Badminton: enchaînement de blessures, médaille européenne… la paire Palermo-Maio veut maintenant briller aux Mondiaux de Paris

Dans le sous-sol de la salle du club d’Issy-Les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), un terrain installé au centre. Musique en fond, quatre joueurs enchainent les exercices. Entrainement dirigé par Florent Riancho, coach du club. Et parmi les badistes, deux visages bien connus du milieu, Léa Palermo et Julien Maio. Anciens pensionnaires de l’INSEP, ils s’entrainent aujourd’hui dans leur club, loin de l’effervescence du centre national. Classés à la 36e place mondiale, Palermo et Maio, ce jour-là, se préparent, sans trop y penser encore aux Mondiaux de badminton qui vont se dérouler à Paris. "On espère évidemment briller. On a hâte d'y être. Je pense que ce sera particulier. Après, il faut le prendre d'un côté positif parce qu'on va avoir le public avec nous. On va sûrement avoir les familles aussi qui seront là. Donc, il va falloir réussir à gérer aussi l’enjeu", souligne Léa, 32 ans. Après deux heures d’entraînement, en détente mais avec plein de sérieux évidemment, et encore transpirants, tous les deux ont pris le temps de revenir sur les dernières années bien mouvementées.
Parce qu’aujourd’hui, Léa et Julien arborent un grand sourire, mais ils le savent, tout ce qu’ils vivent n’est que du plus. Du plus dans une carrière mouvementée. Souvent, et malheureusement, dictée par les blessures. "Il y a eu beaucoup de hauts et de bas", résume Léa Palermo. A 32 ans, la badiste, spécialiste du double mixte, a mis derrière elle de longs mois de doutes et de galère. En 2021, rupture des ligaments croisés du genou droit, puis 2023, pour son retour à la compétition, aux côtés de son partenaire dans la vie comme sur le terrain, Julien Maio, nouvel arrêt: rupture des ligaments du genou gauche cette fois. "Quand c'était très bas, pour le coup, c'était vraiment très, très bas. En termes d'émotion, en termes de projection. C’était très difficile pour moi de savoir réellement, après ce qu’il m'était arrivé, où j'allais réussir à pouvoir aller, même si j'ai toujours eu la conviction de mes capacités à revenir à un très bon niveau".
Julien, lui aussi, a vécu, par procuration, ces moments de douleurs, de doutes, de remise en question. "Je savais que je devais être là pour elle, mais il fallait aussi que je prenne soin de moi, dans le sens où, mentalement, j'étais aussi très atteint. Je suis allé voir une psy, elle m'a beaucoup aidé là-dessus. Parce qu'avant qu'elle se fasse les deux genoux, c'était moi qui étais un peu fragile. Je suis passé aussi par des blessures (épaule et genou) qui étaient un peu longues. Quand tu vis des trucs comme ça en tant que sportif et que tu reviens, tu es encore plus fort. Et je pense que c'est aussi notre grande force", relativise Julien.
"Je n’étais pas assez forte pour revenir"
Des mois de rééducation, pour la deuxième fois en même pas trois ans, des mois loin de sa passion… Léa Palermo a songé à tout arrêter. "Quand je me blesse (en janvier 2023), je le dis et je le verbalise. Je dis même à Julien, à la fois sur le terrain et même les semaines qui suivaient, que j'allais arrêter, que je n'avais pas les épaules, que je n'étais pas assez forte pour revenir une fois de plus. Parce que j'ai mis un an et trois mois pour revenir du premier genou. Et pour moi, c'était inimaginable physiquement et mentalement de revenir à nouveau, avec les mêmes délais, avec tout ce que ça comprenait en termes émotionnel, de travail, tous les enjeux que comporte une blessure aussi grave. Et en fait, petit à petit, c'est le côté passion, belle histoire aussi, mais pour moi, pas pour les autres, que j'ai souhaité revenir. C'est cool d'avoir cette sensation-là aujourd'hui et de me dire que j'ai fait le bon choix", sourit la joueuse.
Une médaille européenne
Effectivement, tout cela est maintenant du passé. Pour leur retour au plus haut niveau, tous les deux ne pouvaient rêver mieux: médaille de bronze aux championnats d’Europe en avril dernier. "C'est juste une récompense, on le prend comme ça. Et évidemment, on est super fiers parce que de le faire aussi, on l'a annoncé, on a dit qu'on voulait cette médaille. Moi, j'y ai toujours pensé, mais de le faire, c'est quand même fort. Donc là, on est très fiers de nous", avoue Léa Palermo, licenciée au club d’Issy-les-Moulineaux. Quand ils sont revenus dans leur club en février 2024, Léa et Julien ont fixé leurs objectifs avec Florent Riancho, entraîneur depuis quinze ans dans ce même club.
"La médaille aux Europes, c’était l’objectif initial qu'on s'était fixé donc contrat rempli", sourit le coach. "Je pense que les blessures de Léa, ça l'a rendue plus forte. Même Julien, donc ils sont plus dans le plaisir. C'est une paire très offensive, très forte", ajoute Riancho. Et c’est vrai, un déclic à eu lieu après tout ce qu’ils ont vécu. Julien Maio a une tout autre perception de son sport aujourd’hui. "Je vais à l'entraînement, je suis content. Il y a un truc dans ma tête qui a switché. Alors, ce n'est pas du je m'en foutisme. Mais maintenant, quand il y a des mauvais jours, j’essaye de kiffer, même si je suis moins bien sur le terrain. Avant je cassais des raquettes dès que ça n’allait pas… Des fois, quand on me dit c'est quoi l’objectif, j'ai envie de dire, que je n’ai pas de limites à me fixer, j’ai envie d'aller le plus loin. Et si on va le plus loin possible, je suis le plus heureux du monde".
Alors maintenant, le nouvel objectif se jouera à l’Adidas Arena, pour les Mondiaux de badminton. "Peut-être qu'il y aura de la pression. Ça, on verra au moment présent. Il faut garder le positif et je pense que c'est une chance d'avoir les Mondiaux à la maison. Donc, oui, il faut profiter. On va tout donner devant notre public. De toute façon, on va faire en sorte d'aller le plus loin possible", espère Julien Maio. Pour leur premier tour, Julien et Léa seront opposés à une paire thaïlandaise, 48e mondiale.
"Je reste persuadé que sur un match, ils peuvent taper les meilleures paires. Aux Mondiaux, il y a plus de niveau mais ils n’ont rien à perdre, j'ai envie de dire", veut rassurer Florent Riancho, leur entraîneur. "C'est excitant, en tout cas. C'est excitant parce qu'on a envie de gagner devant le public. On a envie que ces joueurs aillent gagner devant le public. Et en plus, c'est quasiment une fois dans sa vie des championnats du monde à Paris. Donc, autant en profiter. Voilà, le message, c'est prendre du plaisir. Ne pas se prendre la tête et tout donner sur le terrain", ajoute Riancho. Alors, il n'y a plus qu’à pour Julien Maio et Léa Palermo.