CIO: face à Trump et Poutine, Kirsty Coventry joue (très) gros

"Elle va devoir affronter des moments qui vont être difficiles". Cette petite phrase de David Lappartient, candidat battu à l’élection du CIO, plante le décor des prochains mois pour Kirsty Coventry. "Des crises, des crises internationales, elle aura besoin d’un CIO uni derrière elle pour le faire (…) Maintenant on est derrière la présidente", ajoute le Français. A la sortie du scrutin, jeudi soir, plusieurs membres du CIO se questionnaient déjà sur la stratégie diplomatique de la future présidente.
"Que va-t-elle dire à Trump lors de leur première rencontre", questionne un autre membre. Un cadre de l’instance affirme tout simplement, et de manière positive: "Vous allez être surpris!"
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"Le président Trump est un fervent partisan du sport"
Dès sa première conférence de presse, jeudi soir, la Zimbabwéenne a tenté de rassurer sur sa future relation avec le président américain. "Le président Trump est un fervent partisan du sport", explique-t-elle face aux médias. "Aucun président en exercice n’a jamais assisté au Super Bowl".
La première déclaration est bancale et surprend les médias internationaux dans la salle. Kirsty Coventry se reprend par la suite: "Concernant les États-Unis, depuis l’âge de 20 ans, je traite avec des gens occupants, disons, de hautes fonctions (…) Ce que j’ai appris c’est que la communication sera la clé (…) J’ai la conviction que le président Trump voudra que ces Jeux de LA2028 soient un succès."
La nouvelle présidente prévient déjà que le CIO ne "dérogera pas" à ses valeurs. Et ce dernier point est important dans les discussions avec Donald Trump, ça pourrait coincer.
Coventry devra convaincre Trump
La protégée de Thomas Bach aura la tâche difficile. Il faut dire que la relation entre Donald Trump et le président sortant n’était pas optimale. Coventry va donc devoir convaincre, surtout que Donald Trump et ses services essayent d’imposer de nouvelles règles dans l’ordre sportif mondial. La question des sportifs transgenres et la gestion de l’organisation des prochains Jeux olympiques d’été 2028 à Los Angeles seront deux dossiers majeurs sur lesquels Coventry et Trump vont devoir sérieusement discuter. "Face à des personnalités très fortes comme Trump, il faut une personne qui sait répondre", analyse un membre du CIO, qui n’a pas voté pour l’ancienne nageuse. "Elle devra définir et affirmer sa personnalité, mais il ne faut pas trainer tout en conservant ce devoir de neutralité du CIO."
Mais c’est sur un autre dossier sensible que la native de Harare est attendue dans ces premiers mois: le fameux dossier des athlètes russes et biélorusses. Dès son élection hier soir, la nouvelle présidente qui débutera en juin son mandat de huit ans a reçu les félicitations du Kremlin. Scène assez rare. Bien loin des lourdes accusations lancées par la Russie en mars 2024, période où l’instance avait imposé des nouvelles restrictions pour les athlètes russes en vue des JO 2024 à Paris. La Russie avait accusé le CIO de "basculer dans le racisme et le néonazisme". C’est sur ce dossier que Coventry peut imposer sa patte. Elle laisse déjà entendre en coulisses que le processus adopté pour les Jeux de Paris a été plutôt positif. Même si elle souhaite créer un groupe de travail sur cette question pour ne pas pénaliser tous les athlètes. En clair: l’ouverture est possible mais sous conditions.
"De plus en plus de membres du CIO ne comprennent pas toujours les sanctions à l’encontre de la Russie", confie un observateur du monde olympique. "Elle représente l’Afrique, et de nombreux pays africains sont aujourd’hui proches du Kremlin, c’est à prendre en compte dans la réflexion qu’elle pourra adopter dans les prochaines semaines. Cela étant dit, ça reste une proche de Thomas Bach, la méthode ne devrait pas être totalement différente". Avec ces dossiers sensibles sur le terrain diplomatique, Kirsty Coventry joue son début de mandat. Pour le moment, la tendance forte reste quand même à une procédure similaire à celle de Paris 2024 pour l’accueil des athlètes russes à Milan-Cortina en 2026. Mais pourquoi pas une ouverture et un retour "à la normale" pour LA 2028?
LA 2028, inquiétude chez certains membres du CIO
Enfin, un dossier est à suivre de près : l’organisation des Jeux olympiques de Los Angeles 2028. Jeudi matin, à la tribune de la 144e session du CIO, les organisateurs de LA2028 ont dû répondre à de nombreuses questions de la salle. Plusieurs membres du CIO ont montré des "inquiétudes" sur l’accueil de toutes les délégations sur le territoire américain en 2028. Dans la salle, on se pose des questions sur les procédures de visa pour certains pays avec qui les Etats-Unis possèdent des relations diplomatiques tendues.
"A Paris, la procédure avait déjà pris du temps, mais là on parle des Etats-Unis, peste un membre de l’instance. Et pour le moment, les réponses que l’on a eu ne sont pas rassurantes. Pour les petites nations, c’est un dossier majeur".
"Nous avons le soutien de la présidence", répète le patron du comité d’organisation, Casey Wasserman. "Je suis certain que nos JO seront extraordinaires". Très rapidement soutenu à la tribune par Thomas Bach: "Nous sommes parfaitement confiant sur vos relations avec le gouvernement fédéral. Le CIO sera toujours à vos côtés". La charte olympique oblige les organisateurs des Jeux Olympiques un "accès total pour tout le monde. Ce que Donald Trump pourrait remettre en cause. "Nous n’aurons aucun problème, tout le monde sera accepté aux États-Unis", conclu le patron du COJO LA 2028.