Vendée Globe : et sinon, on fait quoi sur le bateau quand tout va bien ?

- - AFP
Cinq minutes de temps libre sur un bateau ? Soyons clairs, pour ceux qui visent la gagne, malgré a minima plus de deux mois et demie de course, ça n’arrive pas souvent. « On ne les a jamais, lance ainsi Michel Desjoyeaux, seul homme à avoir accroché deux fois son nom au palmarès (2001-2009). Mais il faut accepter de les prendre de temps en temps. Il y a des moments où il faut s’extraire de ce qu’il y a à faire. » Sur un bateau d’un peu plus de 18 mètres pour 5,5 mètres de large, voguant dans les 40e rugissants, on oublie le footing et les visites au musée…
A lire aussi >> Bertrand de Broc contraint à l'abandon, le premier de la course
Internet ? A huit dollars la minute…
« On peut aller sur internet et regarder la TV par internet mais c’est huit dollars la minute. C’est assez vite dissuasif, explique Michel Desjoyeaux. En plus, ce n’est pas la fibre optique. C’est une ligne numérique avec encore de petites vitesses de transfert. Il vaut mieux connaitre les liens directs des sites que l’on va voir. Surfer sur internet, ce n’est pas simple. Il vaut mieux avoir des bouquins. »
L’océan en musique
« Le truc le plus courant, c’est d’écouter de la musique. Ils sont quasiment tous équipés des casques anti-bruit. Il y a une qualité d’écoute de la musique qui est géniale, tout en pouvant percevoir ce qui se passe au niveau du bateau. J’avais une copine qui s’occupait de ma musique avant le départ par exemple. »
L’actu, « pour ne pas faire de gaffe »
« On peut suivre l’actualité. Soit en allant sur internet, soit parce que l’équipe à terre, notamment l’attaché de presse, peut vous faire remonter les grandes infos. Ce sont des discussions que l’on a avant la course. C’est aussi parfois nécessaire de connaitre l’actu, surtout quand il y a des sujets brûlants, pour que dans notre prise de parole on ne fasse pas des grosses gaffes. Pas par méchanceté mais par ignorance. On est dans notre monde. On a un périmètre très restreint. Il faut être capable de rebondir sur l’actualité de temps en temps. Ça peut paraitre anodin pour un marin de savoir qui est le futur président des Etats-Unis, mais c’est une information importante pour le monde dans lequel on évolue. On le voit cette année plus particulièrement. Donc oui, bien sûr qu’il faut rester au contact. »
« Allo la Terre ? »
« Il n’y a pas de règle de base sur les contacts que l’on peut avoir avec la terre. La seule règle, c’est le bateau qui appelle. Le marin peut être en train de dormir, de manœuvrer. Il n’est pas standardiste téléphonique. Il a un bateau à faire avancer. Il doit être préservé de toute "pollution" terrestre. Il peut appeler l’équipe technique. La famille, les potes, mais ça c’est plutôt sur la remontée de l’Atlantique. Il y a beaucoup moins de concurrence. On commence à en avoir marre d’être en mer. Ça peut arriver. Là, on est content de passer une heure ou deux avec des potes pour se détendre. J’ai déjà appelé un copain, il faisait ses courses au supermarché. Il avait pris des produits congelés. Quand il est passé à la caisse, la glace avait fondu. Il a dû passer deux heures dans les allées du supermarché ! »
Introspection
« On peut ne rien faire et rêvasser un peu. Mais assez rapidement, on est rattrapé par le bateau qui bouge autour de nous et qui continue de naviguer vite. Un compétiteur dans les cinq, dix premiers n’aura pas forcément la même attitude que quelqu’un dans le peloton qui va pouvoir plus se détendre, plus profiter de la mer et de la vie seul. C’est aussi une forme de retraite. On est seul. Des fois, on a besoin de ça, de se regarder dans la glace, pour se rendre compte de ce que l’on vit. »
A lire aussi >> le bateau du leader, Alex Thomson, endommagé
A lire aussi >> Virtual Regatta: Michel Desjoyeaux explique comment utiliser les polaires