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JO 2022: les cinq chances de Pinturault pour enfin décrocher l'or olympique

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En plus du Team Event qui se déroulera en toute fin de quinzaine, Alexis Pinturault a quatre occasions de décrocher en individuel l’or olympique pour la première fois de sa carrière, lors des JO 2022 de Pékin. Avant de s’aligner sur le combiné alpin, le géant, et le slalom, il s’attaque ce mardi à sa première cible: le Super-G, dont il sera l’un des outsiders.

Le ski est une science parfois bien inexacte, dont les impondérables atteignent leur paroxysme en période olympique. Fort de ce constat, Alexis Pinturault s’avance à Yanqing avec peut-être moins de pression qu’il n’en avait connu lors de ses précédents JO à Pyeongchang en 2018. Et pour cause, le skieur de Courchevel n’a pas remporté la moindre victoire cet hiver en Coupe du Monde, une rareté pour lui à un stade aussi avancé de la saison, dans une carrière justement ponctuée par 34 succès sur le circuit majeur et deux titres de champion du monde.

Alexis Pinturault, c’était d’abord l’histoire d’un skieur programmé pour devenir le premier français depuis Luc Alphand en 1997, à remporter le gros globe de cristal du classement général de la coupe du monde de ski alpin. Patiemment, il aura attendu son heure voyant des années durant, l’ovni Autrichien Marcel Hirscher lui damer le pion (huit années de domination sans partage), avec inconsciemment la certitude quelque part qu’un jour il finirait par succéder au rejeton d’Annaberg.

Le Covid-19 et le confinement planétaire de mars 2020 l’en ont empêché dans un premier temps. Mais Pinturault s’est vengé en mars 2021 arrachant enfin son Excalibur des griffes de la neige de Lenzerheide en Suisse, comme un symbole, le jour de ses 30 ans au bout d’un hiver éreintant. La prime au patron, enfin. Lui, sur le devant de la scène. Les autres à ses pieds. Un succès, comme la preuve d’un état de fait: à cet instant-là, oui, Alexis Pinturault est bel et bien le meilleur skieur de la planète. De quoi imaginer un avenir doré, alors à 11 mois de ces Jeux Olympiques de Pékin.

Pas assez de repos entre les deux saisons

Sauf que la magie semble avoir depuis fondu comme neige au soleil. Monté à trois reprises (seulement!) depuis le début de l’hiver sur un podium de Coupe du monde, sans jamais s’imposer donc, il affiche à l’approche de ces JO, un bilan saisonnier parmi les plus décevants depuis ses débuts en pro en 2010. "C’est quelque chose que personne n’a mesuré, regrette son entraîneur principal Fabien Munier. Ni lui, ni nous, ni son entourage familial n’avait imaginé que le fait de gagner le gros globe allait libérer une pression aussi énorme, et que derrière arriver à se redonner des objectifs pour repartir au charbon serait aussi difficile." Un sentiment confirmé par Romane, l’épouse et attachée de presse à l'année d’Alexis Pinturault, qui suit le skieur à longueur d’hiver sur toutes ses compétitions. "Il n’a réalisé qu’il était le meilleur qu’en réattaquant la compétition cet hiver et on n’a peut-être pas pris assez de temps derrière le gros globe pour vraiment switcher au niveau de l’état d’esprit. Ça été plus difficile qu’on pensait."

"L'or olympique, un rêve"

Voilà pour l’autocritique, mais tout cela ne serait-il pas finalement un mal pour un bien? Libéré de cette pression pour le gros globe assez rapidement cet hiver, (il avait avoué ne plus viser l’objectif de se succéder à lui-même dès Alta Badia en décembre), Alexis Pinturault a très légèrement allégé son calendrier de compétition, en profitant pour travailler à l’entraînement sur un matériel plus varié notamment en slalom géant, afin d’arriver aux Jeux Olympiques avec un panel plus étoffé encore de possibilités en fonction notamment des conditions de ski de Yanqing. Il a peut-être inconsciemment aussi désigné ces JO comme le climax de sa carrière, possiblement sa dernière occasion après trois médailles olympiques déjà décrochées de s’offrir enfin l’or. "C’est un rêve confirme-t-il. Mais aussi un objectif relativement important dans ma carrière. Je n’ai pas gagné cette année, mais ça peut aussi être l'occasion d’être en Chine avec le cœur un peu plus léger pour profiter et m’amuser, bien entendu en restant concentré sur l’objectif et performer au maximum."

Ne parler que du positif... malgré le contexte

Dans son clan en tout cas on en est convaincu, les déceptions à répétition de l’hiver ne présagent rien de mauvais pour Pinturault. "J’ai le sentiment que cette année l’objectif c’est les Jeux olympiques, analyse ainsi Fabien Munier. Et je suis convaincu qu’il y prendra des risques comme il n’en a pas encore pris cette année sur les compétitions. Je ne l’ai pas encore vu se livrer comme il est capable de le faire parfois à l’entraînement ou comme il l’a fait par les saisons précédentes. Il y a un petit réservoir qu’il garde justement pour être performant lors de ces JO."

D’autant que malgré les restrictions drastiques liées à la crise sanitaire, tout a été fait dans l’entourage de "Pintu" pour rendre le contexte le plus positif possible. Hors de question par exemple de s’apitoyer sur son sort, alors que Romane, sa femme et sa plus fidèle assistante, ne peut pas dormir avec lui au village olympique, on parle plutôt chez les Pinturault depuis des semaines de l’enthousiasme de découvrir de nouvelles pistes, de nouvelles neiges, un nouvel environnement. "On essaye de ne parler que du positif, parce qu’il y en a, confirme justement Romane. Le but c’est de faire abstraction de toutes les contraintes pour ne pas se mettre dans un état d’esprit négatif susceptible de créer de l’anxiété. On est plus dans la sérénité avec un regard un peu curieux et on espère que niveau Covid, on va passer entre les mailles du filet et réussir à faire la quinzaine entière."

"Les JO c'est Walt Disney"

Passer la quinzaine tranquille, et y performer aussi en dépit d’une neige peu habituelle pour les skieurs le reste du temps, une neige typique de l’Asie, à la fois abrasive, (donc accrochante) et humide (donc parfois glacée et plus rapide, ce qu’adore Alexis Pinturault). "De toute manière il faudra prendre cette neige comme elle vient rappelle le champion. Et le jour de la course il faudra être prêt. Y’a pas de question à se poser. » En la matière son coach Fabien Munier ne se fait pas trop de souci. « Cette année l’objectif pour tout le monde et surtout pour lui ça reste les jeux olympiques martèle-t-il. Et je suis convaincu que pour les Jeux olympiques, il prendra des risques comme il n’en a pas encore pris cette année sur les compétitions. Je ne l’ai pas encore vu se livrer comme il l'a fait par le passé et je pense qu’il y a un petit réservoir qu’il garde justement par rapport à ça."

Eléments de réponse donc mardi sur un Super-G dont les grands favoris s’appelleront Marco Odermatt pour la Suisse et Aleksander Aamodt Kilde pour la Norvège. Une épreuve de vitesse sur laquelle Alexis Pinturault a son rôle et sa carte à jouer. Il y avait notamment obtenu une superbe médaille de bronze l’an passé aux championnats du monde de Cortina d’Ampezzo. Sa seule victoire en revanche dans cette spécialité remonte à une manche de Coupe du Monde en 2014 à Lenzerheide. Mais comme le dit Alexis Pinturault pour se motiver: "les Jeux olympiques c’est un peu le Walt Disney des athlètes, quelles que soient les épreuves, c’est un endroit où on a toujours envie de performer".

Arnaud Souque, à Yanqing