Mondiaux de cyclisme: pourquoi Vingegaard ne va pas affronter Pogacar

La dernière fois que Jonas Vingegaard a représenté le Danemark en course, c'était en 2018. A l'époque, le futur double vainqueur du Tour de France avait participé aux Mondiaux U23 à Innsbruck. Il avait alors 21 ans, ne courait pas encore pour Visma-Lease a Bike et avait terminé 63e, à dix minutes du vainqueur Marc Hirschi ou de Tadej Pogacar, 7e.
Depuis, même quand le parcours lui convenait, le garçon a zappé tous les rendez-vous. Mondiaux, championnats d'Europe, Jeux olympiques, il n'a plus fait une seule apparition en sept ans. Il devait enfin réparer cette anomalie au Rwanda, fin septembre, en disputant pour la première fois les Mondiaux Elites. Mais à deux jours du départ de la Vuelta, dont il est favori, il a annoncé ce jeudi faire l'impasse et se rabattre sur les championnats d'Europe. Une décision motivée par des raisons de calendrier, mais peut-être pas seulement.
L'enchaînement Vuelta-Mondiaux offre peu de repos
C'est l'argument avancé par Jonas Vingegaard lui-même : il n'y a que deux semaines entre la fin de la Vuelta, le 14 septembre, et la course en ligne des Mondiaux, le 28. "Cela ne convient pas à mon emploi du temps, a-t-il expliqué. Pour aller aux Mondiaux, vous devez être frais, et je ne sais pas comment je vais ressortir de cette Vuelta." Contrairement à Tadej Pogacar et Remco Evenepoel notamment, le Danois enchaîne le Tour de France et le Tour d'Espagne, soit beaucoup de jours de course entre juillet et septembre.
Mais il n'a pas découvert cette semaine les dates des championnats du monde. La surprise touche d'ailleurs tout le monde puisqu'il y a encore une semaine, le sélectionneur danois, Michael Morkov, assurait que la présence de Jonas Vingegaard à Kigali "était prévue depuis le début" et que le coureur avait "les yeux rivés sur les grands championnats".
En même temps qu'il a annoncé sa non-participation aux Mondiaux, le Danois a d'ailleurs assuré qu'il serait bien présent aux championnats d'Europe, en Ardèche, qui se disputent seulement une semaine plus tard. De quoi s'offrir une période de récupération légèrement rallongée, certes, mais qui ne devrait pas permettre de changer drastiquement son état de forme.
Vingegaard évite les courses d'un jour...
La défection de Jonas Vingegaard pour les championnats du monde s'inscrit dans un contexte plus large : le Danois ne participe que très rarement à des courses d'un jour. Là où Tadej Pogacar ou Remco Evenepoel mangent à tous les ratteliers, aussi bien les Grands Tours que les grandes classiques, le Slovène allant même jusqu'à s'aventurer sur les pavés du Tour des Flandres ou de Paris-Roubaix, Vingegaard reste sagement dans son domaine.
En 2025, il n'a jusqu'ici couru que des épreuves par étapes : le Tour d'Algarve, Paris-Nice, le Critérium du Dauphiné et le Tour de France, avant la Vuelta. Sur l'ensemble des trois dernières saisons, il a pris le départ d'une seule course d'un jour : la Clasica San Sebastian 2024, sur laquelle il a finalement abandonné.
Même sur les classiques ardennaises ou le Tour de Lombardie, des épreuves qui conviennent à ses qualités de grimpeur, il n'a jamais été acteur. S'il a participé trois fois à Liège-Bastogne-Liège, à la Flèche Wallonne et au Tour de Lombardie, il y a collectionné quelques abandons, trois au total, mais jamais le moindre top 10. Et surtout, il n'a plus mis les pieds sur une de ces courses depuis 2022.
...et peut-être aussi Pogacar
Au-delà de ses résultats jamais flamboyants sur les classiques, Jonas Vingegaard a surtout arrêté de s'y aventurer après la saison 2022, quand la domination de Remco Evenepoel (depuis champion du monde et olympique, et double vainqueur de Liège-Bastogne-Liège) et surtout Tadej Pogacar y est devenue insolente.
En dehors de quelques revers face à Mathieu van der Poel, le Slovène ne laisse en effet pas grand-chose à la concurrence : un titre mondial, trois victoires sur Liège-Bastogne-Liège, quatre (de suite) au Tour de Lombardie, deux au Tour des Flandres et sur la Flèche Wallonne, trois sur les Strade Bianche, une à l'Amstel Gold Race, le tout a de quoi décourager un Jonas Vingegaard qui se sait un cran en-dessous sur ce type de terrain.
C'est peut-être, au moins en partie, ce qui l'a convaincu de faire une croix sur le rendez-vous de Kigali, alors qu'il s'y serait présenté comme l'adversaire n°1 de Tadej Pogacar. Mais il n'évitera pas le quadrupe vainqueur du Tour bien longtemps : la semaine suivante, à moins d'un forfait inattendu du Slovène, les deux hommes se retrouveront bien aux championnats d'Europe, dont le parcours est dessiné pour les grimpeurs. Finalement, le duel aura bien lieu quelque part.