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Rendez-nous le suspense dans les championnats européens

La Juventus fête son 8e titre de suite

La Juventus fête son 8e titre de suite - AFP

La Juve en Italie, le PSG en France, le Barça en Espagne, et probablement le Bayern en Allemagne… Une fois encore, les grands championnats européens n’ont permis aucune surprise cette saison. Et cela ne semble pas près de changer.

Au bout d’un énoooorme suspense, c’est la Juventus qui a ouvert le bal des champions, samedi. En battant la Fiorentina (2-1), la Vieille Dame a plié la Serie A dès la 33e journée. Pour la huitième fois de suite... Ce dimanche, le PSG pourrait à son tour être couronné en Ligue 1, tandis que le Barça en Liga, et probablement le Bayern en Bundesliga, ne devraient pas tarder à suivre. En Angleterre, la bataille est rude, mais Manchester City, leader débarrassé de la Ligue des champions, est favori des bookmakers. Ces cinq clubs ne vous rappellent rien? Regardez les noms des vainqueurs des cinq grands championnats la saison dernière: ce sont les mêmes.

L’exercice 2018-2019, comme trop souvent, s’apprête à confirmer des hégémonies à l’échelle nationale. Si la domination des grosses écuries n’est pas une nouveauté, et si l’histoire du ballon rond a été marquée par les règnes, le constat est assez flagrant depuis le début des années 2010. En Italie, il faut donc remonter à 2011 pour voir un autre champion que Turin, l’AC Milan. En France, Paris s’apprête à décrocher un sixième titre en sept ans, uniquement contrarié par Monaco en 2017. En Allemagne, c’est un sept à la suite que pourrait signer le Bayern s’il ne tremble pas, tandis qu’en Espagne, le Barça va s’imposer pour la quatrième fois en cinq saisons, confirmant une avance prise sur le Real et l’Atlético.

Les écarts sont souvent effrayants, et les belles aventures, du type Leicester en 2016, sont aussi rares que miraculeuses. D’ailleurs, la Premier League est peut-être le seul championnat à encore faire vibrer le public dans la course au titre, mais celui-ci se dispute quasi-systématiquement entre les mêmes. Depuis 2004 et la fin de l’ère Arsenal, trois clubs se sont partagés 13 des 14 championnats: Chelsea (5), United (5) et City (3).

Les limites du fair-play financier

Ces dominants, outre les résultats, ont évidemment un point commun: leur puissance financière. Cette saison 2018-2019 va encore sacrer les formations les plus riches et les plus dépensières. En France, le budget du PSG (500 millions d’euros environ) est au moins deux fois plus élevé que ses "concurrents" - qui n’en sont plus, de fait - Lyon (285 millions), Monaco (215 millions), Marseille (150 millions) ou Lille (90 millions). En Serie A, la Juve surclasse très largement les formations milanaises dans ce domaine, et a encore creusé l’écart en recrutant Cristiano Ronaldo l’été dernier, tandis qu’en Espagne, le Barça (633 millions) est passé dernièrement devant le Real Madrid (567 millions) et s’est davantage fait remarquer par ses investissements, comme dans le cas de Frenkie de Jong.

En Bundesliga, le Bayern, là encore le plus riche, a lui adopté une autre stratégie: il n’est certainement pas le club le plus dépensier à l’échelle européenne, mais il s’est fait une spécialité d’acheter, mercato après mercato, les meilleurs joueurs des clubs rivaux. Affaiblissant ainsi la concurrence en même temps qu’il se consolide.

C’est ce constat, en partie, qui avait conduit l’UEFA de Michel Platini à adopter le fair-play financier en 2010. L’instance voulait "assainir" le foot continental, et limiter, un peu, la domination des monstres. La mesure aura peut-être freiné (et encore) des clubs comme le PSG ou Manchester City dans leur quête de Ligue des champions, les privant des plus grandes folies, mais son impact a été pour ainsi dire inexistant dans les championnats.

La Super Ligue européenne fermée, une solution ?

Alors, devra-t-on se contenter à l’avenir de ces saisons sans frisson, ou y a-t-il des solutions pour rendre les championnats plus serrés? L’Italie s’est un peu penchée sur la problématique, et la modification des dates du mercato, qui ferme désormais avant la reprise de la compétition, est une première réponse: les équipes les plus puissantes avaient tendance à se renforcer une fois le championnat débuté, du moins dans une proportion supérieure aux autres. Elles ne le pourront plus. Mais la contrainte reste légère…

Régulièrement, des spécialistes déterrent aussi l’idée d’un "salary cap", comme en NBA, qui homogénéiserait les masses salariales dans tous les clubs. Sauf que l’idée, si elle est intéressante, est pour ainsi dire inapplicable. Parce que le fonctionnement des clubs de foot européens, avec leurs centres de formations, est très, très différent de celui des franchises de basket américaines, qui vont puiser dans le monde universitaire, parce que les championnats répondent tous à un système de relégations-promotions, ce qui n’est pas le cas en NBA, parce que les clubs les plus puissants d’Europe sont aussi les plus influents dans les instances dirigeantes, et ne décideront jamais de leur propre affaiblissement, et parce qu’il faudrait en outre une règle commune aux différents championnats européens, une mission impossible.

Et si finalement, le projet de Super Ligue européenne tant décrié, était la clé? En regroupant tous les cadors du continent dans une énorme compétition remplaçant la Ligue des champions, et en multipliant les rencontres entre eux, les cadors en question auraient probablement tendance à aligner des équipes inférieures dans les championnats nationaux. Ces derniers seraient certes moins brillants, mais plus disputés. Et donc plus intéressants…

CC