UFC: William Gomis, un retour en forme de (gros) test

Il n’était pas la plus grande star française de l'inoubliable UFC Paris. Mais il a laissé un des plus beaux souvenirs de cette première soirée française dans l’histoire de l’organisation mastodonte du MMA mondial. Mis sur la carte en dernière minute, William Gomis avait pu compter sur un public en feu pour puiser dans ses ressources et sortir d’un triangle bien verrouillé par son adversaire Jarno Errens en fin de troisième round pour aller s'imposer sur décision majoritaire. Avant de lâcher cette phrase au micro qui résumait bien sa fin de combat: "Plutôt mourir que d’abandonner!"
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Sept mois et demi plus tard, le "Jaguar" revient aux affaires dans l’octogone, toujours dans sa catégorie des plumes, opposé ce samedi soir à Las Vegas à l’Américain Francis Marshall sur la carte préliminaire d’une UFC Fight Night pour son premier combat aux Etats-Unis. Un retour en forme de test pour le Français. Invaincu en carrière pro avec un bilan de 7-0, "Fire" Marshall (un surnom qui fait aussi jeu de mots, rapport aux pompiers). Bon lutteur, à l’aise au sol, plus que correct sur sa boxe anglaise, le combattant de 24 ans qui compte quatre soumissions sur ses sept succès présente un profil complet.
Au point de voir de nombreux spécialistes expliquer que l’UFC n’a pas fait un cadeau à Gomis pour sa deuxième sortie dans l’organisation. "C’est plutôt lui qui a un gros problème avec moi", répond le combattant français dans un sourire au micro de La Sueur. A 25 ans, celui qui annonce "la ceinture UFC" comme objectif n’est pas du genre à craindre un défi. Au contraire. Il en salive d’avance. "Je me suis dit: génial. Le mec a plus de soumissions que moi, j’ai plus de KO que lui. Normalement, c’est un combat qui va se finir assez vite. Il ne va pas durer longtemps. Promis."
Du côté de son clan, on s’avance confiant par rapport au travail effectué. Mais sans minimiser la tâche à accomplir. "Il faut être prudent, estime Fernand Lopez, son coach/manager, dans son émission King & The G sur YouTube. Marshall est solide. C’est un vrai prospect. (…) C’est un très bon lutteur, avec cette capacité à presser en lutte. Il est agressif en boxe anglaise, capable de jouer avec les changements de niveau et les déplacements, et c’est extrêmement dangereux pour un sniper comme William qui boxe sur le reculoir, en bougeant. Il a un puissant bras arrière et un bon crochet du gauche. C’est un vrai problème à résoudre."
Gomis, qui reste sur une série de neuf victoire (11-2 en bilan global), a fait le travail pour dénouer les fils de ce casse-tête, notamment avec Français Laurent, fondateur de l’académie Infinity. "William avait du mal à gérer la manière de défendre la lutte au départ, car il ne strikait plus assez et ça donnait du confort au gars en face, précise Lopez. On a ajusté petit à petit pour arriver à quelque chose ou tu es capable de te déplacer et de défendre la lutte mais aussi de frapper à la moindre opportunité qui se présente. C’est sur ça qu’on est arrivé."
Il sera aussi plus en forme que lors de ses dernières sorties. Handicapé par un problème aux yeux, Gomis a pris le temps de le régler avant de remonter dans la cage. "Je n’ai pas aimé mes deux derniers combats, avoue-t-il. Pas du tout. Mais je sais que je vais kiffer le suivant. Je n’étais pas à 100% de mes capacités. Je ne pouvais pas faire tout ce que je pouvais faire ou bien regarder mon adversaire car je ne voyais pas très bien. Je devais me limiter à me protéger et à essayer de gagner. Là, j’y vais pour gagner, je suis en possession de toutes mes capacités."
Quelques mois d’absence qui l’ont aussi vu prendre de la masse. "J’avais des traitements à prendre, des perfusions, et ça m’a fait gonfle, notamment au niveau des joues. On faisait aussi un travail avec ma préparatrice pour prendre en force. Les gars sont plus costauds à l’UFC donc on fait en sorte de l’être aussi." Relâché face aux événements et à la pression, "très conscient de ses points forts et de ses points faibles" (Lopez), Gomis espère marquer les esprits face à Marshall et "prendre un bonus" (50.000 dollars) pour sa prestation. Le tout dans un combat entre espoirs qui ouvrira la route à son vainqueur. "Pour être honnête, ce combat est sacrificiel, détaille son coach. Ce sont deux jeunes qui montent. Je comprends la position du promoteur: on se dit qu’on les teste tout de suite pour savoir qui on va pousser par la suite."
Une victoire avec la manière ne gâcherait bien. "Je n’y vais pas avec l’intention de demander à William de finir absolument son combat mais avec celle de sécuriser une victoire, reprend Lopez. Mais s’il y a moyen d’accélérer pour stopper avant la limite, c’est bien sûr plus intéressant pour la hype, la construction de carrière et pour pouvoir enchaîner derrière s’il n’est pas blessé." En cas de succès, le "Jaguar" visera un combat lors du prochain UFC Paris, qui devrait se dérouler début septembre. Il espère "un top 15" mais a conscience qu’il est sans doute encore un peu tôt. Pas grave. Gomis prendra ce qui viendra et fera avec. "Tant que j’affronte le haut du panier à un moment donné, ça me va. Peu importe qui je prends jusque-là, lutteurs ou strikers."
Celui qui n’a plus connu la défaite depuis 2016 et ses deux revers face à Salahdine Parnasse et Morgan Charrière – excusez du peu – en pancrace (du MMA sans les frappes au sol, en gros) en début de carrière ne craint pas la chute et affiche sa "grande confiance". "On n’oublie pas la défaite. Mais on ne veut plus jamais revivre ça et on fait tout pour ça." A Las Vegas, il devra trouver un chemin devant le petit public de l’UFC Apex, loin des milliers de fans enflammés de Paris qui avaient su le porter en en septembre dernier. "Mais j’aime bien aussi, balaie-t-il. Ça me rappelle mes premiers combats en sanda, la discipline dont je viens."
Ce premier UFC Paris a changé sa vie. "Il y a eu un avant et un après. Plus de sponsors s’intéressent à toi, plus de gens te reconnaissent, t’as plus de supporters mais aussi plus de haters. Franchement, tout change." Mais la route vers le Graal est encore longue. Avec un gros test dès ce week-end. "J’ai hâte de vivre une guerre avec un mec qui va me donner du fil à retordre, m’obliger à me pousser dans mes limites et inversement. C’est là qu’on voit ce qu’on a dans le ventre." Francis "Fire" Marshall a les qualités pour allumer l'incendie. A Gomis de savoir éteindre le feu.