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Pédagogie, responsabilités, retour historique... comment Unai Emery est devenu "un Dieu absolu" à Aston Villa

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La réussite d’Aston Villa ces deux dernières saisons est aussi et surtout celle de l’entraîneur: Unai Emery. L’ancien coach du PSG, qui avait vécu une saison et demi morose à Arsenal (entre 2018 et 2019), a replacé Aston Villa au premier plan. A Birmingham, sa côte de popularité est énorme.

Depuis son arrivée à Birmingham, en octobre 2022, Aston Villa brûle les étapes. Unai Emery a fait passer le club anglais de la lutte pour le maintien (15e) à une qualification en Ligue des champions pour la première fois depuis 41 ans, bonifiée par ce quart de finale contre le PSG (aller, mercredi au Parc des Princes). La saison dernière, les Villans avaient aussi atteint la demi-finale de Conference League (élimination contre l’Olympiacos). Actuellement 7e de Premier League à deux points du Top 4, Aston Villa est aussi qualifié pour les demi-finales de la FA Cup (le 26 avril contre Crystal Palace). Un changement de dimension, donc, en deux ans et demi à peine, pour ce club historique d’Angleterre, vainqueur de la Coupe des clubs champions en 1982.

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Pédagogie

Lors de son arrivée, Unai Emery succède sur le banc à Steven Gerrard. L’ancien milieu de terrain star n’a pas laissé un bon souvenir dans les Midlands de l’Ouest de l’Angleterre, incapable d’imposer son style de jeu et de satisfaire un public qui en a marre de lutter pour ne pas descendre. "Le costume était trop grand pour Gerrard", lâche Colin Abbott. Cet amoureux de Villa, historien officieux du club, a écrit neuf livres sur les Villans. "Emery, lui, ne gagne pas que dans son pays mais aussi dans d’autres, à Paris par exemple. Il sait gérer les Coupes d’Europe et on le voit ici. Il a ramené de la croyance. Si vous avez un manager qui sait où il veut aller pour le club, comment jouer, quelle tactique, les joueurs croient qu’ils peuvent le faire. Je ne peux pas imaginer un autre manager capable de transformer le club comme il l’a fait. Il l’a fait si vite. C’est fort."

Les supporters et les suiveurs ont alors été surpris par ces changements. Dans le jeu, déjà, mais aussi dans le caractère. "Unai Emery a dû nous éduquer nous aussi, les suiveurs", se rappelle Mat Kendrick, chroniqueur pour le podcast Claret&Blue. "Les premiers mois, il expliquait son style à la presse et donc aux supporters. Martinez (le gardien) avait plus le ballon, comme un défenseur central. C’était dur pour nous de comprendre car certains avaient déjà tenté et échoué. Il a fallu intégrer qu’on allait concéder des buts, que parfois il y aurait des erreurs mais que s’ils jouaient comme ça, ils trouveraient des espaces et marqueraient. Le message c’était: 'Ayez confiance'." Une pédagogie marquante à Birmingham, où on a conscience d’avoir mis la main sur un entraîneur de grand talent. "Un League coach", lâche-t-on sur place, sous-entendu: un de ceux qui peut mener vers le titre. "Emery s’adapte bien à tous les adversaires. On a un bon jeu de position et il a bien éduqué les fans", souligne Stephen Morley, représentant du groupe de fans Aston Villa Supporters’ Trust. "Ils étaient très impatients avant et Emery a impliqué les supporters pour qu’ils comprennent le style de jeu."

Emery a toutes les clefs

Le technicien, vainqueur de quatre Ligues Europa mais aussi de cinq trophées avec le PSG, sait où il va. Son 4-2-3-1 est quasi immuable, avec un double pivot au milieu et des ailiers tranchants. Emery n’hésite pas à exploiter le jeu de transition, à demander de la patience quand le match le requiert. Seulement 12e attaque et 13e défense en championnat, sa formation n’est que 11e au classement du nombre de passes. Mais elle provoque quand elle a des espaces, avec le quatrième taux de dribbles réussis et le plus grand nombre de fautes subies.

Vu le bilan positif du côté des résultats, le crédit revient donc à ceux qui l’ont choisi: les propriétaires d’Aston Villa depuis 2018, les milliardaires égyptien Nassef Sawiris et américain Wes Edens. Mais surtout, lorsqu’ils ont eu le "oui" de l’Espagnol, le réflexe a été de lui donner les clefs. Toutes les clefs. Emery est venu en Angleterre avec tout un staff de compatriotes et a appelé Monchi, directeur sportif renommé côtoyé à Séville, pour qu’il le rejoigne à l’été 2023. "Je pense que la direction a vite réalisé qu’on avait un grand coach", dit aujourd’hui Mat Kendrick. "Ils se sont demandé: il a besoin de quoi? Donnons-lui. Je ne pense pas qu’il aurait eu le même niveau de contrôle ailleurs. Donc il a créé son équipe, le département du football avec Monchi. C’est le roi du Royaume: ‘On a confiance, fais-le’. Car c’étaient des hauts et des bas depuis 15 ans." L’équipe est aujourd’hui régulière même si la saison actuelle a été moins linéaire avec la grande coupe d’Europe et l’entraîneur a signé une prolongation jusqu’en 2029. Emery compte aussi avec un effectif pléthorique et de qualité. (Martinez, Torres, Tielemans, Digne, Watkins, Rashford, Asensio, Maatsen) car le club n’hésite pas à dépenser pour lui fournir les joueurs qu’il souhaite, avec Monchi.

"Dieu"

Avoir l’ancien coach du PSG rassure tout le monde à Brimingham, où son sens du détail et sa préparation minutieuse de chaque rencontre son loués. "Il a toujours un plan", entend-on souvent à son sujet. Et autour de Villa Park, il n’y a pas un supporter pour émettre une réserve. "Il est brillant, on savait qu’il avait du talent et les résultats parlent. C’est un privilège de l’avoir connu ici", s’emballe Warren, alors que Simon évoque un arrivée "phénoménale": "Il est adoré par tout le monde ici, comme un héros surtout par rapport aux anciens managers." L’époque des matchs de deuxième division, il y a un peu plus de six ans, semble lointaine. De là à faire déjouer Paris, son ancien club et Luis Enrique, son bourreau de la remontada? "Je ne suis pas très confiante, ils sont très forts j’ai vu contre Liverpool ça fait peur", s’inquiète Cathy. "Mais Unai est un Dieu absolu." Alors pourquoi pas?

Valentin Jamin, à Birmingham