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Boxe: un troisième Fury-Wilder dans l’histoire, le débrief du RMC Fighter Club

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Champion WBC des lourds, Tyson Fury a conservé sa ceinture ce samedi soir à Las Vegas face à Deontay Wilder. Un combat ultra spectaculaire, inoubliable et historique, à jamais gravé dans l’histoire de la discipline, qui méritait bien un gros débrief du RMC Fighter Club.

Sourire dans la voix, Souleymane Cissokho lance une formule qui résume tout: "J’ai tellement kiffé que ça m’a donné envie d’aller m’entraîner". Le médaillé de bronze olympique à Rio et actuel champion WBA Inter-Continental des super-welters a réagi comme tous les amoureux de boxe devant le fabuleux spectacle proposé ce samedi soir à Las Vegas par le troisième combat entre Tyson Fury et Deontay Wilder. On n’avait plus vu les deux dans un ring depuis près de vingt mois. Mais l’attente valait le coup vu le résultat, qui nous a fait osciller entre papillons dans le ventre avant le premier coup de gong et un mélange de fatigue et excitation après le dernier.

Le combat ne restera pas comme une masterclass technique. Mais on a tout eu de la vraie bagarre entre les cordes, à l’ancienne, comme le résume Doug Fischer du célèbre magazine The Ring en évoquant "Rocky-Creed" ou "Popeye-Brutus" dans des comparaisons parlantes avec la pop culture. Le Britannique a conservé sa ceinture WBC des lourds, remportée contre l’Américain lors de leur deuxième duel en février 2020, au terme d’une guerre XXL au scénario incroyable: le "Gypsy King" envoyait le "Bronze Bomber" à terre au troisième round avant d’aller lui-même faire deux fois un tour au tapis dans le quatrième.

Pas dans son meilleur jour techniquement, à l’image de mouvements de tête et de feintes bien moins présents, le champion reprenait ensuite la main et commençait à détruire coup après coup un rival dépassé et sans gaz – 150 coups reçus dont 114 coups puissants (contre 72 et 63 placés), les deux plus gros totaux en carrière pour Wilder – mais qui représentait toujours un danger avec sa droite surpuissante avant de lui infliger un nouveau knockdown lors de la dixième reprise puis de terminer le travail avec un violent KO dans la onzième. En tête sur les trois cartes des juges au moment de l’arrêt, Fury a une nouvelle fois montré pourquoi il était le meilleur poids lourd actuel de la planète et combien sa capacité à encaisser et à récupérer était unique dans cette catégorie (à la Larry Holmes, pour les plus anciens).

"Le plus beau combat de lourds que j’ai vu en cinquante-sept ans de carrière"

Mais en face, Wilder a montré un cœur et un courage énormes et sort plus grandi de sa deuxième défaite que de n’importe quelle victoire dans sa carrière même si son refus de serrer la main du vainqueur et de le féliciter n’a pas plu à certains, à qui on devrait rappeler que les grandes trilogies de la boxe ne se finissent pas souvent par des câlins (Ali-Frazier, Barrera-Morales, etc). Et après le bonheur pugilistique, place au débrief. Podcast consacré aux sports de combats de RMC Sport, le RMC Fighter Club vous propose quarante minutes pour revenir en long en large en travers sur ce combat historique et ses conséquences pour l’avenir, avec notamment Souleymane Cissokho en consultant.

Quelle place pour ce combat dans la grande histoire des lourds? Sur les vingt dernières années, on ne trouve pas d’équivalent, pas même le spectaculaire et intense Anthony Joshua-Wladimir Klitschko d’avril 2017 à Wembley. Certains spécialistes remontent à Evander Holyfield-Riddick Bowe premier du nom (il y en a eu trois aussi), en novembre 1992, parallèle d’autant plus justifié que cette première défaite en carrière pour Holyfield lui avait apporté plus de crédit que toutes ses belles victoires précédentes comme on peut le voir pour Wilder, et d’autres jusqu’à George Foreman-Ron Lyle (combat pas pour le titre) en 1976 pour trouver un scénario équivalent.

>> Le débrief de Fury-Wilder III avec le RMC Fighter Club, c'est par ici

On pourrait en citer d’autres, bien d'autres même, mais l’essentiel reste de comprendre que ce Fury-Wilder III fait une entrée fracassante au panthéon du genre. "C’est le plus beau combat de lourds que j’ai vu en cinquante-sept ans de carrière", ose même Bob Arum, patron de Top Rank et légendaire promoteur qui a travaillé avec Muhammad Ali et les plus grands. Logique, aussi, de s’interroger sur la place dans l’histoire d’un Tyson Fury qui a pour la première fois défendu un titre mondial et qui a désormais détrôné Wladimir Klitschko "chez lui" en Allemagne en 2015 et qui a affronté trois fois en moins de trois ans un puncheur parmi les plus puissants de l’histoire de la catégorie (Wilder) en dominant les trois combats (le nul lors du premier aurait dû tourner en sa faveur), s’assurant au passage une place déjà réservée au Hall of Fame de la discipline.

Et quelle suite désormais pour le "Gypsy King"? A priori, cela devrait le mener à son compatriote Dillian Whyte, qui sera le challenger obligatoire pour la WBC s’il franchit l’obstacle Otto Wallin le 30 octobre. Mais on a surtout très hâte de le voir face à Oleksandr Usyk ou Anthony Joshua, qui vont se retrouver dans les mois à venir pour une revanche après avoir vu l’Ukrainien détrôner le Britannique de ses ceintures IBF-WBO-WBA fin septembre.

Quid, enfin, de l’avenir pour Wilder? A trente-six ans, et après avoir pris une rafale de coups comme celle-là, impossible de ne pas penser à l’idée d’une retraite qui serait bien méritée, d’autant que le garçon a plus que mis sa famille à l’abri financièrement (il a encore touché 45 millions de dollars pour cette trilogie). Mais Malik Scott, son coach, a déjà révélé que ce n’était pas dans ses plans. Qui pourraient le mener à un Andy Ruiz Jr, ancien champion IBF-WBO-WBA avec qui il partage le même promoteur, ou surtout à un intriguant choc contre Joshua si ce dernier ne renverse pas la table lors de la revanche face à Usyk. Il y a quelques années, on attendait ce choc pour une unification totale de la catégorie. Dans notre scénario, il serait plutôt question de rédemption. Mais on signe tout de même tout de suite pour voir ça.

https://twitter.com/LexaB Alexandre Herbinet Journaliste RMC Sport