Ski: Pinturault appelle à un effort général pour l'écologie et défend ses voyages en avion

Il est un témoin privilégié et catastrophé des conséquences du réchauffement climatique dans ses montagnes. Le skieur Alexis Pinturault (31 ans), vainqueur de la Coupe du monde 2021, traite de son rapport à l’écologie dans son livre "De l’or au cristal" (Editions Marabout) à paraître le 19 octobre. Dans une interview au Parisien, le triple médaillé olympique évoque cette prise de conscience collective en France, mais pas encore à travers le monde comme en atteste la très polémique attribution des Jeux asiatiques d’hiver à l’Arabie saoudite.
"En Arabie saoudite, il n’y a rien, pas de sports d’hiver, pas de sports de glace, pas de stations de ski"
"J’ai pris le temps de me renseigner, et c’est scandaleux, dénonce-t-il. C’est une hérésie de faire ça là-bas. Si on prend les JO organisés en Chine cette année, il y avait au moins des stations, une culture locale des sports de glace et une connaissance du froid. Il y avait des choses atténuantes à côté d’autres plus critiquables. Pour l’Arabie saoudite, il n’y a rien. Pas de sports d’hiver, pas de sports de glace, pas de stations de ski, etc. Oui, ils ont des montagnes à près de 3 000m d’altitude, mais autour c’est le désert sans précipitations. Ces choix ont été faits par des gens qui ne se posent pas du tout la question du changement climatique. Maintenant, il ne faut pas oublier que l’on parle de transition écologique chez nous, mais il y a énormément de pays où personne n’en parle parce que les gens sont trop pauvres, ou alors parce qu’ils sont en pleine expansion et imitent ce que l’on a fait il y a cinquante ou cent ans."
Le skieur de Courchevel pointe aussi du doigt l’organisation des compétitions qui nécessite de nombreux vols et milite par exemple pour faire des blocs de compétitions par continents (Europe, Etats-Unis) afin de réduire les déplacements. Il aimerait "un cahier des charges strict" limitant par exemple l’utilisation d’hélicoptère par les skieurs pour se déplacer dans les stations. Il défend aussi ses voyages en avion pour se rendre, par exemple, lors de stage en Argentine.
"Oui je prends l’avion, mais je fais aussi des tas de choses chez moi que 90 ou 95 % des Européens ne font pas"
"Je prends l’avion pour mon travail et il ne faut pas oublier qu’une poignée de gens gagnent leur vie par le sport dans le monde. À la grosse louche, je dirais que l’on est 100 000 personnes. On est une niche qui véhicule du plaisir, de la passion. Demain, on peut aussi dire aux acteurs d’une série TV de ne plus se déplacer sur tel site de tournage, et le programme ne sera plus aussi bon. Est-ce qu’on arrête tout ce qui n’est pas utile, mais alors il n’y aura pas que le sport? Ça ferait drôle à beaucoup de monde. Oui je prends l’avion, mais je fais aussi des tas de choses chez moi que 90 ou 95 % des Européens ne font pas."
Pinturault pousse pour l’aménagement de stations afin de limiter l’accès massif des voitures. Il ne s’oppose pas au tourisme dans ces zones. "Je trouve ça ridicule de pointer du doigt des systèmes ou des gens, explique-t-il. Dans ce cas, on peut aussi dire que l’on arrête toutes les cimenteries ou industries sidérurgiques du pays. C’est comme quand je vois certains dire sur les réseaux sociaux : untel prend l’avion, moi non, donc je changerai quelque chose uniquement quand il arrêtera. En fait, ce sont des raisonnements hyper égoïstes. L’effort doit être général, et tout le monde doit s’y mettre."