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MMA: "Il est toxique", Conor McGregor a-t-il vraiment une chance d’être élu président de l’Irlande?

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Conor McGregor s’est lancé dans une campagne informelle en vue de l’élection présidentielle en Irlande. Malgré la popularité dont il jouit auprès d’une partie de ses compatriotes, l’ancienne superstar de l’UFC ne semble pourtant pas capable de l’emporter. Explications.

A croire que Conor McGregor se rêve en Donald Trump irlandais. A l’image de l’actuel président des Etats-Unis qui a réussi avec brio son passage du monde des affaires à celui de la politique, 'The Notorious' s’est lancé dans la course à la présidence de l’Irlande. Et à l’image de l’éphémère catcheur et véritable animal médiatique Donald Trump, l’ancien double champion de l’UFC compte surfer sur sa popularité pour créer un engouement autour de lui d'ici au 11 novembre 2025 quand ses compatriotes éliront le successeur de Michael D. Higgins, en poste depuis 2011 et qui fêtera bientôt ses 84 ans.

Dans la foulée de sa visite à la Maison Blanche pour la Saint-Patrick, Conor McGregor a multiplié les publications sur les réseaux sociaux pour faire monter cette possibilité de le voir se présenter dans la course à la présidence de son pays avec pour objectif final, en cas de victoire, de soumettre au référendum le pacte européen sur l’immigration auquel il s’oppose.

Peu de chances de recevoir les parrainages nécessaires

A la faveur de nombreuses saillies dans les médias et fort du soutien de personnalités comme Donald Trump, Elon Musk ou le sulfureux Andrew Tate, Conor McGregor entend donc officiellement avoir le droit de se présenter à la présidence de l’Irlandais. Bonne nouvelle pour lui, et peut-être la seule, il répond favorablement mais de peu au critère de l’âge avec une limite minimale fixée à 35 ans. Désormais âgé de 36 ans celui qui n’a plus combattu dans l’octogone depuis ses deux défaites contre Dustin Poirier en 2021 peut donc techniquement se lancer à l’assaut de la présidentielle.

Mais, un peu à l’image d’autres états européens comme l’Italie ou l’Allemagne, l’Irlande est un pays où le poids du président demeure limité par rapport aux parlementaires. Si bien que, si le président peut dissoudre le parlement, il tient directement son pouvoir des 234 élus des deux chambres. Surtout, et c’est la qu’un premier écueil risque de mettre fin aux ambitions politiques de l’ancien roi de l’UFC. Pour être candidat à la présidence, un Irlandais doit recevoir le parrainage de 20 parlementaires. Mission quasi impossible pour le combattant de MMA.

"Il y a beaucoup de membres de l'Oireachtas - 60 sénateurs et 174 députés irlandais, mais la plupart d'entre eux sont affiliés à un parti et ils ne le nommeront pas", a ainsi expliqué Gail McElroy, professeur de sciences politiques au Trinity College de Dublin, auprès de Sky Sports.

"Conor McGregor est toxique en Irlande. Je pense qu'il est presque inconcevable que quatre conseils de comté le soutiennent."

Si le soutien des comtés aurait permis de passer outre l’absence des parrainages des parlementaires, 'The Notorious' ne semble pas assez rassembleur et consensuel pour les obtenir. Dès lors, et comme l’a encore précisé Gail McElroy, l’ex-champion UFC des plumes et des légers n’a qu’une chance "proche de zéro" d’être élu président.

Une cote popularité très contestée en Irlande

Par un miracle politique, et si certains parlementaires affiliés à un parti décidaient de rejoindre tous les non-affiliés pour le soutenir, Conor McGregor pourrait alors se lancer officiellement dans la présidentielle irlandaise. Mais là encore, et même en cas de grosse surprise pour lui offrir une candidature officielle, les chances du combattant d’être élu président apparaissent comme quasi nulles et "vraiment tout simplement impossible" selon les mots de l’universitaire irlandaise auprès de Sky Sports.

Pour preuve, quand en 2023 l’Irlandais s’était lancé dans une série de tweets contre les migrants en marge des émeutes à Dublin, un sondage effectué dans la foulée avait montré que seuls 8% de ses compatriotes se disaient prêts à voter pour lui. Surtout, 89% des personnes interrogées avaient assuré qu’elles ne mettraient jamais un bulletin de vote en sa faveur.

Des prédictions assez peu encourageantes qui, en plus, sont tombées plusieurs mois avant la condamnation en première instance de Conor McGregor dans une affaire de viol. Le 22 novembre dernier, la Haute Cour de Dublin a condamné le sportif à verser 248.603,60 euros de dommages et intérêts à une femme de 35 ans qu’il aurait "brutalement violée et battue" dans un hôtel en 2018.

Si l’ancienne star des rings a fait appel de cette condamnation au civil (il n’est pas poursuivi au pénal), son image auprès des potentiels futurs électeurs irlandais se retrouve nécessairement ternie par cette affaire judiciaire. D’autres Irlandais n’oublieront pas non plus ses relations supposées avec la mafia irlandaise et notamment les Kinahans, là encore pas de quoi inciter à le soutenir pour la présidence.

Des "opinions d'extrême droite" encore minoritaires

Et malgré le format si particulier de l’élection présidentielle en Irlande, chaque électeur listant dans un ordre décroissant de préférence les différents candidats, les positions politiques de Conor McGregor ne devrait pas lui permettre de l’emporter lors du scrutin du 11 novembre 2025.

"Il y a des gens qui ont des opinions d'extrême droite, populistes ou anti-immigrés, mais pas suffisamment pour influencer en faveur de McGregor", a encore détaillé la spécialiste de la vie politique irlandaise auprès de Sky Sports. "Ce serait un vote minoritaire. Il est tellement loin derrière. Il y a beaucoup, beaucoup de candidats devant lui."

Fier d’être Irlandais au point de se fendre de messages nationalistes parfois à la limite de la xénophobie, Conor McGregor a clairement opté pour une posture conservatrice et a fait de l’immigration sa grande cause. L’une de ses dernières bravades lancées sur X (anciennement Twitter) se veut des plus claires: "L’Irlande doit rester Irlandaise". Mais sa ligne ne semble pas celle d’une majorité de ses concitoyens selon un membre du gouvernement qui a durement taclé un Conor McGregor capable de "générer beaucoup de publicité autour de lui" mais au sujet duquel les Irlandais ne se feraient aucune illusion.

"S'il se présente, je dénoncerai ses mensonges et dirai qu'il ne représente pas la grande majorité de notre pays", a clairement lâché Colm Brophy, ministre de l’Immigration, pour le Irish Times. "Nous avons déjà eu des candidats qui se sont présentés aux élections locales et nationales avec des positions avec lesquels je suis en total désaccord. Et il faut chaque fois les contester." Vraie volonté d’être élu président pour sept ans ou énorme coup de com', Conor McGregor aura au moins réussi à faire parler de lui et de ses idées.

Jean-Guy Lebreton Journaliste RMC Sport