vous pouvez aller ailleurs". Le PSG précise néanmoins qu'il garde une attention particulière sur le soutien apporté à l'équipe: "On n'aimerait pas avoir l'image de Francfort au Camp Nou... Le club veut un stade rouge et bleu, et pas vert et blanc. Donc le PSG cherche constamment à faire des ajustements, pour faire évoluer cette offre".

Quentin Migliarini, Julien Absalon, Arthur Perrot