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Une première pour Vingegaard aux championnats d'Europe: vers un changement de cap dans sa carrière?

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Jonas Vingegaard portera ce dimanche sur la course en ligne des Championnats d’Europe le maillot danois pour la première fois de sa carrière sur une compétition internationale élite. Le double vainqueur du Tour de France n’affectionnait pas jusque là les courses d’un jour, où il ne compte qu’une victoire. Sa présence en Ardèche est-elle le signe d’un changement de cap dans sa carrière?

L’Ardèche est "the place to be" ce week-end pour les stars du peloton qui aiment les parcours escarpés. Il suffit de voir Jonas Vingegaard sur la liste de départ pour s’en rendre compte: le Danois n’avait participé qu’à une seule course d’un jour ces trois dernières saisons, avant ce week-end. Il n’était pas au Rwanda la semaine dernière pour les Championnats du monde, contrairement à Tadej Pogacar qui a décroché un deuxième maillot arc-en-ciel, et Remco Evenepoel.

Dans la banlieue de Valence (Drôme), ce samedi soir, Jonas Vingegaard s’est assis face à une quinzaine de journalistes - du jamais vu pour l’équipe danoise aux Championnats d’Europe selon le sélectionneur - pour une vingtaine de minutes. "C’est une bonne façon de me tester une nouvelle fois sur les courses d’un jour, sinon ma saison serait terminée", répond d’entrée le récent vainqueur du Tour d’Espagne. Un Vingegaard souriant et visiblement détendu, avant de porter pour la première fois le maillot de sa sélection, aux côtés de Mattias Skjelmose notamment, mais sans Mads Pedersen malade.

Une seule victoire sur une course d'un jour

Ses concurrents ont évoqué vendredi, avec un brin d’ironie, la présence de Jonas Vingegaard en Ardèche. "Cela fait longtemps qu’on n’a pas été concurrents sur une course d’un jour mais s’il est là, c’est qu’il va être vraiment bien", glisse Tadej Pogacar, qui n’a en effet plus affronté le Danois sur cet exercice depuis le Tour de Lombardie 2022 remporté par le Slovène, et terminé par Vingegaard à la 16ème place. Remco Evenepoel de son côté ajoute: "Il n'a jamais vraiment bien performé sur les courses d'un jour... On ne sait jamais comment il va être, après une période sans compétition. Donc je suis curieux moi aussi!", affirme le Belge. "J’ai couru deux Grands Tours, c’était une longue saison. Bien sûr, je ne serais pas là si je pensais être le premier gars lâché, mais je ne suis pas sûr à 100% non plus de ma forme", juge de son côté Jonas Vingegaard. S’attend-t-il à un match à trois dans le final? "Je pense que ça dépend plus de moi que d'eux", tranche le Danois.

Vingegaard ne compte qu’une seule victoire sur une course d’un jour, sur la Drôme Classic en 2022, à proximité de l’arrivée de ce dimanche sur l’autre rive du Rhône." Ce jour-là, je me souviens, j’avais d’abord été lâché puis je suis revenu. Je ne me sentais pas super bien, et puis, sur l'une des longues montées, j’ai suivi une des premières attaques pour pouvoir dire que j’avais fait quelque chose. J'ai fini dans une échappée à deux avec (Juan) Ayuso et je l'ai battu à la fin", raconte le double vainqueur du Tour de France.

"Un parcours qui me convient"

Le parcours de ces Euros en Ardèche est moins dur que celui des Mondiaux de Kigali au Rwanda la semaine dernière en termes de dénivelés et de distance mais le triple passage à Saint-Romain-de-Lerps (7 km à 7,2%) et les six montées du Val d'Enfer (1,6 km à 9,7%) restent un plat copieux. "Je crois que c'est un parcours qui me convient", estime Jonas Vingegaard, qui a plusieurs fois souligné pendant son point presse qu’il y avait aussi dans l’équipe danoise Mattias Skjelmose, bien plus performant sur les courses d’un jour.

"Trois tours de circuit pour pur grimpeur avec en tout près d’une heure de montée, l’équivalent d’un grand col, et après six derniers tours pour puncheur", estime Remco Evenepoel. "Les caractéristiques de cette course sont celles d’une vraie Classique, c’est ça qui va faire une belle course. Le Val d’Enfer, c’est un peu comme la côte de la Redoute (sur Liège-Bastogne-Liège), mais l’état de la route n’y est pas aussi bon", juge le Belge. Tadej Pogacar prédit de son côté que "ce sera plus explosif qu’aux Mondiaux, où il n’y avait rien d’explosif même si le parcours était fait pour. Ici, les montées sont étroites, pas très longues, c’est très punchy donc on devrait voir plus de gars se battre pour la victoire qu'aux Mondiaux."

"Vingegaard sait frotter, il est toujours très bien placé, il ne s'est jamais trop fait piéger dans les étapes du Tour de France. Reste la question de son état de forme mais s’il est là, ce n’est pas pour acheter du terrain en Ardèche", remarque le consultant RMC Sport Jérôme Pineau. "Si Pogacar, dans les premières attaques, voit que Vingegaard suit, le doute va s'installer. Vingegaard n’est pas un grand collaborateur, il sera plutôt dans une course d'attente. Il va amener un peu de suspense. Même si Pogi a un meilleur punch, il peut suivre en lissant son effort, et le Val d’Enfer, c’est 1,7 kilomètre, c’est assez long!"

"J'aimerais en faire davantage mais..."

Cette apparition de Vingegaard sur les Championnats d’Europe ouvre-t-elle la porte à une orientation plus portée vers les Classiques à l’avenir de son programme de course? "J'ai toujours dit que j'aimerais revenir aux courses d’un jour, mais je n'ai jamais trouvé la recette qui fonctionne pour moi sur ce type de courses", avance le Danois. "Evidemment, si je la trouve ici, j'aimerais en faire davantage. Les Championnats internationaux avec l’équipe danoise ont l’avantage d’être en fin de saison et se prêtent plus à mon calendrier, puisque l'objectif principal reste le Tour de France. Et quand tu fais la meilleure préparation possible, il n’y a pas d'espace pour les courses d'un jour."

De son côté, notre consultant Jérôme Pineau estime que "c’est quelque chose qu’il doit explorer. Evidemment pas sur Paris-Roubaix ou le Tour des Flandres, mais pourquoi pas l’Amstel, la Flèche Wallonne, Liège-Bastogne-Liège ou le Lombardie. Des courses qui lui correspondent, de type puncheur-grimpeur. Et pour nous spectateurs, ce serait cool parce que s’il y prend goût, il se préparera pour cela, et ça donnera plus de suspense". En attendant, Vingegaard rêve de revêtir ce dimanche soir le maillot étoilé pour la saison prochaine, qui le distinguera au même titre que l’Arc-en-ciel porté par son grand rival Tadej Pogacar.

Kévin Morand, à Guilherand-Granges