
Zaccharie Risacher et Alexandre Sarr avant la draft NBA, le 25/06/2024 - AFP
Risacher ou Sarr, qui est le plus fort? Tout savoir sur le profil des deux Français attendus tout en haut de la draft NBA
Ce n’était peut-être qu’une mise en bouche. L’édition 2023, avec la draft de Victor Wembanyama en première position, était tout bonnement exceptionnelle pour le basket français. Mais l’appétit venant en mangeant, l’édition 2024 pourrait bien nous offrir un véritable festin.
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Le souvenir de ce 22 juin 2023 et de l’entrée fracassante de Victor Wembanyama en NBA reste impérissable. Mais un an plus tard, la France du basket pourrait vivre une nouvelle soirée d’ivresse avec l’avènement attendu de Zaccharie Risacher (ailier, 19 ans, 2,07m) et Alexandre Sarr (ailier fort-pivot, 19 ans, 2,16m).
Depuis plusieurs mois, les deux jeunes tricolores ne cessent de s’échanger la première place dans les mock draft, les classements prévisionnels établis par les médias américains. Une performance qu’ils doivent à un potentiel hors-norme, malgré des profils bien différents.
Leurs parcours: références au haut niveau vs exposition médiatique
Zaccharie Risacher
Sur le chemin de la plus grande ligue de basket au monde, les deux hommes ont pris des trajectoires éloignées. Fils de Stéphane Risacher, médaillé d’argent aux Jeux olympiques de Sydney en 2000 avec l’équipe de France de basket, Zaccharie Risacher (19 ans) a intégré le centre de formation de l’ASVEL en 2020 après un parcours dans des clubs amateurs de la région lyonnaise.

Lors de la saison 2021-2022, il effectue ses premiers pas avec l’équipe professionnelle de l’ASVEL. En avril 2023, Tony Parker, le président du club rhodanien, assure qu’il veut faire de lui l’une des pièces essentielles de l’effectif pour la saison 2023-2024. Mais l’ailier est frustré par son faible temps de jeu (moins de 13 minutes par match en moyenne en 2022-2023) et décide de rejoindre Bourg-en-Bresse, comme il nous le confiait en juillet dernier, juste après avoir décidé d’opérer ce virage.
Le projet de la JL Bourg est celui qui me correspondait le mieux
"Plus de responsabilités, un effectif dans lequel je vais pouvoir m’épanouir… La frustration m’a poussé à prendre cette nouvelle option", détaillait-il. Et le pari de Bourg-en-Bresse s’est avéré payant. Sous les ordres de Frédéric Fauthoux, Risacher passe un véritable palier, aussi bien en saison régulière de Betclic Elite (10,1 points, 3,8 rebonds en 22 minutes) qu’en playoffs (15,1 points, 7,4 rebonds en 28,3 minutes).
Face à Nanterre, en quart de finale des playoffs, il signe même 28 unités, son record de points en carrière. En février, il connaît sa première sélection avec l’équipe de France A en étant appelé pour affronter la Croatie dans le cadre des qualifications à l’Euro 2025. Touché à la lèvre lors d’un choc avec un joueur croate, il ne peut pas pleinement s’exprimer (seulement quatre minutes) et loupe le deuxième match des Bleus sur protocole commotion.

Sacré meilleur jeune du championnat et sélectionné au All-Star Game de Betclic Elite à la mi-saison, il a également brillé sur la scène européenne. Risacher a été un acteur important dans le parcours de Bourg-en-Bresse jusqu’en finale d’Eurocoupe. Avec 11,3 points de moyenne en 23 matchs, dont quatre pointes à 20 unités ou plus, il a été élu meilleur jeune de la compétition, petite soeur de l’Euroligue.
Alexandre Sarr
Centre de formation, Betclic Elite, Coupe d’Europe… Le parcours de Risacher est fidèle à ce que l’on a l’habitude de voir pour un jeune Français à fort potentiel. Alexandre Sarr, à l’inverse, a choisi de sortir des sentiers battus. Né à Bordeaux, le jeune intérieur, frère d’Olivier Sarr, actuel joueur du Thunder d'Oklahoma City en NBA, fait ses armes en Gironde puis à Toulouse avant de donner un premier virage à sa très jeune carrière en 2019. Alors qu’il est tout juste âgé de 14 ans, Alexandre Sarr rejoint le centre de formation du Real Madrid, l’une des plus grosses écuries d’Europe.
Après avoir évolué dans les équipes jeunes du club Merengue, il quitte la capitale espagnole en 2021, à l’âge de 16 ans, pour rejoindre le programme "Overtime Elite". Cette ligue, basée à Atlanta et réservée aux jeunes joueurs (16-20 ans), a été mise en place quelques années plus tôt pour concurrencer la NCAA (le championnat universitaire américain), qui ne payait à l'époque pas ses joueurs en raison de leur statut amateur. Sarr est alors le tout premier Français à rejoindre Overtime Elite, où le niveau est… hétérogène.
C’était une adversité assez moyenne
"Il n’y avait pas beaucoup de joueurs exceptionnels. Il y en avait, comme les frères Thompson (Amen et Ausar, sélectionnés en 4e et 5e position à la draft 2023, NDLR), qui sortaient du lot, mais c’est tout", indique Emmanuel Le Nevé, du média Envergure, spécialisé le scouting et la draft.

En 2023, après deux ans dans cette ligue un peu spéciale, Sarr décide de rejoindre les Wildcats de Perth, dans le championnat australien (NBL) pour sa dernière saison avant de se présenter à la draft. Il suit ainsi l’exemple des Français Ousmane Dieng et Rayan Rupert, tous les deux draftés en NBA après leur passage en NBL, ou encore de LaMelo Ball, sélectionné en 3e position de la draft 2020 par les Charlotte Hornets.
Pour sa première expérience dans un championnat professionnel, Sarr passe un cap. "Je l’ai découvert sur le championnat du monde U17 en 2022. Je découvre alors un très bon joueur", retrace Emmanuel Le Nevé. "Je le revois en 2023, un an plus tard, sur le championnat du monde U19. Et je vois un joueur qui n’a pas progressé. Donc je me pose des questions. Je l’ai revu en septembre lors d’un match d’exhibition contre l’équipe de G-League Ignite (une sélection de jeunes joueurs américains à fort potentiel, NDLR) et il était métamorphosé." Une impression confirmée par un spécialiste du scouting.
On avait l’impression qu’il avait autant progressé en trois mois qu’en un an en Overtime Elite
À Perth, Sarr compile 9,7 points et 4,4 rebonds de moyenne en 24 matchs de saison régulière. En playoffs, où son équipe est éliminée en demi-finale, son rendement chute légèrement (7,7 points, 3,3 rebonds). Malgré un niveau inférieur à la Betclic Elite, il a toutefois pu se montrer dans un championnat scruté de près par la NBA.
"Le championnat australien, c’est en-dessous de la Betclite Elite. Ça doit être entre de la Nationale 1 et de la Pro B en termes de niveau. Ce n’est pas exceptionnel mais c’est beaucoup regardé par les franchises NBA", détaille Emmanuel Le Nevé. "Le fait qu’il soit regardé et connu, ça change la donne. C’est pourquoi beaucoup de Français y sont allés. Il faisait partie d’un programme 'Next Star', qui fait que les jeunes joueurs sont entre guillemets obligés de jouer, ils ont des minutes quoi qu’il arrive." Et Alexandre Sarr a su en profiter pour faire monter sa cote.

Leurs plus grosses qualités: défense et shoot vs défense et physique
Zaccharie Risacher
Ailier très longiligne (2,07m), Zaccharie Risacher coche toutes les cases du poste 3 moderne. Athlétiquement, le jeune international tricolore, régulièrement comparé à Harrison Barnes (Sacramento Kings) ou Michael Porter Jr (Denver Nuggets) a tout ce qu’il faut en magasin. Et il sait déjà bien l’utiliser, notamment en défense. Avec Bourg-en-Bresse, il était régulièrement envoyé en mission défensive sur le meilleur extérieur adverse. Grâce à sa taille, ses longs bras et sa mobilité, il est capable de défendre pratiquement tous les postes, du meneur (par séquence) jusqu’à l’ailier fort adverse.
Deuxième gros point fort de l’ancien Villeurbannais: son adresse au shoot, notamment à trois points. Derrière l’arc, il tournait à 45% en Coupe d’Europe et presque 38% en playoffs de Betclic Elite. Une compétence fondamentale dans la NBA actuelle, où le shoot à trois points est roi. Concrètement, il a toutes les qualités pour être ce fameux "3&D" (tireur à trois points et bon défenseur) tant recherché par la NBA.
En attaque, Risacher était cette saison attendu sur un autre point: sa capacité à prendre plus de responsabilités. L'été dernier, Frédéric Fauthoux, coach de Bourg-en-Bresse, estimait au micro de RMC Sport que Risacher devait être "plus tueur, plus agressif, plus entreprenant", "ne pas toujours être un bon garçon". Ses autres coachs interrogés le décrivaient comme un garçon "introverti, timide, que ce soit dans ses prises de parole ou dans ses prises de responsabilités sur un terrain". Dans l’Ain, et comme décrit un peu plus tôt, il a su s'affirmer et prendre la lumière. Au point d'impressionner un certain Victor Wembanyama, qui résumait son impression dans un entretien à ESPN en janvier dernier.
Je ne connais probablement personne de plus talentueux que lui dans cette cuvée de draft
Alexandre Sarr
Zaccharie Risacher partage ses belles aptitudes défensives avec Alexandre Sarr. Dans un registre différent, l’intérieur, dont le profil se rapproche de Jaren Jackson Jr (Memphis Grizzlies) ou Mitchell Robinson (New York Knick), est capable de régner en maître dans les raquettes. Du haut de ses 2,16m, il est un formidable protecteur de cercle, comme en témoignent ses 12 contres lors des deux rencontres d’exhibition face à la G-League Ignite (6 contre lors de chaque match).
"Son ticket d’entrée en NBA est sa capacité à être présent au contre et à protéger le cercle", assure Emmanuel Le Nevé. "Et après, il y a évidemment le potentiel à côté."
Ses premiers tests physiques lors du traditionnel draft combine ont également donné une idée du potentiel athlétique du garçon. Entre une détente sèche mesurée à 94 cm - une marque très élevée pour un intérieur - et une vitesse de déplacement plus qu’intéressante pour un joueur de sa taille, le Français a marqué beaucoup de points. Dans cette cuvée de draft, il est incontestablement l’un des joueurs les plus impressionnants sur le plan physique.
S’il semble déjà admis qu’Alexandre Sarr pourra rapidement peser en défense, son potentiel offensif attise beaucoup de curiosités (et d’excitation). Il doit encore travailler dans ce domaine pour atteindre la régularité qu’exige la NBA, mais l’ancien d’Overtime Elite est déjà capable d’être une menace offensive grâce à son shoot extérieur, que ce soit à deux points ou à trois points. En attaque, il a également montré un sens de la passe plus qu’intéressant.
Leurs plus gros axes de progression: jeu sans espace vs efficacité près du panier
Zaccharie Risacher
Excellent shooteur extérieur, Zaccharie Risacher est redoutable d'efficacité lorsqu’il est servi sur un plateau, en mouvement ou en sortie d’écran. Mais il ne parvient pas encore suffisamment à se créer son propre shoot. Il est aussi moins à l’aise lorsqu’il s’agit d’attaquer le panier, surtout quand peu d’espaces s’offrent à lui.
"Quand il y a de l'espace, il arrive à aller au cercle. Mais dès que ça se resserre, il a tendance à donner la balle un peu trop vite à mon goût", juge Emmanuel Le Nevé.
Quand on est annoncé dans le top 3 d’une draft, se créer son tir est quelque chose d’obligatoire
"On n’attend pas d’un top 3 de draft qu’il tourne à 10 points de moyenne. On l’a vu de plus en plus en fin de saison, mais globalement ce n'est pas quelqu’un qui arrive à attaquer le panier de façon régulière. Le spacing NBA va peut-être l’aider là-dedans. L'attaque du panier, c’est vraiment un point qu’il doit ajouter, sinon c’est un joueur qui va vite devenir facilement lisible, prévisible. Si les défenseurs savent qu’il n’attaquera jamais le cercle, c’est plus facile de défendre sur son shoot", estime Emmanuel Le Nevé.
Alexandre Sarr
De l’avis général des recruteurs, Alexandre Sarr doit également progresser dans sa capacité à attaquer le panier. Malgré sa taille, l’intérieur peine à scorer dans la raquette. "Son principal axe de progression, c’est sa capacité à terminer près du panier. C’est un vrai poste 4 mais il joue beaucoup sur l'extérieur. Dans dans sa finition proche du panier, il n’a pas toujours été assez bon", assure Emmanuel Le Nevé.
Son handle (maniement du ballon) est également jugé trop faible. Ses difficultés à partir en dribbles pour éliminer son vis-à-vis expliquent d’ailleurs en partie son manque d’efficacité dans l’attaque du panier.
VERDICT
Le plus "NBA ready"? Alexandre Sarr (de justesse)
Le portrait des deux joueurs est donc dressé. Au vu de leur qualité, Zaccharie Risacher et Alexandre Sarr n’auront pas de mal à s’adapter à la NBA et leur place tout en haut des projections de la draft en atteste. "Dans tous les cas, ils vont jouer dans des équipes qui ont besoin de talents et qui ne vont pas avoir de grandes ambitions sportives, mis à part peut-être les Atlanta Hawks (qui ont le premier choix de la draft, NDLR) si Trae Young reste. Donc oui, ils auront un impact quasiment immédiat du fait qu’ils jouent dans des équipes dont on n’attend pas grand-chose", détaille Emmanuel Le Nevé.
Toute la question est désormais de savoir qui s’adaptera le plus rapidement à la NBA. "Le plus 'NBA ready', que ce soit physiquement ou dans le jeu, ça serait plus Alexandre Sarr", avance Emmanuel Le Nevé. "Zaccharie Risacher est prêt dans le jeu, clairement. Mais pas forcément physiquement. Je pense qu’il doit encore un petit peu se muscler et gagner en dureté avant d’avoir un réel impact dans son équipe".
Je dirai donc plus Sarr, mais ça se joue vraiment à des détails
Le plafond le plus élevé? Alexandre Sarr
Si cette cuvée 2024 semble plus faible que la précédente, où un talent générationnel cristallisait toutes les attentes, de nombreux joueurs annoncés au premier tour devraient réaliser une carrière plus que sérieuse en NBA. Sur le papier, aucun joueur de cette draft n’a vraiment le profil d’une superstar. Mais plusieurs prospects sont voués à devenir des troisièmes ou des quatrièmes options, de très bons role players - voire très probablement une poignée de futurs All Star.
Avec les deux Français en chefs de file de cette promo 2024? "Pour ce qui est de savoir qui a le plafond le plus élevé entre les deux Français, je penche plus du côté d’Alexandre Sarr", tranche Emmanuel Le Nevé, d'ailleurs en phase avec la plupart des gros médias américains.
S'il arrive à progresser en attaque, on sera sur quelque chose qui est assez fou
"Il a tellement de choses à montrer encore, notamment ses aptitudes au tir, où je pense qu’il va s'améliorer", poursuit le spécialiste du scouting. "On a aussi des aptitudes défensives qui sont assez incroyables. On parle d’un mec de 2,16m qui est capable de défendre sur pick and roll et de switcher sur des arrières, sur des porteurs de balle. Il a aussi quelque chose à la passe. Pour moi, il a beaucoup plus de choses à développer encore." Le pari est pris.

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