Equipe de France: le bilan sans concession de Daniel Riolo

L’analyse commode consisterait à conclure à un sale mois de juin. La faute à "juin" donc. La lassitude, la fatigue mentale, l’usure, la longue saison. Il paraît que "juin" c’est presque une tradition: Les Bleus n’avancent plus. Après le premier match, j’étais prêt à accepter cette courte explication. Après le deuxième, allez pourquoi pas. On se met à compter les matches pour bien se convaincre que c’est à cause de la fatigue. On fait comme si les autres n’existent pas. Les adversaires sont toujours moins fatigués, moins usés. Pourquoi? Ah ça je ne sais pas. C’est comme ça. Tradition française. Pour excuser nos prestations européennes, ça tient d’explication chaque année. C’est une rengaine de mars, alors imaginons en juin!
Le problème ici, c’est la répétition des mauvais matches. Quatre! Quatre matchs sans victoires, deux défaites, un projet de jeu invisible. Dès l’Euro, j’avais noté que l’idée de jeu que les Bleus allaient développer tenait à un schéma : 4-3-3, 4-4-2, 3-4-3… Et une fois qu’on dessine les joueurs sur le papier après ça bouge comment? L’intention générale, c’est quoi? On attaque? On défend? On joue haut, on presse? On attend, on contre? Les joueurs "pistons" débordent et centrent mais où et pour qui?
L'illusion de la Ligue des nations
Les matches d’octobre 2021 ont vendu une illusion. Après la bouillie de l’Euro, Benzema allait mieux s’intégrer et tout allait être transformé. Les Bleus se sont fait promener par l’Espagne, mais comme ils ont gagné, alors ils ont eu raison selon la réflexion Deschamps. Le but sublime de Benzema a servi de paquet cadeau à l’illusion.
Ensuite, c’est le discours qui a changé. Des promesses sur la fin de l’ennui. Et toujours Benzema. Tellement fort avec le Real que forcément… Et Mbappé alors ? Comme si l’addition de talents comme tactique ou projet de jeu était une idée sérieuse.
Et derrière le duo magique, où sont les talents justement ? D’abord, il faudra un jour que les deux apprennent à jouer ensemble. Pour l’instant leur entente ne me crève pas les yeux. Mais même quand ça viendra et qu’ils seront comme larrons en foire, avec qui feront-ils briller l’Equipe de France ? Il faut donc que Pogba redevienne un joueur de foot de très haut niveau et il faut trouver un remplaçant à Griezmann. C’était, jusque-là, les deux seuls joueurs créatifs des Bleus. On a en effet constaté sur ces quatre matches un énorme déficit technique et créatif. Commencer face à la Croatie avec trois 6, c’est effrayant, mais avec qui sinon ? La France a pris l’habitude de gagner en percussion, en vitesse, au physique et avec des petites touches de talents.
Rabiot, le mystère du foot moderne
Sur ces quatre matches, Tchouaméni est apparu comme notre meneur de jeu potentiel. C’est assurément un bon joueur destiné aux belles choses, mais jamais de la vie ça n’est un meneur de jeu. A Monaco, il a Golovin devant lui. Ne mélangeons pas tout.
C’est le seul néanmoins dont on se dit qu’il peut vite intégrer les Bleus en titulaire. Les autres sont tendres. Et puis, il y a l’inutile Rabiot. Le mystère du foot moderne. Allegri le fait jouer, Deschamps aussi. Avec humilité, on doit admettre qu’ils savent le foot mieux que nous non ? Je vais juste me permettre de dire que devant la Juve ou les Bleus, je m’ennuie terriblement. Et si un technicien veut bien m’expliquer à quoi sert Adrien Rabiot sur un terrain, je suis disponible.
Un bilan noir à cinq mois du Mondial n’est pas forcément rédhibitoire. Pas encourageant non plus. Le foot de sélection et de tournoi est devenu très surprenant. Les valeurs sures n’existent plus. "On ne gagnera pas deux fois de la même façon" a souvent déclaré Deschamps comme pour promettre un renouveau. Je me demande toutefois s’il sait faire autrement. Si sa culture profonde n’était pas avant tout le jeu minimaliste. Et si reprendre la truelle, la pelle et un paquet de ciment n’était pas une forme de destin ? Le fameux "Deschamps style". Un bon mur, quatre défenseurs centraux derrière bien alignés et on cherche Mbappé et Benzema. Après tout, si on ne sait pas faire autrement, pourquoi essayer ? Un jour, les Bleus sortiront peut-être de l’ennui. Avec un nouveau sélectionneur. Mais on n’en est pas là.