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Ski alpin: comment l'équipe de France se remet du choc de l'accident de Sarrazin

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Xavier Fournier, directeur du groupe vitesse de l’Equipe de France de ski alpin, revient sur l’état de ses troupes après l’accident de Cyprien Sarrazin, à Bormio, qui a laissé des traces dans les têtes de chacun.

Xavier Fournier, après l’étape de Coupe du monde à Bormio, était-ce important pour tout le monde de couper?

Les huit jours après Bormio ont fait le plus grand bien. Après on devait s’entraîner en France, mais la météo était mauvaise, donc on est parti en Italie, Bielmonte, à deux heures d’Aoste. C’était très bien, on s’est bien entraîné. Tout le monde était plutôt bien reposé.

Le groupe vitesse a vécu déjà des accidents graves par le passé. Est-ce qu'on s’habitue ou ça aide à mieux gérer les accidents?

On ne s’habitue jamais. On est conscient du sport que l’on fait, qui est à risque. Mais on ne s’habitue pas à ça. Lever quelqu’un quand il est blessé, c’est toujours aussi dur. Après on arrive à le gérer, parce que c’est notre métier, eux c’est le leur. Mais ça reste toujours difficile.

Sentez-vous l’ensemble du groupe remobilisé?

Ils sont dans le sportif. Cyprien va de mieux en mieux donc ça a un impact sur eux et ça les rassure. On a souvent des messages de Cyprien donc maintenant, ils sont repartis dans la compétition, la performance. C’est comme ça qu’ils doivent l’aborder.

On sait que vous êtes un groupe soudé. Un lien encore plus particulier s'est-il créé depuis cet accident?

On a un groupe soudé parce qu’on a vécu des choses. Là, c’est plus grave qu’un genou. À chaque fois qu’il y a un blessé, c’est l’esprit de la vitesse qui est comme ça. Que ça aille bien ou moins bien, le groupe est toujours soudé. Ils vivent des choses que l’on ne vit pas en slalom ou en géant parce qu’il n’y a pas cette notion de risque. Quand un athlète est moins bien, il a souvent besoin d’un autre pour le supporter, l’aider. Nous on est là pour les aider, mais entre eux ils s’aident aussi. C’est comme ça que ça marche.

Réfléchissent un peu plus aux risques de leur sport dans le portillon?

A Bormio, en plus, ils ont été un peu malades. Le lendemain (de la chute de Sarrazin) ç'a été difficile de prendre le départ de la course. Ce sont quand même des athlètes qui ont un mental fait pour ça. Ils l’ont démontré. Ce sont des mecs qui sont hyper costauds. Mais ça leur a demandé une énergie de fou. C’est pour ça que derrière, ils ont eu huit jours de repos. C'était nécessaire. On est sorti de là-bas, on était tous lessivés, le staff et les coureurs. Ça demande une grosse énergie pour sortir encore une course après ce qu’il s’est passé.

Quel est votre point de vue concernant la sécurité des skieurs. Y a-t-il des choses à améliorer?

Des choses à améliorer, c’est certain. Sur la préparation des pistes, il y a des choses que l’on ne doit pas avoir. Des neiges agressives après des neiges dures, ça, tous les athlètes nous disent que c’est ce qu’ils détestent. L’airbag, c’est une bonne avancée. Mais la FIS est revenue en arrière en acceptant que certains ne l’aient pas. Je ne trouve pas ça normal. Pour moi, à un moment donné, la FIS doit prendre ses responsabilités. Ceux qui n’ont pas l’airbag, ils ne skient pas, et c’est tout. En F1, il y a le halo, il y en a qui était contre et on a vu avec Grosjean comment ça s’est passé…

On parle notamment des combinaisons…

Oui, il y a les combinaisons. Mais aussi faire tester les pistes comme on le faisait avant. D’anciens coureurs pourraient faire ça, qu’ils donnent leur avis la semaine d’avant. Dire si les bosses volent trop. On ne doit pas arriver sur une piste avec une bosse qui vole trop. Après, à nous de travailler en collaboration avec la FIS, les organisateurs, pour améliorer les choses. C’est un sport, que ce soit en amateur ou professionnel qui est accidentogène et on doit améliorer ça. L’image pour le sport n’est pas forcément bonne, de voir tous ces blessés.

La préparation des pistes est-elle devenue un sujet plus important que de faire ralentir le matériel?

C’est un tout. Le matériel, le problème, c’est qu’ils ont déjà essayé de le ralentir, en rallongeant les skis en géant. Les marques travaillent. Les athlètes deviennent plus fort physiquement et techniquement. Ça progresse tout le temps. On va toujours aussi vite. Il faut travailler beaucoup de choses. Le problème est que, si le matériel a progressé, les pistes sont les mêmes. Elles ne sont pas plus larges. L’idéal serait qu’elles fassent le double de largeur comme en F1 où il y a des espaces pour s’arrêter mais nous ce n’est pas possible en ski. Il faut se remettre un peu en question. Et réfléchir comment améliorer.

Léna Marjak