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Ciryl Gane fabuleux, ambiance folle… Pourquoi le premier UFC Paris restera gravé à jamais

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L’UFC a organisé son premier événement en France ce samedi soir à Paris. Et c’était une folie furieuse. Entre un Ciryl Gane qui a offert une performance géniale face à Tai Tuivasa, des Français tous vainqueurs et une ambiance folle, presque irréelle, ce ne sont pas seulement des combattants qui ont gagné à Bercy: c’est tout le MMA en France qui a vécu une soirée qui va tout changer.

On doit savoir apprécier le chef-d’œuvre du maître. On s’était demandé, à l’analyse de ses déclarations, si Ciryl Gane avait l’étoffe d’un champion. Il l’a. Et plus que ça encore. La supertar française du MMA a livré ce samedi une performance magistrale point d’exclamation d’une soirée à jamais gravée dans l’histoire et moment charnière du développement de la discipline dans notre pays. Plus grande organisation de MMA (arts martiaux mixtes) au monde, l’UFC posait pour la première fois son grand chapiteau en France, après un long chemin pour en arriver là.

Il y a un peu plus de deux ans, les compétitions professionnelles de MMA étaient encore interdites à l’intérieur de nos frontières. Son plus gros représentant a aujourd’hui électrifié comme rarement l’AccorArena de Bercy, qui s’offre au passage un record historique d’argent généré pour la billetterie (3,4 millions de dollars). C’était un tel tourbillon… Où commencer? Par le seigneur Gane, bien sûr. Sept mois après sa défaite contre Francis Ngannou pour le titre incontesté des lourds, la tête d’affiche du premier UFC Paris jouait gros devant son public et contre le puissant Tai Tuivasa.

Après plus d’un round bien dans ses habitudes, à prendre la mesure de la machine à KO australienne et à dominer sur sa qualité de déplacements et de striking (combat debout), "Bon Gamin" a été touché par la foudre du poing de Tuivasa au deuxième, envoyé au tapis via knockdown pour la première fois de sa carrière. Il était à deux doigts de la chute. Mais là, c’est comme si on avait réveillé la bête. Gane a refusé de s’incliner devant cette foule qui le portait depuis son entrée.

Beaucoup se questionnaient sur ses capacités à aller à la guerre et à faire face à l’adversité, lui le surdoué de ce sport – et on ne va pas trop loin – qui a tout écrasé ou presque en à peine quatre ans dans la discipline. Gane a plus que répondu à l’appel. Il est parti au combat, guerrier, volontaire, déterminé, dans un instant de grâce aux rebondissements multiples. Un combat extraordinaire, déjà dans la légende de la catégorie au même titre que la seule deuxième reprise. Le Français a pris des coups. Il en a surtout donné. L'attachant "Bam Bam "Tuivasa a longtemps encaissé du très lourd, des poings comme des pieds, sans plier.

Mais il a fini par céder au troisième round. Dans un instant de grâce qui a fait éructer Bercy, chaudron incandescent. Le tout avec une fracture à une côte subie trois semaines avec le combat. Au micro, le guerrier français réclamait une nouvelle chance pour le titre, devant le champion Ngannou bien placé au bord de la cage mais toujours en bisbille contractuelle avec l’UFC. Il demandait à Bercy de féliciter Tuivasa, "un super combattant", pour sa performance valeureuse et sa faculté à ne pas lâcher, souhait tout de suite exaucé dans un geste qui fait aussi du bien dans un sport longtemps décrié en France.

Ciryl Gane lors de son combat contre Tai Tuivasa à l'UFC Paris en septembre 2022
Ciryl Gane lors de son combat contre Tai Tuivasa à l'UFC Paris en septembre 2022 © Icon Sport

Il exprimait surtout tout ce que le MMA français a ressenti: "Merci, merci, merci, merci!" Si Gane a su sortir la performance la plus incroyable et animale de sa carrière, qui le fait rentrer dans une nouvelle dimension sportive, il le doit aussi à eux. Ces tribunes pleines qui ont fait vibrer les cœurs et les chœurs. Il y a eu une vibrante Marseillaise, des chants "Qui ne saute pas n’est pas français?" avec tout le public qui bondit, chaque frappe d’un des deux combattants faisait chavirer toute l’enceinte. Gane et Tuivasa n’ont pas pu s’empêcher de partager des sourires en plein combat tant le plaisir d’évoluer dans cette ambiance était réel, palpable. Un public en outre très éduqué au MMA, qui réagissait sur des subtilités techniques qui auraient échappé aux profanes, et qui n'était pas seulement venu voir la star Gane.

On aurait dit un stade de foot, et un bruyant, et c’était fabuleux. Quand on avait entendu le "It’s tiiiiiiiiiiime" du célèbre Bruce Buffer repris par toute la foule juste avant le combat, plus fort que dans bien d’autres endroits visités par l’UFC, on savait qu’on allait vivre un moment spécial. Mais alors là… Le summum d’une soirée au plus que parfait. La Fan Experience devant Bercy juste avant l’événement était déjà bien rempli. Les tribunes l’ont vite été aussi, signe d’un engouement pour un moment historique parti pour durer six bonnes heures au moins. Il y avait un bon feeling dans l’air.

Les cinq représentants français ont ensuite fait le show et tous signé des victoires. L’ancien militaire Benoît Saint-Denis a entamé les hostilités, à jamais le premier, en terminant le Brésilien Gabriel Miranda d'un KO retentissant après une prestation très généreuse et bien à son image qui a enflammé le public. Farès Ziam a suivi en s’offrant à la décision l’Autrichien Michal Figlak, opposition pas simple sur le papier, et en démontrant de gros progrès sur beaucoup de plans par rapport à ses dernières prestations à l’UFC.

Dans la carte principale, William Gomis a fêté ses débuts dans l’organisation avec une victoire à la décision sur le Néerlandais Jarno Errens, où la foule a encore joué un rôle immense: pris dans un triangle (forme d'étranglement) près de la fin du combat, bien pris même, le "Jaguar" a trouvé dans les hourras des fans français la force de s’en extirper. "Avec ce public derrière moi, plutôt mourir que d'abandonner", lançait-il devant un public qui donnait encore et toujours de la voix. Nassourdine Imavov, douzième du classement des moyens, est peut-être celui qui a le moins tiré d’énergie positive des circonstances.

Dominateur sur les deux premiers rounds face à Joaquin Buckley, le "Sniper" a payé sa trop grande générosité dans l’effort, due surtout à l’envie de faire mal à l’Américain (qui avait mal parlé de lui sur lers réseaux sociaux avant ce combat) mais sans doute aussi à celle de faire plaisir à son public. Il a manqué de souffle dans la troisième reprise, bien ébranlé sur la fin par son adversaire. Mais la victoire, sur décision, était assurée. Et puis il y a eu Ciryl Gane… "Bon Gamin" n’a pas seulement l’étoffe d’un champion. Il en est un grand, immense. Avec du talent et des tripes. Un cœur gros comme ça.

Il restera l’homme au centre de la plus belle et plus importante soirée de l’histoire du MMA français. Le soir où un sport si longtemps banni chez nous a fait vibrer Bercy comme jamais et pris une autre dimension populaire. Les souvenirs resteront. Dana White, patron de l’organisation, absent pour voir son fils débuter sa carrière universitaire en football américain, a vite félicité Gane et l’événement. L’UFC va revenir en France, vite, c’est désormais une certitude. A Paris et sans doute ailleurs.

https://twitter.com/LexaB Alexandre Herbinet Journaliste RMC Sport