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UFC 294: pourquoi Volkanovski peut y croire dans la revanche face à Makhachev

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Champion des -66 kg, Alexander Volkanovski dispute une deuxième chance d’aller chercher la ceinture des -70 kg face à Islam Makhachev ce samedi à Abu Dhabi dans le combat principal de l’UFC 294 (en direct à partir de 20h30 sur RMC Sport 2). Une revanche acceptée onze jours avant l’événement par l’Australien, qui a remplacé Charles Oliveira. Mais avec des raisons de croire en lui.

La bataille psychologique a débuté tout de suite. Quelques heures après l’annonce du changement dans le combat principal de l’UFC 294, à onze jours de l’événement, Islam Makhachev n’a pas tardé à s’exprimer: "Ne te sers pas de ce timing comme excuse après ma victoire". Le champion des -70 kilos de l’UFC venait de voir son horizon être chamboulé. Exit Charles Oliveira, l’homme contre qui il avait remporté la ceinture (vacante) il y a un an, et bienvenue à Alexander Volkanovski, le roi des -66 kilos, contre qui il a défendu son titre en février dernier en Australie. On attendait une folie. On aura le droit à une dinguerie.

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Quelques mois après leur premier combat, cinq rounds sublimes conclus sur la victoire par décision unanime du Daghestanais sur l’Australien (3 rounds à 2 pour deux juges, 4-1 pour le troisième), les deux hommes se retrouvent pour une revanche qui promet des étincelles ce samedi à Abu Dhabi. La couronne des légers de Makhachev sera une nouvelle fois en jeu. Mais une question plane au-dessus du choc. Volkanovski, qui avait fait mieux que de se défendre lors de leur première danse au point de voir beaucoup d’observateurs le désigner vainqueur, pourra-t-il déjouer les pronostics et s'offrir un exploit dingue malgré une préparation très raccourcie?

Une opération et des vacances cet été

Le constat de base incite au pessimisme. Volkanovski a défendu sa ceinture des plumes début juillet à Las Vegas, pour une démonstration conclue par un TKO au troisième round sur le champion intérimaire Yair Rodriguez, quand Makhachev n’a plus combattu depuis leur affrontement en février. Dans la foulée, "The Great" s’est fait opérer du poignet et a profité de vacances bien méritées. Dans son esprit, celui que beaucoup considèrent déjà comme le GOAT (le plus grand de tous les temps) de la catégorie des plumes préparait une nouvelle défense de son titre contre Ilia Topuria, un combat visé pour l’UFC 297 en janvier prochain à Toronto. Mais un appel a tout changé.

Après le refus de Justin Gaethje, justifié par un temps insuffisant pour faire le poids, l’UFC lui a proposé la revanche contre Makhachev pour sauver le combat principal de l’UFC 294. Et le garçon a accepté en "un seul coup de fil", dixit Dana White, patron exécutif de l’UFC. Le tout face à un des meilleurs combattants de la planète toutes catégories confondues, qui sera "à domicile" à Abu Dhabi, où le public sera acquis à sa cause, et avec la gestion d’un voyage tardif et d’un décalage horaire quand son adversaire se prépare depuis des semaines à Dubaï. Vous avez dit osé? On va jusqu’à intrépide. Bijoux de famille en titane.

Faire mentir les stats

Dans l’histoire de l’UFC, les combattants de trente-cinq ans (son âge) ou plus ayant eu une chance pour le titre dans les divisions inférieures aux moyens (-84 kilos) présentent un bilan de… 2-30 dans ces combats pour la ceinture. Pas grave. Volkanovski a toujours répété prendre "n’importe qui, n’importe quand, n’importe où". La preuve dans les faits. Et pas sûr, selon lui, que l’inverse aurait donné le même résultat…

"Les gens disent que c’était une évidence que j’accepte mais je vous garantis qu’il y a peu de combattants qui auraient fait ça", a expliqué l’Australien cette semaine lors du media day.

"Vous avez vu Islam dire que je ne devais pas m’en servir comme excuse, a-t-il poursuivi. Mais je vous garantis à 100% que si les rôles étaient inversés, ce combat n’aurait pas eu lieu. Il n’aurait pas accepté de combattre à 12 jours de l’événement."

Makhachev, et c’est de bonne guerre, lui a renvoyé la pareille: "Si l’UFC lui avait dit de défendre sa ceinture 12 jours plus tard à Abu Dhabi, il ne l’aurait jamais fait. Là, il ne prend aucun risque. Il ne défend pas sa ceinture. Il vient juste prendre de l’argent. C’est tout ce qui compte et tout le monde le sait." Et d’interpeller son rival en conférence de presse: "Tu dois me remercier. Je pouvais choisir n’importe quel adversaire. Il y avait Mateusz Gamrot, Dustin Poirier, tout le monde était prêt pour ce combat. Mais je t’ai donné une nouvelle chance." Le champion des -66 kg n’a pourtant pas tort. La pression se porte surtout sur les épaules de Makhachev. Après l’avoir battu lors de leur premier combat, le successeur et grand pote de Khabib Nurmagomedov n’a pas le choix. Face à un homme qui n’a pas bénéficié d’un vrai camp de préparation, il doit s’imposer. Et si possible faire mieux que la première fois vu les circonstances.

"Je vais le finir et faire retirer tout ce qui a été dit sur le premier combat", assume-t-il. Avant de préciser: "Je n’ai aucune pression. Je suis le champion, peu importe qui ils mettent en face de moi. Mais je suis d’accord aussi, Alex n’a aucune pression. Il a pris le combat onze jours avant, je l’ai déjà battu. Si je le bats encore, les gens vont dire qu’il a accepté à la dernière minute et qu’il n’était pas en bonne forme. Mais peu importe. Je vais juste monter dans la cage et terminer ce gars. (…) Tant que je serai là, il ne sera jamais champion dans cette catégorie." Volkanovski joue également gros. A trente-cinq ans, et après avoir nettoyé sa catégorie, l’Australien se retrouve face à son grand objectif de fin de carrière: prendre la ceinture des légers et devenir le cinquième champ-champ – champion dans deux catégories différentes en même temps – de l’histoire de l’UFC.

En cas de nouvelle défaite, il se retrouverait à 0-2 contre Makhachev et pourrait sans doute dire adieu à une nouvelle chance pour ce titre tant que le Daghestanais règne.

"Les gens disent que je n’ai rien à perdre mais ce n’est pas vrai", confirme-t-il au micro de RMC Sport.

"Si je perds, je n’aurai plus d’autre chance pour la ceinture, développe-t-il. Cette rivalité sera terminée. J’ai beaucoup à perdre. Mais pas de pression. Il y a plus de pression sur lui. J’ai beaucoup à perdre mais lui aussi. Je vois les choses comme ça: de gros risques pour une grosse récompense." Et de compléter en conférence de presse: "Je veux venger ma défaite. Ça me tue d’y penser. Ma main n’a pas été levée la dernière fois et ça m’a fait mal. Je dois le faire avec onze jours de préparation mais je l’ai accepté et je suis prêt à faire le show." Avec des raisons de croire en lui.

L’histoire, d’abord. Le grand livre de l’UFC, qui fêtera en novembre son trentième anniversaire, présente plusieurs chapitres où un combattant appelé en dernière minute a choqué le monde. Le meilleur exemple se nomme Michael Bisping, devenu le premier Britannique couronné à l’UFC en prenant la ceinture des -84 kilos en 2016 après avoir accepté d’affronter le champion Luke Rockhold moins de deux semaines avant le combat… alors qu’il se trouvait sur le tournage d’un film. Au-delà des souvenirs qui vont dans son sens, Volkanovski peut surtout croire en lui. Il suffit de revoir le premier combat pour comprendre.

Après son gros travail avec Craig Jones, compatriote et sommité du grappling mondial (qui a pris l’avion en pleine nuit pour le rejoindre après l’annonce de la revanche), l’Australien avait atteint son objectif: se relever chaque fois qu’il a été mis au sol, tout sauf un cadeau face à la lutte étouffante du Daghestanais. Au jeu du cardio, il avait aussi pris l’avantage, bouclant le combat façon boulet de canon au point de voir beaucoup se dire qu’il aurait peut-être pu terminer l’affaire s’il avait bénéficié de quelques minutes (ou un round) en plus. Il avait également, point important, placé plus de coups significatifs à son rival que l’inverse.

Il a les armes pour le faire, quoi. Reste à savoir s’il aura la caisse et si cette gestion du cardio ne tournera pas cette fois en sa défaveur vu le différentiel de préparation entre les deux. Quand on sait combien le garçon s’entraîne et reste en forme toute l’année, même lorsqu’il est en repos, on se dit qu’il pourra sans doute gérer la situation. Mais au plus haut niveau, ce sont les détails qui font la différence. Et celui-ci n’est pas petit. Il possède aussi un gros avantage par rapport au premier combat: avoir résisté cinq rounds à Makhachev, qui était déjà le favori à l’époque. Comme Khabib Nurmagomedov, le champion fait peur à la concurrence. Comme si l’aura de cette lutte daghestanaise que personne ou presque n’arrive à contrer lui donnait un énorme avantage psychologique dès le départ.

Mais Volkanovski a tenu vingt-cinq minutes contre lui. Il a gagné des rounds. Il lui a parlé quand ils étaient au sol pour pointer le fait qu’il n’était pas impressionné. Bref, il n’aura aucune crainte. "Même si tout le monde veut se persuader qu’ils sont humains, il faut l’avoir expérimenté, l’avoir ressenti, pour pouvoir le faire, explique Craig Jones dans une interview accordée à l’émission The MMA Hour. Lors des deux premiers rounds du premier combat, quand ils étaient contre la cage, Alex criait: ''Il n’est pas si fort'' ou ''Son grappling n'est pas si bon''. Plus le combat a avancé, plus il a pris confiance. J’ai très hâte de voir les deux premiers rounds de cette revanche car je pense qu’il va approcher le combat avec la confiance dans le fait de pouvoir éteindre Islam."

En lice pour une treizième victoire de rang à l’UFC, ce qui lui permettrait d’égaler la série de Khabib (mais ce dernier n’a jamais perdu dans l’organisation phare du MMA, ce qui n’est pas son cas), Makhachev – qui bénéficiera à son avantage d’un temps de réhydratation après la pesée plus long que lors de leur premier combat en Australie en février, une "excuse" dont Volkanovski n’a pas hésité à se moquer en conférence de presse – devra se montrer plus intelligent que dans le premier combat, où il avait trop cherché le KO pour montrer qu’il pouvait rivaliser avec l’Australien en striking, s’il veut s’éviter des frayeurs. Dans cette idée, beaucoup l’imaginent aller plus vers un parallèle avec le règne de Nurmagomedov en saoulant son adversaire d’amenées au sol et de contrôle/agressivité en position dominante au sol.

Si tout se passe bien, il pourra ensuite se tourner vers son nouvel objectif, dont il pourrait parler avec Volkanovski: une double ceinture. En cas de victoire, celui qui n’a pour l’instant pas défendu sa ceinture contre un "vrai" léger a déjà annoncé qu’il serait en bord de cage de l’UFC 296 en décembre pour le combat pour le titre des -77 kilos entre le champion Leon Edwards et le challenger Colby Covington. Avec l’idée de prendre le vainqueur pour devenir champ-champ et marquer l’histoire comme Khabib ne l’a jamais fait. Quoi qu’il arrive, vu leurs qualités, le combat entre Makhachev et Volkanovski sera forcément un bonbon. Et les enjeux à la hauteur de l’affiche.

https://twitter.com/LexaB Alexandre Herbinet Journaliste RMC Sport