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PSG: "Pour lui, la presse est un obstacle, un parasite", pourquoi Luis Enrique est en conflit avec les médias

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Luis Enrique, l'entraîneur du PSG, s’est montré particulièrement agacé face à un journaliste dimanche après la victoire à Rennes (3-1). Comme joueur puis sur le banc, il a toujours assumé un mépris pour la presse.

Luis Enrique n’était pas d’humeur à identifier "les détails à améliorer" après la victoire du PSG à Rennes (3-1), dimanche. Invité sur le plateau de Free Ligue 1 à l’issue de la rencontre, l’entraîneur parisien s’est emporté contre le journaliste Alexandre Ruiz. "Toi, tu ne vois que les choses négatives, a-t-il lancé en espagnol. Tu es corrosif. Toutes les interviews! C’est le plus négatif de l’histoire du football mondial. Un jour, on a gagné 4-1 et il m’a dit qu’on méritait de perdre."

"Une bascule" en 1996

Depuis sa signature à Paris l’été dernier, l’Espagnol était resté plutôt cordial à défaut de trop s’épancher en conférence de presse. Dimanche, il a amorcé un virage plus cinglant en quittant le plateau après une dernière remarque lui proposant de s’expliquer pour faire comprendre ses choix au jeune public. "Les jeunes comprennent tout, je crois que c’est toi qui ne comprends rien. C’est ce que je pense des questions que tu me poses", a-t-il lancé.

Luis Enrique a fait resurgir un pan de personnalité volcanique bien connu en Espagne, surtout quand il concerne la presse. "C’est l’un des footballeurs et entraîneurs qui a eu le plus de problèmes avec la presse en Espagne, c’est une relation conflictuelle quasiment permanente", situe Fred Hermel, spécialiste du football espagnol sur RMC. "Il est connu pour être tout le temps en conflit avec la presse. Il l’était déjà comme joueur et c’est encore plus devenu une manière de fonctionner en tant qu’entraîneur puisqu’il doit faire plus de conférences de presse."

Il avait fait remarquer cette particularité lors de la dernière Coupe du monde comme sélectionneur de l’Espagne. Peu disert face aux médias, il se montrait plus prolixe sur son live Twitch qu’il tenait chaque soir. "Dans la même journée, tu voyais son attitude dédaigneuse avec les journalistes en conférence de presse et quelques heures plus tard, ce n’était plus la même personne sur Twitch", illustre Fred Hermel. "C’est pour dire aux journalistes: ‘Vous ne servez à rien, je n’ai pas besoin de vous pour parler aux supporters.’"

Fred Hermel date cette aversion pour les médias à un évènement marquant de sa carrière de joueur: son départ du Barça en mauvais termes… avant sa signature chez le rival honni, le Real Madrid, en 1996. "Il s’est fait démonter dans la presse madrilène, c’est vraiment une bascule. Il en a toujours voulu aux médias de Madrid. Ça vient de là."

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Il ne s’est pas vraiment adouci en changeant de costume pour prendre celui d’entraîneur d’abord au Barça B (2008-2011), puis sur les bancs de l’AS Rome (2011-2012), du Celta Vigo (2013-2014), du Barça (2014-2017) ou de la sélection espagnole (2018-2022). Cela plaisait plutôt aux supporters catalans, un peu moins à ceux espagnols. C’est pourtant avec la Roja, selon Fred Hermel, qu’il a le plus vertement exprimé son opposition aux médias. "Il a commencé à se lâcher encore plus parce qu’il avait le soutien inconditionnel de Luis Rubiales (alors président de la Fédération espagnole, NDLR), lance-t-il. Dans ses déclarations sur l’histoire du baiser forcé, il n’a pas condamné Rubiales, il s’est montré très vague sur l’histoire."

Les réponses cinglantes et piques sont courantes. Ce fut par exemple le cas pour un journaliste de Radio Marca, victime d’un souci technique et osant formuler une question déjà posée quelques instants plus tôt avant un match contre la Suède: "Dommage pour toi", lui avait-il lancé.

"Il méprise les journalistes, ajoute Fred Hermel. C’est ce qui s’est passé hier avec Alexandre Ruiz."

"Quand tu ne gagnes plus, ça ne passe pas"

Lors de cette sortie chez le détenteur des droits de diffusion mobiles de la Ligue 1, il s'est d’ailleurs montré plus complice avec Rio Mavuba et Ludovic Giuly, deux anciens joueurs désormais consultants. Cela fait partie de sa posture: il est, selon lui, impossible d’entendre l’avis de quelqu’un qui n’a pas joué au haut niveau. "Je ne vous lis jamais parce que je connais mieux le foot que la majorité d’entre vous et que j’ai des informations que vous n’avez pas. Il n'y a aucune opinion que je lise qui puisse m’intéresser", avait-il lancé en 2021 après avoir été la cible de critiques. "Pour lui, la presse est un obstacle, un parasite", ajoute Fred Hermel.

L’entraîneur du PSG n’est pas le premier à afficher ouvertement sa défiance devant les micros. "C'est comme Mourinho qui était insupportable avec la presse même s’il était capable de complicité avec la presse quand il était de bonne humeur, situe Fred Hermel. Ce n’est pas le cas de Luis Enrique, c’était compliqué qu’il y ait de la complicité, il y a toujours du mépris."

Cela ne lui a, pour le moment, jamais porté préjudice. En sélection, il avait le plein soutien de son président. Au Barça, il avait bien été fragilisé pour avoir mis Lionel Messi sur un banc lors d’un match. Mais "à partir du moment où Messi n’avait pas voulu qu’on le vire, il était un peu protégé par ça", explique Fred Hermel. "Et puis, il a gagné la Ligue des champions (en 2015), conclut-il. Ce genre de comportement, ça passe, quand tu gagnes. Quand tu ne gagnes plus, ça ne passe pas."

Nicolas Couet Journaliste RMC Sport