Guingamp fait lancer une enquête sur Caen-Angers: comprendre l’affaire en six points

Le contexte sportif de la lutte pour le maintien
Actuellement 12e du championnat, Angers a quasiment acquis son maintien. C’est loin d’être le cas pour Caen, lanterne rouge avec 23 points, et Guingamp, 19e avec seulement un point d’avance. Dijon est actuellement barragiste avec 25 points tandis qu’Amiens (17e) et Monaco (16e) semblent avoir fait le break. C’est dans ce contexte de tension et de gros enjeux qu’émerge l’affaire autour de la rencontre entre Caen et Angers, remportée par les Angevins samedi (1-0).
Il reste six matchs à jouer pour chacune des équipes concernées. Avec à chaque fois de gros adversaires : Angers se déplacera vendredi à Lyon et affrontera également Bordeaux (35e journée), le PSG (J36), Lille (J37) puis Saint-Etienne (J38) ; Caen se frottera également à l’OL (J37) mais aussi Nice dès samedi ; Guingamp recevra l’OM samedi et se rendra à Nice dans la foulée. Mais sur les tablettes, un match retient l’attention : celui qui verra s’affronter Guingamp et Caen en Bretagne, le 4 mai prochain.
La chronologie de l’affaire
Le contexte est donc posé, passons aux faits. "Le Directeur Général de la LFP a été saisi par téléphone le samedi 13 avril 2019 après-midi par le président de l’EA Guingamp, qui a ensuite confirmé ses propos le jour même par mail", précise ce mardi la Ligue de football professionnel dans un communiqué. Bertrand Desplat a en effet alerté la LFP de rumeurs circulant entre joueurs de son club autour de la rencontre entre Caen et Angers, prévue ce même samedi à 20h.
Une suspicion de manque d’intégrité qui a poussé, selon L’Equipe, la Ligue à appliquer une procédure prévue et donc à prévenir les deux clubs en question (Caen et Angers), ainsi que le délégué de la rencontre Alain Le Galloudec. Une sorte d’appel à la vigilance.
Le match a finalement abouti sur une victoire d’Angers, déjà pratiquement assuré du maintien (41 points), un résultat qui tranche donc avec l’idée d’un éventuel arrangement qui aurait été profitable au club normand, dans une très mauvaise posture et en concurrence directe avec Guingamp. C’est finalement ce mardi que l’affaire émerge, racontée par L'Equipe, et pousse les principaux acteurs à réagir.
Les explications du président de Guingamp
C’est son relais auprès de la Ligue qui a tout déclenché. Mais Bertrand Desplat, joint par RMC Sport ce mardi, affirme n'avoir jamais souhaité la médiatisation de cette histoire et réfute toute tentative de déstabilisation, quelques heures avant un match décisif pour un concurrent direct dans la course au maintien.
"Je ne suis pas un aventurier de la communication, j'ai fait ce que j'estimais être mon devoir, assure le président de Guingamp. Je suis à cheval sur l'équité. Je n'accuse personne, j'ai simplement fait remonter à l'autorité de tutelle des choses troublantes qui m'ont été dites. Je n'ai pas à vous dire, ou à quiconque, qui m'a rapporté ces faits. Mais je me tiens à la disposition de l'enquête pour les évoquer, si la Ligue estime que c'est légitime. J'ai n'ai fait que mon devoir de président." Rappelant une simple "démarche de précaution", Bertrand Desplat conclut simplement: "C'est à la fin de la foire qu'on compte les bouses".
Dans L’Equipe, Bertrand Desplat dit avoir été alerté par des propos d’un de ses joueurs. "Il m'a dit des choses qui m'ont paru étranges donc j'ai alerté la Ligue, l'autorité de tutelle dont un des rôles et de s'assurer de l'équité sportive, et en particulier en cette fin de saison, détaille-t-il. J'ai été respectueux des institutions et je pense que tous les présidents devraient le faire. Je n'ai dénoncé personne, je n'ai accusé personne. […] Je n'ai voulu mettre la pression sur personne. Je suis juste un lanceur d'alerte."
La colère de Caen et Angers
Joint par RMC Sport, Gilles Sergent, président normand, dénonce les agissements de son homologue breton. "Si ça n’est pas de la déstabilisation, ça a toute la couleur d’une tentative de déstabilisation, a-t-il déclaré. Il n’y a visiblement aucun élément factuel. La Ligue attendait, samedi après-midi, un écrit du président de Guingamp qui n’est visiblement pas arrivé. Dès le samedi après-midi, on a été surpris, choqué de ce qui pouvait apparaître comme des manœuvres. Une enquête a démarré, c’est parfait. On va écouter, on va participer à l’enquête, j’imagine." Et dénonce "des manipulations ou des débats en coulisses qui puissent influencer le cours des choses".
A Angers, qui n’est plus véritablement concerné par la course au maintien, la colère est toute aussi grande. "Je me suis permis d’appeler (samedi, ndlr) à la fois la Ligue et Bertrand Desplat à qui j’ai dit ce que je pensais, a confié le président angevin Saïd Chabane à RMC Sport. Je lui ai dit qu’on jouerait le match de la première à la dernière seconde." Il se dit "écoeuré".
"Je peux comprendre sa position (de Desplat) où il se bat tous les week-ends pour décrocher la position de barragiste mais on ne peut pas devenir mytho, ce n’est pas possible, fulmine le dirigeant angevin. (…) Ce n’est pas bien de dévoiler des soupçons avant d’avoir une preuve. J’en veux un peu à la Ligue qui a mis le dossier en instruction d’une manière officielle alors que le mot d’ordre qui a été donné était 'soyons discrets et ne parlons pas aux journalistes', qui auraient fait éclater les choses samedi soir. Et puis, lundi matin, c’était à l’ordre du jour et publiquement. J’en veux à tout le monde."
Ce qu’en dit la Ligue
Même s’il ne tenait pas au départ à commenter cette affaire, Didier Quillot a accepté d'éclaircir quelques points pour RMC Sport. C'est effectivement le seul appel du président de Guingamp qui a lancé la procédure d'alerte. A la question "Une seule personne suffit donc à lancer une telle procédure?", la réponse du directeur général exécutif de la LFP est claire: "Oui car les propos tenus étaient sans ambiguïté". Il n'a pas souhaité davantage entrer dans les détails de ces propos mais a ajouté: "L'appel vient directement d'un président de Ligue 1".
Quelle suite à cette affaire?
La procédure ouverte par la LFP ne signifie pas que les soupçons sont fondés ou qu’il y a véritablement une affaire. Elle est juste automatique. "Dans le cadre de cette procédure, la commission de discipline a été automatiquement saisie et a ouvert une instruction depuis hier", précise ce mardi un communiqué de l'instance. C’est aussi dans le cadre de cette procédure que Caen et Angers ont été prévenus avant la rencontre samedi.
La commission de discipline de la Ligue se réunit mercredi, comme c’est toujours le cas. Celle-ci a été saisie "en application de l'article 3, considérant que le délégué de la rencontre a été avisé d'éléments susceptibles de douter de l'intégrité de la rencontre Caen-Angers", précise L’Equipe ce mardi. C’est lors de cette commission que l’ouverture d’une enquête sera décidée ou non. En parallèle, un instructeur a été nommé et va enquêter auprès des trois clubs concernés. Même si pour l’heure, aucun élément ne vient avérer l’existence de soupçons fondés. La suite sportive aura lieu le 4 mai, lors du match… entre Caen et Guingamp, pour la 35e journée de Ligue 1.