Tour de France: punaises, clous, carabine… Quand les spectateurs malveillants perturbent la course

Il y avait quelqu'un d'encore plus énervé que Wout Van Aert, lors de l'arrivée de la deuxième étape à Saint-Sébastien, où le champion belge avait été coiffé par l'attaque au kilomètre de Victor Lafay. Sur les réseaux sociaux, le coureur de TotalEnergies Lilian Calmejane a posté une vidéo où il montre l’état de sa roue après avoir roulé sur des clous jetés sur le bord de la route. L’occasion pour le Français de poster un coup de gueule: "Merci pour ce genre de connerie humaine. Je pense ne pas avoir été le seul, victime de crevaison dans le final… Sachez qu’on peut tomber et se faire très mal avec vos conneries, bande d’abrutis."
Une belle pub pour ses pneus tubeless (sans chambre à air), bien gonflés malgré 5 punaises enfoncées dans la gomme, mais tous n'ont pas eu sa chance et l'épidémie de crevaisons a eu un impact sur la course. Dimanche, sept des huit coureurs de l'équipe Cofidis avaient crevé lors de la deuxième étape. Seul le futur vainqueur Victor Lafay avait été épargné sur les routes basques.
Le problème s'est repété lundi, alors que le peloton quittait l'Espagne pour arriver en France. "Pourtant l’organisation du Tour de France nettoie la route environ quinze ou trente minutes avant le passage des coureurs, a noté Cédric Vasseur, le patron de l'équipe Cofidis. Cela veut dire qu’il y a des petits malins qui jettent des silex, des clous ou des punaises juste après. On espère que cela fait partie du passé et que l’on aura des étapes qui vont se dérouler normalement."
En 2012, les clous provoquent un abandon
Ce n'est pas la première fois que les coureurs du Tour de France vont face à ce genre de malveillance. En 2012 le coureur croate Robert Kiserlovski a dû abandonner durant la 14e étape après avoir chuté au Mur de Péguere. La faute à une crevaison u provoquée par le jet de clous sur la route.
Lors de cette même édition, l’Australien Cadel Evans, tenant du titre, avait connu une mésaventure similaire en à ce même endroit, mais avait pu être dépanné. Des clous de les clous de tapissier avaient été jetés juste avant le sommet du mur de Péguère. "Les coureurs prennent suffisamment de risques, notamment dans les descentes. Je trouve que c'est du hooliganisme, c'est plus que criminel", s'était énervé John Lelangue, le manager de Cadel Evans chez BMC. Une enquête avait été ouverte suite à ces incidents, sans résultat connu.
Des pneus crevés, toujours au mur de Péguère
Cette fois, la malveillance ne visait pas les vélos mais les voitures. Lors de l'édition 2017, une personne avait été interpellée pour avoir crevé les pneus de nombreuses voitures à Massat (Ariège), village au pied du mur de Péguère. Au moins une vingtaine de véhicules avaient été touchés.
Freire et Dean touché par balle
La plus grande frayeur de ces dernières éditions a probablement eu lieu lors du Tour de France 2009. Entre Vittel et Colmar, Oscar Freire et Julian Dean ont été victimes de coups de carabine. Dean avait été touché à un doigt de la main gauche, tandis que l’Espagnol a pris une balle dans la jambe.
Si les dégâts n’ont pas eu de graves conséquences sur les deux coureurs, Freire était revenu en détail sur ce qui s’était passé: "Je montais dans le col du Bannstein et j'ai entendu des détonations. J'ai ressenti une douleur à la jambe et j'ai immédiatement fait le rapprochement. D'autant que Dean avait lui le doigt en sang. Cela dit, cela ne me faisait pas vraiment mal (…) Quand j'ai dit au médecin de l'équipe qu'il allait devoir m'extraire un plomb, il ne voulait pas me croire! Je n'aurais jamais pensé que cela puisse arriver."
Le triple champion du monde (1999, 2001, 2004) avait vu son équipe de l’époque Rabobank déposer une plainte. Freire avait aussi alerté sur l’importance d’agir contre ces actions: "Si on ne fait rien, quelqu'un d'autre aura peut-être lui aussi une mauvaise idée. Un fou, c'est un fou, même si on connaît les risques avec la foule."
Les menaces de l’ETA
Comme rappelé par Marca, des coureurs ont également subi des pressions bien avant les années 2000. En 1974, Gonzalo Aja qui terminera 5e a reçu des menaces de mort de la part de l’ETA (organisation basque indépendantiste). Pendant longtemps, ce groupe a menacé le bon déroulé du Tour de France.
En 1992, plusieurs incidents ont lieu avant le départ depuis Saint-Sébastien. Plusieurs véhicules sont incendiés. Par le passé, des objets explosifs ont même été retrouvés sur le parcours. Sans grand dégât.
Coups de poing et douches d'urine
Sale temps pour l'équipe Sky lors du Tour de France 2015. Ultra-dominatrice, l'équipe de Chris Froome n'a pas vraiment le soutien du public sur le bord de la route qui l'accuse souvent de dopage. C'est d'abord l'Australien Richie Porte qui s'est plaint de coups. "J'ai pas bien vu qui c'était car j'étais concentré pour rattraper Nairo Quintana mais j'ai pris de vrais coup de poings, a-t-il expliqué à la presse anglophone. On en arrive à un point où tous les journalistes qui écrivent n'importe quoi devrait se sentir responsables pour notre sécurité." Le lendemain, l'Australien s'est même arrêté pour se payer un spectateur. "Le meilleur moment de ma journée: quand je me suis arrêté pour parler à un mec qui me traité de dopé à la fin de l'étape. Il s'est fait dessus."
Ce n'était pas la première fois qu'un coureur se faisait frapper: l'épisode le plus connu concerne une légende du vélo, Eddy Merckx lors du Tour 75: Un spectateur avait asséné un coup de poing au foie au champion belge Eddy Merckx, alors porteur du maillot jaune, dans la montée du Puy-de-Dôme.
Pour Chris Froome, la mésaventure a un autre goût: "Un spectateur m'a jeté un verre d'urine dans la figure" a-t-il lâché à ITV. Là aussi, c'est un classique: En 2013, Mark Cavendish avait été arrosé d'urine durant le contre-la-montre du Mont-Saint-Michel, au lendemain d'un sprint compliqué."