Lutte (championnats d'Europe): "J'avais besoin d'un projet dans lequel croire", exprime Debien

Lutte - Tatiana Debien, le 1er décembre 2023 - Icon Sport
Tatiana Debien, vous devez arriver en forme sur ces championnats d'Europe, pleine de confiance après vos récentes médailles?
Ca m'a aidé à passer un petit cap, à confirmer le niveau que je pensais avoir. Je suis médaillée aux championnats du monde. Normalement, un Euro est d'un niveau légèrement en-dessous. Dans une catégorie non olympique comme la mienne il y a des filles qui reviennent des JO. Ce n'est pas pour autant que je suis confiante.
Le "niveau que vous pensiez avoir"? C'est-à-dire?
Ma confiance était forte il y a 10 ans. J'étais numéro 6 mondiale, j'avais gagné le Grand Prix de Paris puis je me suis blessée aux ligaments croisés. Grosse pause. Vers 2020 il y a la pause maternité. J'ai eu l'impression que chaque fois que je remontais la pente il y avait quelque chose qui m'empêchait de concrétiser. Le travail des trois petites années avant Paris 2024 a été particulier. Je me suis engagée dans certaines directions. Ca ne s'est pas concrétisé avec une participation aux JO mais le travail fonctionne maintenant comme aux derniers Mondiaux où je bats de grosses adversaires.
Est-ce que la maternité a changé votre vision?
Mon fils s'appelle Ali, il est très sage et vient d'avoir 4 ans. Il est passionné par la lutte, il s'entraîne déjà. Il connaît les prises, ma prise favorite et il suit toutes mes compétitions. Ça m'a changé énormément de devenir maman. Par contre la charge mentale... Quand je n'étais pas maman, je m'entraînais très dur mais ça n'avait rien à avoir avec la vie de maman. C'était l'envie personnelle. Le moment a été choisi au moment des Jeux de Tokyo pour avoir le plus de temps pour Paris 2024. On le voit de plus en plus à l'étranger mais aussi chez nous à l'image de Clarisse Agbégnénou et Estelle Mossely qui ont gagné après avoir eu un enfant. C'est une organisation mais la mentalité a évolué. On voit aussi qu'on peut performer en étant plus âgée.
Quels sont les grands changements qui ont abouti à vos nouvelles performances?
Je me rappellerai toujours de mes vacances juste avant la reprise à l'été 2021, avec mon petit Ali sous le bras que j'allaitais. Je me demandais: 'Est-ce que je repars pour 3 ans?' Il fallait y aller à fond. J'avais besoin d'un projet dans lequel croire, d'un staff engagé. Il y avait le suivi médical, le nutritionniste pour des descentes au poids extraordinaires. On a aussi récupéré un data scientist qui bosse énormément. L'étude des adversaires c'est un gros plus. Quand tu arrives en compétition après ton régime, tu ne sens pas ta perte de poids. Tu vois ton tableau et tu as tout de suite le récapitulatif sur chaque fille, chaque stratégie. C'a a très bien marché sur les derniers Mondiaux. Ma finale 3-5 contre une Américaine, que je n'avais jamais battue en stage, la stratégie a fait que je l'ai amenée au bout sur les six minutes. Au tournoi de Zagreb je bats la Russe contre qui je n'arrivais pas à installer ma lutte. A la pause on s'est réadapté et ça a changé le match. Ce sont des détails qui font la différence.
Avec vos récents résultats est-ce que n'importe quelle médaille à l'Euro serait bonne à prendre?
Une médaille c'est toujours bien. Je viserai le titre car j'ai déjà eu du bronze. J'ai envie de faire plus. Je ferai de mon mieux et un peu plus. L'objectif c'est le titre. On verra. Je ne cracherai pas sur une médaille car on ne fait pas des médailles tous les jours.