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UFC. Khabib-McGregor: pourquoi la bagarre générale était presque inévitable

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Si le choc entre Conor McGregor et Khabib Nurmagomedov, samedi à Las Vegas, a été à la hauteur des attentes, il a été marqué par une énorme bagarre générale entre les clans des deux combattants. Une bagarre provoquée par le Russe, pourtant vainqueur du combat, qui n’a pas hésité à sauter par-dessus la cage de l’octogone pour en découdre. La faute aux attaques incessantes avant le choc de McGregor, qui n’a pas hésité à s’en prendre à la vie privée du Daghestanais.

Le combat entre Conor McGregor et Khabib Nurmagomedov n’était pas qu’une simple opposition de style dans la cage de l’octogone, entre un spécialiste du combat au sol pour le second et les redoutables enchaînements pieds-poings du premier. Et cette différence de culture et de vie a éclaté avec toute sa force à la face du monde, samedi à Las Vegas, dans la foulée de la victoire du Russe sur l’Irlandais.

Alors qu’il venait de remporter son combat par soumission, après quatre rounds sans appel pour lui, Khabib Nurmagomedov s’en est pris à Dillon Danis, homme de coin ce soir-là mais surtout partenaire d’entraînement de Conor McGregor. Un échange d’amabilité plus tard et le Daghestanais sautait par-dessus la cage et se jetait littéralement sur Danis. La suite? La fameuse bagarre générale qui a électrisé la T-Mobile Arena, durant laquelle plusieurs hommes du camp Nurmagomedov ont pénétré dans la cage pour agresser McGregor. Une bien vilaine image de l’UFC, beaucoup trop "sauvage", ce qui ne fera que donner du grain à moudre aux détracteurs du MMA et à son éventuelle légalisation en France.

Des attaques sur la religion, la famille, la patrie, la fierté nationale

Mais si Khabib a dégoupillé, c’est aussi et surtout parce que McGregor a tout fait pour que cela arrive. L’Irlandais, adepte du show et de la provocation, n’a cessé de franchir la ligne avec son adversaire, en allant titiller ce dernier sur des sujets très personnels, comme la religion, la famille, sa patrie ou encore sa fierté nationale. Des sujets intimes mais surtout sensibles pour le Daghestanais, comme pour l’ensemble de son peuple. McGregor n’a pas lésiné sur la puissance de feu… verbale: une salve pour le père et entraîneur de Khabib, traité de lâche pour avoir posté une photo du président tchétchène et despote, Ramzan Kadyrov.

Ou encore une autre sur l’argent de Ziyavudin Magomedov, l’homme qui a financé une partie de la carrière du champion UFC, en prison aujourd’hui pour détournements de fonds et crime organisé. "Les gens me critiquent pour avoir sauté en dehors de la cage. Mais il a parlé de ma religion, de mon pays, de mon père, il est venu me lancer un charriot alors que j’étais dans un bus et qu’il a failli tuer des gens… C’est quoi cette merde? C’est de cela que vous devriez vous soucier, a lancé Khabib en conférence de presse après sa victoire et la bagarre générale. Ce n’est pas juste un sport pour ouvrir sa grande bouche. Je veux changer ce truc. Mon père va me frapper quand je vais rentrer car il m’a toujours enseigné le respect mais je reste un être humain. Ce sport doit être fait avec respect. Je ne veux plus des gens qui disent n’importe quoi sur un adversaire. Il y a des choses dont on ne peut pas parler."

"Khabib a vu la guerre, il a vu des amis mourir"

Des choses que McGregor n’a pas perçues. Ou pas comprises. "Les combattants occidentaux sont très loin de se rendre compte comment ont grandi ceux qui viennent d’une région comme le Daghestan, a notamment rappelé le journaliste Karim Zidan ces derniers jours. Khabib a vu la guerre, il a vu des amis mourir, il a vu des insurrections islamistes, il a connu des conditions de vie très difficiles… Ils ont une autre vision de la vie et McGregor n’a pas conscience de tout ça."

Et du côté de l’UFC? Visiblement, ce dernier aussi n’avait pas conscience de l’ampleur de la situation avant combat. "Vous avez vu combien il y avait de policiers dans la salle? Je ne sais même pas si le reste de la ville est en sécurité car ils sont tous ici. Mais que faire quand un type saute comme un singe au-dessus de la cage" a notamment déclaré en conférence de presse le patron exécutif de l’UFC, Dana White, qui a préféré ne pas remettre la ceinture à Khabib sur le ring de peur de provoquer une émeute.

Pourtant, l’organisme US aurait pu et dû mieux anticiper les coulisses électriques de ce choc. "Certaines choses ne doivent pas être utilisées pour la promotion d’un combat, juge Daniel Cormier, actuel champion des lourds et des mi-lourds de l’UFC. La religion, la famille, le pays. Pour Khabib, c’était vraiment personnel. C’est une culture différente." Félicité au téléphone par Vladimir Poutine, probablement tancé par son père au retour au pays donc, Khabib risque une suspension et, peut-être la perte de son titre UFC si celle-ci venait à trop durer dans le temps. Mais visiblement, pour lui, le jeu en valait la chandelle.

Alexandre Herbinet