Egalité hommes-femmes: où en est-on dans le sport ?

Le 22 février dernier, l’équipe américaine féminine de football obtenait une victoire historique. Pas sur le terrain, où les coéquipières de Megan Rapinoe et Alex Morgan restent au sommet de la hiérarchie mondiale mais bien en-dehors où les Américaines ont remporté leur bataille avec leur fédération. Les doubles championnes du monde en titre ont obtenu gain de cause dans leur quête d’égalité salariale avec l’équipe masculine. Une petite révolution dans le monde du sport. En cette journée internationale des droits des femmes, l'occasion est belle pour faire le point sur l'égalité hommes-femmes dans le monde sportif.
Football: les infrastructures, la priorité en France
Dans le monde du ballon rond, cette petite révolution outre-Atlantique a eu le mérite de réveiller le débat. Questionnée sur le sujet, Wendie Renard, la capitaine de l'équipe de France, est réaliste. "On sait que le football américain a beaucoup d’avance sur le football européen parce que là-bas le soccer est vraiment le sport numéro un. En fait il n’y a pas photo. Aujourd’hui, elles ont des titres, elles ont un palmarès donc elles peuvent se permettre d’avoir cette lutte avec leur fédération. En terme médiatique, elles sont vraiment populaires alors que c’est très peu le cas en Europe avec les équipes nationales. C’est sûr que c’est intéressant mais il faut continuer à travailler pour gagner. Et puis quand tu gagnes tu as plus de pouvoir pour demander des choses", soulignait la joueuse de l'OL en marge du Tournoi de France remporté par les Bleues en février dernier.
Mais le chemin est encore long pour en arriver au même point. A titre d'exemple, les coéquipiers de Kylian Mbappé ont touché une prime de 400.000 euros après le sacre du Mondial 2018. Celle prévue pour les filles en cas de victoire lors de la Coupe du monde 2019 atteignait à peine 40.000 euros. Un écart appliquant "un principe d'égalité" car lié à l'écart des dotations de la FIFA pour les Mondiaux féminins (30 millions d’euros) et masculins (400 millions d’euros). Pourtant, les fédérations norvégiennes (2017), néo-zélandaises (2018), australiennes (2019), brésiliennes et anglaises (2020) ont choisi de compenser ces dotations inégales de la FIFA en attribuant le "même montant pour les primes et les indemnités journalières aux femmes et aux hommes."
Mais avant de penser à l'égalité salariale, les équipes de D1 Arkéma veulent gagner la bataille des infrastructures afin de pouvoir exercer leur métier dans des conditions optimales. Ada Hegerberg, première lauréate du Ballon d'or en 2018 et joueuse de l'OL, multiplie les demandes auprès des instances françaises et européennes pour mieux développer le football féminin.
Tennis: égalité des "prize money" pour les Grands Chelems
Le tennis est le premier sport à avoir proposé l'égalité salariale à l'occasion de l'US Open en 1973 (prize money de 25.000 dollars, soit 23.000 euros). A l'époque, les femmes étaient autorisées à pratiquer le foot depuis seulement trois ans. Depuis, l'égalité des "prize-money" s'est généralisée et les vainqueurs des Grands Chelems (Open d'Australie, Roland Garros, Wimbledon, US Open) touchent la même somme, hommes et femmes confondues.
En revanche, des inégalités existent sur certains Masters 1000 (Rome, Canada, Cincinnati), où les hommes gagnent davantage. En termes de programmation, les organisateurs favorisent une égalité de traitement, notamment pour les night sessions et les matchs sur les courts centraux.
Rugby: les femmes néo-professionnelles
Le rugby féminin a passé un cap en 2018, avec la professionnalisation de la discipline et la diffusion des matchs du XV de France sur France 2, notamment pour le Tournoi des VI Nations. "On est dans les meilleures conditions pour pouvoir performer et gagner des titres. On l’a vu avec les filles du 7 qui ont ramenées une belle médaille. Je pense que dans l’esprit des gens, c’est important aussi que les petites filles puissent s’identifier à nous, nous voir dans les médias, voir que c’est possible, voir que les femmes font aussi du sport, remportent des choses. C’est un moyen d’être des exemples, des modèles et de faire rêver et espérer des jeunes filles pour qu’elles puissent s’émanciper de la meilleure des façons", confie Safi N'Diaye, deuxième ligne du XV de France sur le site de la Fédération Française de Rugby.
Pourtant, tout est loin d'être rose pour le ballon ovale, notamment en Elite 1, le plus haut niveau en France. Cette saison, l'équipe féminine de l'AS Bayonne a été obligée de déclarer forfait après une décision du conseil d'administration du club en novembre dernier. Les joueuses avaient pointé du doigt leurs mauvaises conditions d'entraînements dans une lettre ouverte, où elles soulignaient que le manque d'investissement du club entachait les efforts fournis par les joueuses.
Egalité stricte pour le surf, des écarts dans les sports collectifs
En revanche, on surfe sur l'égalité pour les primes de résultats entre les hommes et les femmes depuis 2019 dans les vagues. Par la voix de Sophie Goldschmidt, directrice générale de la World Surf League (WSL, organisatrice du circuit professionnel mondial de surf), surfeurs et surfeuses touchent désormais le même gain lors de chaque victoire. La WSL garde l'étiquette de première ligue américaine professionnelle à instaurer l'égalité salariale.
Le son de cloche n'est pas le même dans les autres sports collectifs (basket, hand, volley) ou les écarts sont toujours aussi importants. Dans une lettre publiée dans The Players Tribune en 2018, Stephen Curry, triple champion NBA, dénonçait les inégalités hommes-femmes aux Etats-Unis, où les joueuses de WNBA touchent 115 fois moins (15 millions de dollars par an contre... 130.000 dollars), selon des chiffres récoltés en 2021.
"Vous savez, je mentirais si je n’admettais pas que le sujet de l’égalité pour les femmes est devenu un sujet plus personnel et plus réel dernièrement. Tous les jours nous devons travailler pour mettre fin à cet écart de salaire dans ce pays parce que chaque jour, les femmes sont affectées par cet écart salarial. Et tous les jours, cela renvoie le mauvais message aux femmes sur qui elles sont, ce qu’elles valent et ce qu’elles peuvent être et ne pas être. On pourrait arriver au stade où le basket féminin ne sera pas du 'basket féminin', mais juste du basketball, joué par les femmes et célébré par tout le monde. Je me sens plus motivé que jamais pour aider les femmes pour faire avancer les choses, de toutes les manières possibles", expliquait le joueur des Golden State Warriors.
A titre d'exemple en France, une joueuse de Ligue Féminine de Basket touche en moyenne 2,2 fois moins que ses homologues masculins (4.445 euros contre près de 10.000 euros en moyenne), selon des données datant de 2021. L'absence de diffuseur officiel pour le championnat féminin (contre un match de Betclic Elite par semaine diffusé sur BeIN Sport) n'aide pas non plus.