UFC: "Il faut que je sois seul sinon je m’étouffe", Ngannou se confie sur les restes de son passé

Il est le champion du monde des lourds de l’UFC, titre défendu en janvier dernier contre Ciryl Gane. Pour beaucoup, il est donc vu comme "l’homme le plus fort au monde". Mais derrière le physique de mastodonte et la droite surpuissante, Francis Ngannou cache des fêlures conséquences d’un passé pas comme les autres. Obligé de travailler dans une mine de sable dans son enfance, balloté de foyer en foyer après le divorce de ses parents, arrivé en Europe comme migrant après plusieurs mois à vivre dans des conditions difficiles pour assurer le voyage depuis l’Europe, "The Predator" a dû suivre un parcours semé d’embûches avant de briller sous les lumières de Las Vegas. Mais il n’a pas oublié d’où il venait. Bien au contraire. Et cela se ressent dans sa vie de tous les jours.
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"Ma plus grosse peur, c’est l’engagement, confie le Camerounais dans une interview exclusive accordée à RMC Sport. Je n’aime pas vivre en captivité. Quand tu m’engages, j’ai du mal. Par exemple, aux Etats-Unis, ils ont un système de 'credit card' et de 'debit card'. La 'credit card', tu l’utilises avant de payer après. Donc tu t’engages à payer plus tard. Moi, je préfère utiliser ma 'debit card' où j’utilise l'argent qui est disponible. Même si j’ai l'argent pour payer la 'credit card', c’est un engagement et ce genre de trucs me fait peur. Car la limite de ça est un peu dangereuse. Je préfère payer à l’annuel et m’en débarrasser une bonne fois pour toutes. Mais quand c’est mensuel, je n’aime pas prendre des engagements, j’ai peur de ce genre de choses."
Une crainte toujours présente malgré les nombreux dollars accumulés depuis le début de sa carrière professionnelle en MMA en 2013. Les restes d’un passé gravé en lui pour toujours: "Il y a des séquelles que tu ne pourras jamais effacer". Et qui se retrouvent aussi dans son approche des relations sociales. "J’aime être seul, raconte Ngannou. Et ça encore, c’est mon passé. J’ai tellement vécu dans la solitude que je m’y suis habitué. Et aujourd'hui, c’est très difficile de m'engager socialement. Ça prend beaucoup d'énergie!"
Et le champion des lourds de l’UFC, qui vient de se faire opérer du genou, de poursuivre l’explication: "Ça vient du fait que pendant mon enfance, lors du divorce de mes parents, j’ai vécu dans plusieurs maisons et je faisais à peine six à neuf mois dans une famille avant de devoir bouger. A chaque fois, j’étais nouveau et il fallait prendre du temps pour se faire des amis. J’étais toujours l’étranger, un peu rejeté par les autres enfants, surtout que ma situation sociale ne me favorisait pas car j’étais l’enfant qu’on devait chasser de l’école puisque je n’avais pas de stylo ou de cahier ou parce que je n’avais pas payé la scolarité. Je n’avais pas un bon profil pour les autres enfants. Ils n’avaient rien à envier de moi...Du coup, je n’avais pas d’ami ni à la maison, ni à l'école, ni nulle part ailleurs."
Le témoignage du Camerounais est fort. Malgré sa notoriété, malgré sa belle ceinture, malgré l’argent accumulé, Ngannou reste ce Francis qui a appris à vivre avec la solitude.
"J’ai essayé pendant très longtemps de me faire des amis, de m’intégrer...Et ça a été très, très difficile. A chaque fois, il fallait recommencer. A un moment, pour me protéger, inconsciemment, j’ai accepté la situation et je n’ai plus essayé. Je me suis habitué à ça. Aujourd’hui, ça ne me dérange pas d’être seul. Parfois, je finis mes entraînements le samedi matin, ou en début d'après-midi, je rentre chez moi et je ne ressors que le lundi pour retourner à l’entraînement. Je suis confortable comme ça. Je dis très souvent non aux invitations pour des événements parce que ça me dérange. Et même quand j’y vais, à un moment, il faut que je me retire de la masse pour me recueillir sinon je m’étouffe. Il faut que je sois seul avec moi-même, sinon je me noie."