"On a peur de perdre notre passion", à Sochaux, les supporters et salariés impuissants face à l’avenir du club

"Tu as vu la dernière info?" Au bord du terrain pour l’entraînement du FC Sochaux, les supporters ne parlent que de ça. Un repreneur va-t-il sauver le club? C’est la question que tout le monde se pose depuis la semaine passée, et la rétrogradation du FCSM de la Ligue 2 au championnat de National 1. Le président, Frankie Yau, a posé un ultimatum: il veut une réponse des potentiels repreneurs ce mercredi. Alors le temps presse. "C’est difficile de savoir où on va… ça me semble compliqué", se résigne Damien, un supporter. "Quelque part, je suis confiant. Avec les supporters on est actifs. J’y crois un peu quand même", préfère positiver Léo.
Ces derniers jours, les négociations se sont intensifiées entre de potentiels repreneurs et ladirection du club, sous la pression de l’ultimatum fixé par Frankie Yau. "Maintenant, c’est le temps qui nous manque", confie un proche du dossier auprès de RMC Sport. Deux investisseurs européens, dont un Français selon nos informations, ont été en discussions sérieuses cette semaine pour reprendre le club. D’après l’Est Républicain ce mardi soir, l’une des deux pistes se serait éteinte.
"Il faut rester optimiste"
L’objectif est de trouver un investisseur prêt à poser 12 millions d’euros sur la table. Avec l’espoir, derrière, de saisir le Comité national et olympique français, le CNOSF, pour un éventuel retour en Ligue 2. "Je pense qu’il faut rester optimiste, mais on est tous inquiets. On espère que la mauvaise période va bien se terminer, par le maintien du statut professionnel. Mais personne ne sait aujourd’hui quel sera l’avenir du club", nous glisse Eric Hély, ancien directeur du centre de formation et entraîneur du FC Sochaux.
En cas de descente en cinquième division, le club perdrait alors son statut professionnel, et avec, ce sont 150 emplois qui disparaîtraient. "Beaucoup de personnes ici ont prolongé leur contrat, sans qu’on soit prévenus qu’il pouvait y avoir des difficultés. On a l’impression de s’être un peu fait avoir, parce que l’on ne nous a pas informés", souligne Pierre-Alain Frau, légende du club et actuel entraîneur des U19. "On le vit forcément très mal, on ne s’y attendait pas. On ne s’imaginait surtout pas que le club risquait de disparaître. Je suis vraiment déçu, triste et dans l’incompréhension", ajoute l’ancien attaquant.
"Ça a été brutal"
Un sentiment partagé par Freddy Vandekerkhove, le team manager de l’équipe première: "Ça a été assez brutal pour nous. Je suis arrivé mi-juin pour préparer la nouvelle saison, les stages, les matchs amicaux… On était repartis pour la Ligue 2."
L’intendant historique du club, en poste depuis 1999, s’éclipse de l’entraînement. A quelques mètres seulement, le Stade Bonal est grand ouvert. Arrivé devant les bancs des joueurs et du staff, il s’arrête. "C’est ma place à moi depuis des années. Ici j’ai connu une montée en Ligue 1, une coupe d’Europe, une descente dramatique. Plein de souvenirs, d’être assis ici à ma place les soirs de matchs", se souvient-il.
Ici, chacun a ses repères. Dans la Tribune Nord, Fabrice Lefèvre, supporter emblématique et président de l’association FC Sochaux, a aussi sa place définie. "40 ans que je viens ici. Là je suis assis, mais d’habitude on est debout et c’est plein de vie. Plein de chants", confie-t-il. Ses yeux, qui brillent d’émotion, se perdent dans le vide. "En regardant ce terrain c’est… nos samedis soir, des émotions partagées avec nos amis. Voilà c’est la passion, et la passion qu’on a peur de perdre. On n’envisage pas de vivre sans ce qui constitue le fil rouge de nos vies. C’est comme si on perdait un membre, quelque chose pas de vital… mais pas loin".
Un coup dur pour l’économie locale
Car c’est bien plus que du football que perdent les habitants de Montbéliard. "Ici à Sochaux-Montbéliard on n’a pas tellement de choses pour vibrer. Pas trop de théâtre, de concerts de choses comme ça. Donc les gens le samedi ils aiment venir à Bonal en famille. C’est un peu comme à Lens, c’est vraiment la sortie des gens. Donc si on a plus ça, ça va être triste", assure Rémi, un abonné de longue date du FC Sochaux.
L’impact d’une descente irait bien plus loin que le simple enjeu footballistique, confirme l’adjoint au sport de Montbéliard, Alexandre Gauthier: "Il va y avoir une perte d’attractivité pour la ville et notre territoire. Il y a toute une activité qui gravite autour du club, les restaurants, les hôtels, les bars. Il faut voir l’effervescence que ça crée les jours de matchs."
Mais en attendant le verdict final concernant l’avenir du FCSM, au club, les joueurs continuent de s’entraîner normalement. Un match amical est même prévu face au RC Lens ce samedi. A quel championnat se préparent les joueurs ? "On ne sait pas" répond l’un d’entre eux. Mais les rires et sourires sont bien présents à l’entraînement, malgré tout.
Si réintégration en Ligue 2 il y a, une autre question se posera alors. Avec quelle équipe aller chercher le maintien? Depuis la saison dernière, plus de 20 joueurs professionnels ont quitté le club.