Sur les traces de Mario Balotelli en Italie : comment il a été repéré et lancé chez les pros... à 15 ans

L’anecdote nous a fait sourire. Il faut dire qu’elle est pour le moins inattendue. En pistant les traces de Mario Balotelli, nous avons rencontré l’une des nourrices de l’attaquant niçois. Son souvenir de l’intéressé est intact. Notamment sa vivacité et ses changements de direction, qui le rendaient insaisissables pour les salariés de la crèche. Mario Balotelli a alors deux ans et demi. Et si l’interlocutrice ne connaît rien au football, sans le savoir, elle avait déjà décelé le formidable potentiel de celui que le monde entier allait surnommer « Super Mario ».
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La jeune femme n’est pas la seule. Dario Lazzarin a aussi vu le phénomène en action. Il l’a croisé lorsqu’il éreintait ses crampons – et les côtes de ses adversaires – sous les couleurs de l’Oratorio de Mompiano, un club de quartier de Brescia. Bluffé, l’entraîneur s’empresse de récupérer la pépite pour l’envoyer dans un club formateur. Ce sera Lumezzane. « C’était un talent footballistique, se rappelle le technicien. Quand il était petit, nous disions que pour lui, tirer un penalty à l’Oratorio de Mompiano ou à San Siro, avec le stade plein, c’était pareil. Il était froid, il n’était pas très émotif, pour lui c’était normal. Il était tranquille, il pouvait faire des choses sous pression sans problème. Il faisait des dribbles incroyables. Il était tout petit quand on l’a connu, il n’était pas grand mais c’était une gazelle. Il était rapide avec une technique folle. »
Cette folie a totalement retourné Walter Salvioni. L’homme, qui lancera Mario Balotelli dans le grand bain du monde professionnel à… 15 ans, a vu un ange passer lors d’un match amical un jeudi, opposant d’abord l’équipe première de Lumezzane à la réserve en première période puis la troisième équipe à l’équipe fanion toujours, en seconde période. Il ne s’en est pas remis. « Au bout de cinq minutes, je suis entré sur le terrain, raconte-t-il les yeux brillants. Je suis allé parler à l’arbitre, qui est l’entraîneur de la 3e équipe. Je lui ai dit qu’il fallait que Mario vienne jouer avec moi. Il m’a dit que ce n’était pas possible qu’il joue avec l’équipe première parce qu’il n’avait que quinze ans. Je me suis dit, ce n’est pas possible. »
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« Il était et il est un joueur de Ballon d’Or »
L’homme, totalement sous le charme du jeune Balotelli, insiste. Et obtient gain de cause. « Je suis allé discuter avec le président et le directeur sportif du club, poursuit Salvioni. Nous avons envoyé une demande de dérogation à la Fédération italienne. Le samedi matin, il devait aller à l’école mais finalement il est venu s’entraîner avec nous. A la fin de l’entraînement, le directeur sportif m’a dit : "C’est bon. La Fédération est d’accord pour qu’il joue avec nous". Le dimanche, il est venu avec nous. Il est entré à une demi-heure de la fin. Il y avait 0-0, il a marqué et nous avons gagné 1-0. Il avait une personnalité, il faisait des choses incroyables. Un garçon de 15 ans a peur de jouer avec l’équipe première. Pas lui. »
Un talent et une force de caractère qui ont marqué les esprits des dirigeants de Lumezzane, Dario Lazzarin en tête. « Nous, les entraîneurs qui l’avons vu grandir, un jour on s’est dit : "Faisons un pari, parions quand est-ce qu’il gagnera un Ballon d’Or". Pour nous, il était, il est un joueur de Ballon d’Or, martèle Dario. Aujourd’hui, je ne sais pas. Oui, il a eu quelques problèmes de comportements. Mais il a encore une marge de progression pour pouvoir le faire… » Forcément, après des errances en Italie et en Angleterre, le doute est permis. Et quand Walter Salvioni revoit l’évolution du poulain, qu’il a lancé en pro le 3 avril 2006, une pointe de regrets est patente.
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« Je pense que s’il avait grandi d’abord en tant qu’homme, avant d’être un footballeur, il aurait pu avoir plus de chances, il serait devenu plus fort comme joueur, estime l’ancien entraîneur de Nice (2000-2002), à l’origine du replacement de Patrice Evra en latéral gauche alors que celui-ci évoluait attaquant chez les jeunes. Il aurait peut-être été différent et il ne serait peut-être pas arrivé ce qui lui est arrivé. Parce qu’il est fort. Je peux vous garantir qu’il est très fort. Quand il jouait, il voulait toujours démontrer qu’il était un bon joueur. Pour moi, il est bien à Nice. Il a trouvé un entraîneur qui peut beaucoup l’aider. Et ça m’a fait très plaisir. Parce que cet entraîneur l’a compris. Aujourd’hui, j’espère qu’il a grandi en tant qu’homme. Et à 26 ans, il a encore du temps pour grandir. » Et, même si le challenge s’annonce très, très dur, donner raison à ceux qui lui prêtaient un avenir avec un Ballon d’Or dans la vitrine.