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Tour de France: la Super Planche des Belles Filles, le rendez-vous tant attendu par Pinot

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Discret depuis le début du Tour de France, Thibaut Pinot se sait très attendu ce vendredi pour la septième étape qui se terminera sur ses routes d'entraînement, du côté de la Super Planche des Belles Filles. L'ambiance s'annonce grandiose.

La nuit dernière, Thibaut Pinot a sans doute eu un peu de mal à trouver le sommeil. Comment ne pas penser à ce qui attend le peloton du Tour de France ce vendredi ? Au lendemain de la prise de pouvoir de Tadej Pogacar à Longwy, les 172 coureurs encore en lice ont rendez-vous pour une étape longue de 176,3 kilomètres au départ de Tomblaine, près de Nancy. Au menu : deux cols de troisième catégorie (col de Grosse Pierre, col des Croix). Avant une conclusion du côté de la Super Planche des Belles Filles pour la première arrivée au sommet de cette 109e édition. Concrètement, il faudra se farcir une montée sèche de sept kilomètres, à 8,7% de pente moyenne. Une ascension classée en première catégorie qui devrait en dire plus sur l’état de forme des principaux candidats à un podium à Paris.

"S'il y a une étape à gagner, c'est celle-là"

En haut de la Planche, personne ne pourra masquer ses éventuelles faiblesses. Les meilleurs, eux, auront tout intérêt à profiter de cette journée pour creuser des écarts. Bien sûr, les projecteurs seront braqués sur Pogacar et sur ceux qui espèrent le titiller dans les deux semaines à venir : le Danois Jonas Vingegaard, les Britanniques Adam Yates et Geraint Thomas, le Russe Aleksandr Vlasov, le Colombien Nairo Quintana, l'Espagnol Enric Mas, sans oublier les Français Romain Bardet et David Gaudu, respectivement 9e et 10e du général ce matin. Mais le public vosgien n’aura d’yeux que pour un autre champion tricolore : Thibaut Pinot. Son village de Melisey est niché à moins de vingt kilomètres de la Planche des Belles Filles, devenue un classique du Tour en seulement dix ans, et il a l'habitude de s'entraîner sur ces routes. Le grimpeur de la Groupama-FDJ ne s’en cache d'ailleurs pas, il a coché depuis longtemps cette date du 8 juillet, qui, le hasard faisant bien les choses, tombe le jour de la Saint Thibaut.

"S'il y a une étape à gagner, ce serait celle-là, disait-il déjà il y a deux mois. J'ai gagné dans des lieux comme le Tourmalet (en 2019) ou l'Alpe d'Huez (en 2015) qui sont mythiques mais cette victoire serait encore plus forte. Je connais la montée par cœur mais ce seront les jambes qui parleront ce jour-là. Le seul avantage c'est que je peux être plus encouragé que les autres." Ce sera le cas, évidemment. L’ambiance devrait être folle pour pousser le héros local, revenu sur le Tour après un an d’absence et un sacré paquet de galères. A 32 ans, il n’est plus vu comme le potentiel successeur de Bernard Hinault, dernier Français vainqueur de la Grande Boucle en 1985, mais sa cote de popularité n’a pas bougé. Ses difficultés rencontrées ces dernières années ont même renforcé l’amour que lui portent ses plus fidèles supporters.

Des pourcentages terribles

"Pour moi ce sera un plus d’être supporté dans cette montée, mais je ne me considère pas encore à 100% donc on verra comment l’étape se passe. Je sais que je suis beaucoup encouragé, j’en profite, c’est toujours bon signe", confiait-il jeudi midi, avant de concéder trois minutes sur Pogacar lors de la sixième étape. Pointé à la 40e place du général, à plus de cinq minutes du crack slovène, il ne devrait pas être marqué à la culotte par les cadors du peloton. Mais il sera forcément surveillé. "Si à chaque fois qu’un était régional de l’étape était sûr de gagner, ça se saurait, a ainsi prévenu son directeur sportif Marc Madiot. On peut essayer, mais il faut être un peu réaliste. Imaginez qu’une échappée parte avec Pinot dedans. Vous ne pensez tout de même pas que les coureurs avec lui vont l’amener jusqu’au pied de la Planche, lui donner une poignée de mains et lui dire d’aller gagner ? Je ne pense pas que ça va se passer comme ça."

Alors, coup de bluff ou annonce d’une douche froide à venir pour le fan-club de Pinot ? Lui ne veut surtout pas donner de faux espoirs. Il sait que cette étape sera un gros test et que la victoire ne pourra revenir qu’à un coureur en grande forme. "C’est la première montée du Tour, elle se fera à fond, a-t-il commenté. Ce n’est pas une montée très longue mais elle est irrégulière avec des passages à plus de 20%. Elle fait très mal. Si on n’est pas bien, on est obligé de lâcher. Il se passe toujours quelque chose sur cette montée. Celui qui gagne là-haut n’est souvent pas très loin du podium sur les Champs-Elysées." C'est la sixième fois que le Tour vient à La Planche des Belles Filles, à l'altitude de 1.140 mètres, au revêtement moitié goudron moitié terre et qui tient son nom d'une légende selon laquelle durant la guerre de Trente Ans des jeunes filles de la vallée se seraient suicidées pour échapper à des mercenaires suédois. Après la victoire initiale de Chris Froome en 2012, Vincenzo Nibali (2014) et Fabio Aru (2017) ont inscrit leurs noms au palmarès, suivis ensuite par Dylan Teuns (2019) et Pogacar (2020). Mais ce n'est que la deuxième fois que la version "super" figure au programme.

Reste à savoir aussi si Pinot sera autorisé à jouer sa carte personnelle. D'un côté, il semble difficile d'imaginer Madiot lui demander de rester au chaud en tête de peloton alors qu'il sera chez lui, en Franche-Comté, avec des supporters déchaînés, et l'envie d'aller tester ses jambes sur un terrain qu'il maîtrise à la perfection. De l'autre côté, son rôle a été clairement défini au départ du Tour : il doit être le protecteur de Gaudu, qui a pour objectif de finir dans le top 3 sur les Champs. Après six étapes, le Breton n'a pas commis d'erreur et le plan est jusqu'à présent suivi à la lettre. Le temps d'une étape, il serait tout de même dommage de ne pas voir Pinot laisser le rôle d'ange-gardien pour endosser celui de franc-tireur.

Rodolphe Ryo avec KM et JR