XV de France: le Top 14 au rang des accusés

Yoann Maestri - AFP
Une politique qui ne passe pas
C’est l’éternelle rengaine des sélectionneurs qui se succèdent sur le banc du XV de France : ils ne disposent pas assez souvent de leurs joueurs. La FFR et la LNR ont pourtant pris des mesures pour établir des plages de préparation et créer une liste de 30 joueurs protégés. Mais les instances ne manquent jamais une occasion d’ériger le Top 14 comme la vitrine du rugby français. A la manière de la Premier League en football, le championnat de France dispose des moyens financiers les plus importants du monde (avec le Japon qui prépare l’édition 2019) et attire des stars internationales qui viennent y finir leur carrière en assurant leurs arrières. Ce dumping se fait au détriment de la sélection, érigée en priorité dans les pays britanniques (Ecosse, Galles), l'Irlande et les nations du Sud. « L’Angleterre a été éliminée dès la phase de poule après avoir affronté le pays de Galles et l’Australie, rappelle Bernard Laporte. Mais quand je vois le jeu proposé, c’est autre chose que le nôtre. J’ai plus confiance en l’avenir des Anglais que dans le nôtre. »
Le niveau du Top 14 en question
Les défenseurs du Top 14 ne manquent pas de rappeler qu’il est le meilleur championnat du monde et que le Rugby Club Toulonnais est triple champion d’Europe en titre. Mais il y a souvent tromperie sur la marchandise... Exemple, la dernière finale du Top 14 entre le Stade Français et Clermont (12-6), sans le moindre essai. Depuis 2007, la moyenne d’essai en finale se situe à 1,3. Vous avez dit spectacle ? Graham Henry, ancien sélectionneur de la Nouvelle-Zélande sacré champion du monde en 2011, n’a pas mâché ses mots contre ce championnat et… ses entraîneurs. « La compétition en France est pauvre, balance-t-il dans le NZ Herald. La compétition professionnelle la mieux payée dans le monde du rugby ne peut pas produire de joueurs de rugby parce qu’ils sont mal entrainés et surpayés ? C’est ridicule. »
Des jeunes qui ne jouent pas
Pour assurer l’éclosion de jeunes joueurs, la FFR a créé le système JIFF (joueur issu des filières de formation) en 2010, qui oblige les clubs de Top 14 à disposer dans leur effectif d’un pourcentage de joueurs ayant passé trois saisons en centre de formation ou ayant été licenciés cinq ans à la FFR. Un dispositif qui vole en éclat sur les feuilles de match où, face à la concurrence des stars internationales, les jeunes passent au deuxième plan. Graham Henry allume encore.
« Nos gars, et je les aime profondément, comme Ma’a (Nonu), Conrad (Smith), Dan Carter et d’autres vont y aller (dans le Top 14) pour jouer et obtenir leur pension de retraite, s’amuse-t-il. Ils jouent dans une compétition ridicule. Tout est lié au sponsorship et à la télévision. Ils sont en train de ruiner le rugby en France. Vous l’avez vu samedi. Les mecs français ont tout essayé mais ils n’étaient pas au même niveau de classe que nos gars. » Un avis que partage Bernard Laporte, membre de la Dream Team RMC, manager de Toulon et en course pour la présidence de la FFR. « Il faut révolutionner les choses et faire émerger des jeunes avec un peu de talent. Samedi, on a vu des joueurs faibles à certains postes. »