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Toulon: "Pas des vacances, loin de là", Lakafia se confie sur la reprise

Raphaël Lakafia

Raphaël Lakafia - Icon Sport

Raphaël Lakafia est revenu ce jeudi sur le retour à l'entraînement du RCT après plusieurs mois d'interruption liés à l'épidémie de coronavirus. Le troisième-ligne toulonnais a notamment décrit le gros travail à faire pour retrouver une condition physique optimale pour préparer la prochaine et comment le groupe varois avait passé cette période si particulière.

Raphaël Lakafia, comment se passe la reprise de l’entraînement au RCT?

Comme vous le savez, la reprise se fait par petits groupes de cinq joueurs, pour respecter les mesures sanitaires. La salle est divisée en cinq, le terrain aussi. On ne se côtoie pas, il n’y a pas de douche, pas de café, ni de repas en commun. Tu arrives avec ta bouteille d’eau, ta serviette… Chacun reste dans des zones bien délimitées. On ne s’entraîne pas avec un masque, mais on nettoie les barres, les poids, le matériel, après chaque exercice de musculation.

La bonne humeur reste-t-elle au rendez-vous malgré ces conditions sanitaires assez spéciales?

Ce qui prédomine, c’est le plaisir de retrouver les coéquipiers, la salle, l’ambiance d’entraînement. Quand tu as passé deux mois à bosser tout seul dans ton garage, tu es content de retrouver les coéquipiers, de pouvoir un peu déconner, se challenger. Pour le moment, on fait essentiellement du physique et de la réathlétisation, pour se préparer à encaisser une grosse charge de travail. Physiquement, j’ai réussi à maintenir un bon état de forme. Cette période a fait peur à tout le monde. On n’avait pas envie de revenir dernier de la classe à la reprise! Le poids a été respecté quasiment pour tous. Avec une petite marge de un ou deux kilos.

Avec un peu de recul, comment vous et le reste du groupe avez vécu cette période de confinement, à la maison?

Pour les mecs qui vivaient seuls, il y a forcément eu un peu d’ennui et de lassitude. On a pas l’habitude d’être autant chez soi, de ne pas se lever avec un objectif précis. Dans mon cas, c’est différent. Deux enfants en bas âge, c’est du boulot à gérer, cela crée un peu de fatigue. Mais on ne se plaint pas. Comme pour n’importe quel papa, il peut y avoir des moments de ras-le-bol.

Je n’ai pas eu besoin du confinement pour m’occuper de mes enfants. Mais d’habitude, il y a la nounou, la famille, qui peuvent nous aider. Là, on a pu en profiter et assumer ce rôle de père de famille pendant deux mois et demi non-stop. Les nuits étaient un peu courtes, mais j’ai toujours réussi à caler mes séances. Les objectifs ont été remplis, même si ça n’a pas été un long fleuve tranquille.

Le dossier de la baisse des salaires a été particulièrement bien géré au RCT…

Cet épisode nous a permis de montrer une certaine unité dans le groupe, en acceptant unanimement cette baisse de revenus. Quand quelqu'un perd autant d’argent, mais est prêt à maintenir ses engagements, on ne peut être qu’impressionné par cette démarche. Bernard Lemaître est resté très classe, droit, vis-à-vis de tout le monde. Peu de présidents ont je pense proposé de maintenir les salaires des joueurs, du staff, du personnel. On s’est senti redevable et il y a donc logiquement eu un processus de négociation entre joueurs, pour que l’on trouve un accord qui convienne à tous.

Au fait, Patrice Collazo a-t-il trouvé les coupables?

Oui, il a retrouvé les commanditaires (rires). Je n’étais pas dans le coup, j’ai appris cela comme tout le monde. Ça s’est fait dans la bonne humeur, pour taquiner le coach (l’entraîneur du RCT étant un peu maniaque, un groupe de joueurs avait fait une expédition nocturne pour déplacer tout son mobilier de jardin pendant le confinement, ndlr), avec quelques arrangements artistiques dans son jardin…

Votre programme de reprise prévoie une semaine de congés toutes les trois semaines de travail. Ce sera important d’avoir aussi de vraies vacances…

C’est certain! Si je t’envoie le programme physique qu’on avait, ce n’était pas des vacances, loin de là! Faire une préparation physique de quasiment six mois, ça ne nous est jamais arrivé. Il ne faudra pas remplir les journées pour remplir les journées. Les préparateurs physiques ont trouvé une formule intelligente, qui nous permettra de se régénérer en ayant aussi quelques jours de vacances.

L’actu rugby a été marquée par la retraite internationale de Jefferson Poirot. Avez-vous été surpris par cette décision?

Notre première réaction, c’est d’avoir envie de discuter avec lui et de lui dire: «Qu’est-ce qui se passe?», «Pourquoi tu en as marre?». C’est une décision qu’on comprend et qu’on respecte. Ce qui me surprend, c’est que l’on puisse arriver à un état de lassitude aussi jeune. Mais on ne peut pas se mettre à la place de chaque mec. Chacun a sa petite famille, ses contraintes son vécu, et c’est courageux d’avouer qu’on ne se sent plus d’assumer sur tous les fronts, et de dire stop.

Après, j’avoue que l’Equipe de France m’a toujours fait rêver. Même moi, à 32 ans, si on m’appelait, j’irais… Donc j’ai un peu de mal à comprendre un choix pareil. Ça va tellement vite, une vie de sportif... Quand c’est fini, tu passes ta vie à te refaire ta carrière en boucle, en te disant: «Et si j’avais fait si? Et si je n’avais pas fait ça?…». Je voudrais juste qu’il n’ait pas de regrets plus tard en se disant, «Putain, j’aurais pu serrer les dents cinq ans de plus». Mais si il est vraiment en phase avec ce qu’il ressent, c’est l’essentiel. Et peut-être que ce n’est pas une décision définitive…

Le RCT a affiché quelques belle promesses la saison passée. Toulon sera compétitif et ambitieux à la reprise?

La saison dernière, en alignant un certain nombre de victoires, on a démontré qu’il fallait compter sur nous. On faisait peur et je pense qu’on fera à nouveau peur par la suite. On a un groupe jeune, déterminé, qui a beaucoup à prouver. Peu de mecs ont gagné des choses des choses, et ça peut créer des aventures exceptionnelles.

Je pense que l’on est prêt à performer dès la saison prochaine. On a un groupe complet, homogène, avec des joueurs d’expérience, quelques jeunes à fort potentiel et des étrangers qui sont là pour compléter tout cela. A Toulon, il y a une grosse base de joueurs français qui ont la dalle, et c’est super et prometteur.

Florent Germain