Tour de France: le règne de Bernal ne fait peut-être que commencer

Seulement 22 ans et déjà la plus prestigieuse course du monde à son palmarès. Egan Bernal a remporté le Tour de France, ce dimanche sur les Champs-Elysées. Il devient le plus jeune lauréat (22 ans et 196 jours) depuis le Luxembourgeois François Faber en 1909 (22 ans et 187 jours). Phénomène de précocité, le jeune grimpeur colombien peut envisager l’avenir sereinement et faire craindre à ses rivaux une domination sans partage.
Redoutable dès que la route s’élève, capable de rouler très fort pour créer des bordures et solide descendeur, Bernal sait tout faire. Même s’il ne l’a pas montré sur ce Tour, en échouant à la 22e place lors du chrono de Pau, il est également à l’aise habituellement en contre-la-montre. Inquiétant pour le suspense?
Attention aux précédents Ullrich et Quintana
"Il a démontré qu’il était incontestablement l’homme le plus fort lors des étapes alpestres. Il a assumé sa victoire avec beaucoup de facilité. Il est calme et serein. Il a peut-être d’autres belles victoires à aller chercher sur le Tour", estime notre consultant Cyrille Guimard, ex-sélectionneur de l’équipe de France sur route.
Même constat pour Jérôme Coppel, ancien champion de France du contre-la-montre, également membre de la Dream Team RMC Sport. "On savait qu’il avait du talent et que cela allait arriver un jour ou l’autre. Sur toutes les étapes de montagne, Bernal a montré à la pédale qu’il était le plus fort. C’est une victoire méritée. Je pense également que l’on est parti pour le voir en jaune sur le Tour de France pendant très longtemps. Il est très jeune et il a les qualités pour lui", appuie-t-il, tout en rappelant que de telles prédictions avaient aussi été établies pour Jan Ullrich il y a quelques années. A ses débuts, l’Allemand avait lui aussi été présenté comme un coureur capable de décrocher pléthore de Tours de France.
Confronté à la concurrence de Lance Armstrong, il n’en a finalement remporté qu’un seul, en 1997. Plus récemment, Nairo Quintana a fait l’objet des mêmes pronostics. Résultat, le Colombien attend toujours d’inscrire son nom au palmarès du Tour. Comme Ullrich et Quintana avant lui, Bernal sera confronté à une féroce concurrence dans les années à venir.
Encore des concurrents
Il ne s’agirait pas d’enterrer trop vite Christopher Froome, Geraint Thomas, Tom Dumoulin, Primoz Roglic, Richard Carapaz, Thibaut Pinot, Miguel Angel Lopez, Simon Yates, Jakob Fuglsang, Mikel Landa, Steven Kruijswijk, Romain Bardet et même Julian Alaphilippe, pour ne citer qu’eux. A cette liste déjà très longue, il faut ajouter les noms de grands espoirs qui semblent avoir les armes pour empêcher Bernal d’asseoir son règne. Sans doute pas dès l’année prochaine mais dans un futur plus ou moins proche.
Le conseil de Geraint Thomas
On peut notamment penser au prodige slovène Tadej Pogacar, vainqueur cette année du Tour de l’Algarve, devant des clients comme Wout Poels et Enric Mas, et du Tour de Californie. Le tout à seulement 20 ans. La Belgique tient aussi une sacrée pépite avec Remco Evenepoel, 19 ans. Même s’il a encore tout à prouver en haute montagne, celui qui est déjà considéré comme le successeur d’Eddy Merckx, a écœuré la concurrence chez les jeunes et sa première saison pro est très prometteuse. Citons aussi le Français David Gaudu (22 ans), le Franco-Russe Pavel Sivakov (22 ans), les Colombiens Ivan Sosa et Sergio Higuita (21 ans), le Belge Laurens De Plus (23 ans), le Britannique Tao Geoghegan Hart (24 ans), l’Irlandais Eddie Dunbar (22 ans) ou encore l’Italien Giulio Ciccone (24 ans).
Au-delà de la concurrence, il faudra aussi que Bernal parvienne à assumer son nouveau statut. Geraint Thomas, vainqueur sortant et dauphin de son équipier cette année, lui a adressé un premier conseil à l’arrivée de la 20e et avant-dernière étape: "Il a de belles années devant lui, il a un très bel avenir, il faut juste qu'il garde le même entourage."
"C'est un athlète incroyable, il a 22 ans, c'est un honneur de faire partie de son sacre. Je n'y croyais pas. Bien sûr, il a le talent, on l'a vu dès le début, il est né pour aller vite en montagne et il a la meilleure équipe", a souligné le Gallois. Apparu aussi calme que sûr de sa force durant tout ce Tour, Bernal a affirmé ses ambitions samedi: "C'est comme une drogue, quelque part. Une fois que tu gagnes, tu penses au Tour suivant, en tant que cycliste tu vas toujours en vouloir un peu plus, ne jamais te satisfaire." Un bon message envoyé à tous ceux qui entendent déjà le faire chuter de son trône sur le Tour 2020.