UFC: "Il y a de fortes chances que ce soit Paris", Benoît Saint-Denis finalement en route vers Bercy

Benoît, après votre victoire sur Niklas Stolze le week-end dernier, vous avez déclaré postuler pour l’UFC Londres du 23 juillet car vous vous mariez le week-end précédent l’UFC Paris. Depuis, la page Instagram La Transpiration, qui fait beaucoup de bruit dans le MMA français, a assuré que vous seriez sur la carte. Alors, vous verra-t-on à l’affiche le 3 septembre?
On est en pleine négociations avec mon manager, Guillaume Peltier, pour Londres ou Paris. Ce sera une de ces deux dates. Je vais pouvoir annoncer ça très prochainement. Il est sûr et certain que je serai sur une des deux cartes.
Certains se demandaient si l’UFC ne vous avait pas proposé de décaler votre mariage pour vous avoir à Paris, voire de le financer pour cela, fantasme ou réalité?
Des choses font partie des négociations, en effet, comme le fait de peut-être maintenir le mariage mais de l’amoindrir. Un mariage n’est pas non plus un enterrement de vie de garçon donc je ne suis pas obligé de me mettre minable. Forcément, je vais me restreindre un peu car le combat se fera encore sans doute chez les légers, à moins de 70 kilos, et c’est une catégorie de poids où j’ai une diète assez stricte à faire dans les dix derniers jours. Il faudra faire gaffe à l’alcool et aux gâteaux lors du mariage. C’est un peu chiant mais il y a des choses beaucoup plus ennuyantes dans la vie. Je suis un homme heureux, je fais un métier que j’aime, l’UFC me permet de vivre de ma passion et on verra bien si c’est Londres ou Paris mais dans les deux-cas, je ferai les ajustements nécessaires. J’ai la chance d’avoir une femme très compréhensive qui est à fond derrière moi donc ça va le faire dans les deux cas.
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Si vous combattez à Paris, vous n’allez donc pas décaler votre mariage prévu une semaine avant?
On ne le décalerait pas mais je serais en mode vraiment 'light'. Je me déchargerais un maximum sur la famille et je gérerais le minimum de choses.
Dans l’idéal, on suppose que préférez Paris "à la maison" plutôt que Londres?
Le cœur dit Paris mais la raison dit Londres. Combattre devant son public, c’est vraiment le top, même si j’ai beaucoup aimé l’atmosphère incroyable qui régnait lors du dernier UFC Londres en mars. Pour l’instant, je n’ai rien signé. C’est en négociations avec le matchmaker de l’UFC, qui veut absolument nous mettre sur Paris. On essaie de négocier Londres et de poser nos conditions pour Paris. Mais je pense qu’on va se diriger naturellement vers ça… C’est de la logique. L’UFC est une magnifique organisation mais qui reste réaliste. C’est du business. Où me veulent-il? A Paris. Et c’est quand même l’UFC qui aura quelque part le dernier mot car je bosse pour eux, tout simplement. C’est ma passion mais ce sont aussi mes patrons donc il y a de fortes chances que ce soit l’UFC Paris.
Revenons sur votre victoire du week-end dernier. C’était votre deuxième combat à l’UFC mais le premier dans votre bonne catégorie de poids, les légers, et avec un vrai camp de préparation. Comment jugez-vous votre performance?
Dans l’ensemble, ma performance est bonne. Il y avait énormément de poids sur moi et je suis content car on m’a enlevé ce sac des épaules. C’était un poids incroyable car il y a beaucoup de Français qui arrivent à l’UFC et qui soit ne gagnent pas soit n’arrivent pas à performer. Au vu des sparrings, des gens avec qui j’ai tourné, je sais que j’ai ma place là-bas. Et j’avais hâte de le prouver. En combattant dans ma catégorie de poids, celle où je veux aller le plus loin possible dans ma carrière, et en ayant pu préparer ça sur plus de deux mois et non trois semaines, la stratégie était là. Je n’ai pas trop exprimé mon pieds-poings mais vu mon feeling sur le grip quand j’avais les mains autour de Niklas, ça m’a fait persévérer dans ce domaine-là car je sentais que la carte de la soumission et de la domination grappling-lutte était ultra exploitable. C’était dans le plan mis en place avec mes coaches: selon le feeling quand j’avais la main dessus, je devais insister ou remixer un peu tout. Du coup, j’ai insisté. (Sourire.)
Votre premier combat à l’UFC, une défaite sur décision unanime en octobre dernier contre Elizeu Zaleski dis Santos, était une guerre incroyable dans laquelle vous aviez pris beaucoup de coups et montré un énorme cœur. Avec le recul, que vous a apporté ce combat?
J’ai pris beaucoup de coups mais je n’ai pas fait d’ascenseur. Après le combat, je me sentais très bien, j’avais juste le nez cassé. C’est un peu de chance aussi car il y a beaucoup de génétique qui joue. Il y a un moment où la partie motricité du bas du corps a été touchée mais ça n’a duré qu’une fraction de seconde, même si après ça a mis du temps à se remettre en marche. C’est un combat qui m’a fait énormément gagner en maturité. J’ai vu où il fallait que je travaille. Je n’ai pas assez pris mon temps. J’ai tiré beaucoup de leçons de ce combat. J’ai seulement commencé à m’entraîner fin 2018 en MMA donc j’ai encore une marge de progression. C’était un profil opposé au mien, un mec avec une grosse expérience, un gros punch, plutôt pieds-poings mais un vrai pieds-poings de MMA, qui défend bien les takedowns et prend son temps, ça m’a permis d’aller pousser dans mes retranchements, de voir que le cardio était là et que mon travail paie. Dans ma tête, c’était quelque part positif pour la suite, entre guillemets, et j’avais hâte de montrer à tout le monde que ça m’avait servi d’expérience et que ce ne serait pas la même chose dans cette catégorie. Quand j’attrape un mec chez les 70 kilos, ce n’est pas pareil. Tu apprends plus de choses dans la défaite que dans la victoire mais ça a un goût très amer et les mois après la défaite sont difficiles mentalement. Il faut savoir pourquoi tu fais ça et avoir envie de le faire. Et après, il faut avancer.

"Je suis prêt pour n'importe qui"
On sent dans vos mots qu’il y avait une réelle envie de remettre les points sur les i avec ce combat…
Bien sûr. J’avais envie de tourner la page. Même la plus belle des défaites ne vaut pas une victoire, surtout en finissant l’adversaire, ce qui permet de remettre les choses à plat et de voir positivement la suite. Chez les 70 kilos, avec tous les sparrings que j’ai pu avoir avec des athlètes top mondiaux, j’ai de très bonnes sensations donc j’ai hâte de continuer à montrer ça. Il va falloir le faire contre des adversaires de plus en plus qualifiés. Il n’y a plus qu’à bosser dur
Votre catégorie est un des plus denses à l’UFC, beaucoup plus par exemple que celle des poids lourds pour Ciryl Gane. Votre idée est-elle de monter doucement étape après étape ou aimeriez-vous vite pouvoir vous mesurer à un membre du top 15?
Honnêtement, j’ai envie d’aller le plus vite possible. Mais c’est une catégorie tellement remplie qu’il y aura des étapes. Je ne pense pas que je vais avoir un top 10 tout de suite. En welters, pour mon premier combat, ils m’avaient mis le numéro 12 mais c’était un peu le hasard des choses : le mec avait eu trois refus de suite, il fallait lui trouver rapidement un adversaire, c’était aussi l’occasion de venger son club car j’avais battu Luan Santiago, l’ancien champion du Brave qui est son sparring-partner. Toutes ces choses ont fait que ce combat s’est monté. Mais d’ordinaire, ça met plus longtemps. Preuve en est: Ciryl a autant de combats que moi et il a déjà combattu pour la ceinture, car il est rentré à 3-0 à l’UFC. Moi, je suis chanceux d’être rentré à 8-0-1 à l’UFC. Dans ma catégorie, Khabib Nurmagomedov est rentré à 16-0. Là, deux mecs m’ont refusé avant Niklas: un à 12-0 et un à 14-1. Cette catégorie est blindée. Dans le top 15, il n’y a pas un mec qui a moins de 30 combats. Il y a plein de noms qui m’intéressent et qui me font rêver dans ce top 15, que j’ai envie de prendre, mais pour l’instant je ne pense pas être en position de demander des noms à l’UFC. Ce que je leur ai dit, et ce n’est pas un secret, c’est que je suis prêt pour n’importe qui du top 15, n’importe quel adversaire. Faites-vous plaisir, choisissez ce que vous pensez être un bon combat et je ferai le boulot pour monter et gagner ma place dans le top 15.
Quand vous dites ça, ce n’est pas juste la forfanterie habituelle du combattant, vous pensez vraiment pouvoir déjà vous mesurer au top 15?
Bien sûr. Pour avoir fait du sparring avec des gens dans le top de la catégorie, je suis prêt pour ces mecs-là. Après, il va falloir le prouver et j’ai hâte de le faire. Les actions valent plus que la parole et ce sera à moi de mettre un point d’exclamation sur chaque défi qu’on va me donner.
Que ce soit à Londres ou à Paris, avez-vous en tête un nom pour votre prochain combat?
J’ai des noms, oui, mais comme je disais, je ne suis pas en position de demander à l’UFC. Mais quelque chose comme Dan Hooker, ça me ferait très plaisir. (Sourire.)
Avec votre entraîneur, Daniel Woirin, vous avez dû quitter votre salle chez Venum à Rungis, désormais occupée par le MMA Factory. Comment avez-vous préparé ce combat? On a vu passer les infos disant que vous aviez fait votre camp dans un Fitness Park, c’est réel?
Ouais. On est un peu les SDF du MMA français avec Daniel. Il a eu beaucoup de pression dans sa carrière et il ne veut plus se prendre la tête, il ne veut pas gérer une salle. Le staff du Fitness Park à Vitry nous a gentiment prêté le Fight Park, un espace avec une cage et des protection murales. C’est ce qu’il nous faut, on n’a pas besoin de plus. Il te faut aussi un coach et des sparrings de qualité et on a la chance d’avoir une bonne équipe de base et un bon turnover. Mais oui, un des combattants français de l’UFC prépare ses combats dans un Fitness Park et non dans une salle à lui car pour l’instant je n’en ai pas les moyens. Mais ça ne change pas grand-chose pour la qualité de l’entraînement. J’ai tout là-bas, où le gros du travail est fait, ou dans d’autres salles.
"Je ne serai jamais le premier à lâcher"
Vous êtes un des rares combattants français à l’UFC. A quel point est-ce frustrant de ne pas pouvoir bénéficier d’une salle "à vous"?
On a été bien accueillis au Fitness Park, on est heureux dans ce qu’on fait, la salle est prêtée gratuitement ce qui est super sympa de leur part. Il n’y a pas vraiment de frustration à avoir. Après, un jour, on aura peut-être notre salle avec un nom dessus. Au Venum, comme ça faisait pas mal de temps, je me sentais un peu chez moi. Mais c’est maintenant le cas au Fitness Park de Vitry.
Le MMA est un milieu où les combattants disent souvent des choses comme: 'Je suis un tueur dans la cage'. Vous êtes un ancien membre des forces spéciales l’armée, ce passé vous donne-t-il du détachement par rapport à tout ça?
Oui, je pense, car je suis plus proche de la réalité qu’ils ne le seront jamais. Je n’avais pas vingt ans que j’avais déjà vu des morts sur le terrain en réel. La vraie guerre, je l’ai vécue. Il n’y a que les actions qui parlent. A l’entraînement, je suis quelqu’un de scolaire, j’aime prendre du plaisir et m’amuser avec mes sparring-partners, que tout le monde s’améliore et s’entraide. Qu’on se pousse vers le haut mutuellement. Mais quand la cage se ferme, je suis là pour le business. Et il y a ma fierté qui joue un rôle aussi. Je ne serai jamais le premier à lâcher. A moins que le mec fasse une différence nette, le combat va continuer. Les mecs savent très bien qu’avec moi, il faudra être prêt à faire 3x5 ou 5x5, et c’est la meilleure chose qui puisse leur arriver.
Comment définiriez-vous votre style de combattant pour quelqu’un qui ne vous a jamais vu évoluer dans la cage?
On voit un combattant qui aime mettre la pression et qui aime les "finishes". Hormis ma défaite à la décision pour mon premier combat UFC, j’ai fini tous mes combats. Du spectacle, donc, et de la pression que ce soit en pieds-poings, en sol ou en lutte, jusqu’à ce que ça casse en face.