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UFC 284: comment gérer le sol de Makhachev? Les secrets de Volkanovski avant le choc

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Champion des plumes, Alexander Volkanovski se lance un défi XXL en affrontant Islam Makhachev pour sa ceinture des légers ce week-end en Australie dans le combat principal de l’UFC 284 (en direct à partir de 2h dans la nuit de samedi à dimanche sur RMC Sport 2). Avec une question sur toutes les lèvres: saura-t-il contrer le sol ultra dangereux du Daghestanais? L’Australie s’est préparé pour. Explications.

Se relever ou ne pas se relever. Telle est la question sur toutes les lèvres en approche du choc du week-end entre Islam Makhachev et Alexander Volkanovski, respectivement champions des légers et des plumes mais aussi numéros 2 et 1 du classement toutes catégories confondues de l’UFC. Couronne des légers et statut officieux de "meilleur combattant de la planète" en jeu, les deux hommes vont s’expliquer dans la cage de Perth (Australie) en combat principal de l’UFC 284.

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Avec une interrogation qui fascine: l’Australien, qui monte de catégorie pour aller chercher grandeur et reconnaissance, aura-t-il une solution contre le sol ultra dangereux du Daghestanais? Formé au sambo combat, mélange de lutte, boxe et judo dont il deviendra champion du monde, Makhachev est connu comme son grand pote Khabib Nurmagomedov – dont il est le successeur – pour sa lutte étouffante et sa capacité à vous annihiler et vous soumettre une fois qu’il vous envoie au sol. De quoi faire peur à Volkanovski, plus réputé pour son striking (combat debout)?

"Non. J’ai aussi fait pas mal de lutte dans ma vie, répond à RMC Sport celui qui a notamment remporté un titre national australien en lutte gréco-romaine dans l’enfance. Je me suis entraîné avec d’excellents lutteurs partout dans le monde, parfois des gars qui venaient de la même région du monde que lui. Ce n’est pas un problème pour moi. C’est même positif car ça va me permettre de montrer d’autres qualités. Beaucoup de gens disent que je n’ai pas encore affronté un grand lutteur ou un grand grappleur. Je vais pouvoir leur prouver que ça ne change rien. Et combien je suis complet." Pour préparer le challenge du sol contre Makhachev, Volkanovski s’est tourné vers un prof de très haut niveau devenu son coach pour ce choc: son compatriote Craig Jones, champion du monde IBJJF (jiu-jitsu brésilien) en 2015 et doublé médaillé d’argent à l’ADCC (plus grande compétition de grappling). Qui a d’abord tenu à lui graver en tête sa capacité à se relever si le combat passe du vertical à l’horizontal.

"Au-delà de l’aspect technique, l’idée était de gagner la confiance d’être capable de se relever, explique Craig Jones dans le RMC Fighter Club. De nombreux gars abordent les combattants daghestanais avec cette attitude: 'Si je me fais amener au sol, le combat est fini'. Du coup, ils deviennent mauvais debout, en pieds-poings. Et s'ils se font amener au sol, vous les sentez littéralement apeurés. Ils tentent juste de survivre, ce qui est évidemment une horrible idée. L’approche de Volkanovski est de se dire: 'Si je suis amené au sol, je me relèverai'. Vous ne devez pas trop respecter les compétences ces mecs. Leur grappling possède une sorte 'd’effet Mike Tyson' mais si vous mettiez n’importe lequel contre des combattants de jiu-jitsu professionnels, ils se feraient probablement soumettre très rapidement. Ce n’est pas imbattable, même dans un combat de MMA."

Et le cador du grappling d’ajouter: "Face aux lutteurs daghestanais, la clé est de rester discipliné. Regardez Justin Gaethje contre Khabib. Il était très prudent, toujours sur le reculoir à chercher le coup dur, et Khabib a pu anticiper son timing pour l’amener au sol. Mais le striking et les déplacements de Volkanovski sont très techniques et malgré la différence de taille, il y aura moins d’entrées nettes pour des amenées au sol que face à un mec qui essaie juste de leur arracher la tête avec un gros coup."

S’il ne peut éviter un voyage au sol, l’Australien devra aussi savoir se montrer dangereux depuis son dos. "Si tu essaies juste de te relever, c’est très prévisible et ça peut se retourner contre toi, détaille Craig Jones. Il ne va pas venir jouer un jeu de garde très offensif en étant sur son dos, comme ça se ferait dans un combat de jiu-jitsu, mais il va essayer de combiner des menaces de soumission au sol avec cette capacité à se relever." Le coach de sol de Volkanovski souligne combien ce dernier a progressé en grappling depuis leur première rencontre, conséquence de son côté gros travailler et de sa volonté permanente "de comprendre le sport sur le plan technique".

Au point d’imaginer la dinguerie totale de le voir soumettre Makhachev au sol ? Ces derniers jours, Craig Jones a expliqué à Submission Radio qu’il "verrai(t) bien Alexander soumettre Islam avec une clé de talon". Tout sauf anodin. "Les combattants de MMA sont absolument terrifiés par les clés de jambes, tout comme la majorité des lutteurs", rappelait-il dans le RMC Fighter Club. Pour démystifier "l’effet Mike Tyson" de la lutte de Makhachev, comme il existait aussi avec Khabib, Craig Jones répète que Brian Ortega – battu par Volkanovski à l’UFC 266 en septembre 2021 après avoir résisté à un triangle et surtout à une guillotine bien enclenchée – était "plus dangereux au sol, avec des soumissions meilleures".

"Si on regarde l’approche daghestanaise du grappling pour le MMA, complète-t-il, elle est basée sur des amenées au sol puissantes, des positions dominantes fortes, et ils sont plutôt prudents sur le type de soumissions qu’ils cherchent à appliquer." La différence de gabarit, à l’avantage de Makhachev, n’inquiète pas l’Australien. "Je m’entraîne avec des welters ou des moyens donc je ne sais pas pourquoi les gens disent que ça fera une telle différence. Je suis habitué aux gros gars. La puissance n’est jamais le problème. Je respecte plus son style, sa technique, son contrôle. Et c’est avec ça que j’ai hâte de surprendre les gens." Cette différence pourrait également jouer des tours au champion des légers.

"Si Islam est capable de verrouiller ses mains autour de lui, ça sera très efficace et plus facile que face à un opposant plus gros ou de la même taille, pointe Craig Jones. Mais si vous avez déjà fait de la lutte avec un type plus petit que vous, vous savez que c’est très difficile d’avoir une entrée propre sur quelqu’un qui a un centre de gravité plus près du sol et qui descend ses appuis plus bas. Et si Islam n’est pas parfaitement efficace dans ses mouvements pour amener Alex au sol, s’il ne trouve pas une bonne position pour le finir, ça va être compliqué pour lui de faire ça pendant vingt-cinq minutes. Son triangle de bras pour soumettre Charles Oliveira, quand il est devenu champion, démontre une très grosse capacité à presser et serrer et demande beaucoup de force. Mais si c’est ça la manière dont vous luttez, vous allez brûler beaucoup d’énergie. C’est un mouvement très couteux si vous n’obtenez pas la finition."

Et comme il l’a montré dans la guillotine face à Ortega, Volkanovski ne sera pas facile à faire lâcher. "Il n’arrête pas de raconter tout ce qu’il a fait à ses adversaires dans le passé mais je suis fait d’un autre métal, rappelle l’Australien. S’il pense que je vais m’écrouler comme eux, il va avoir une grosse surprise. Je ne lâche pas, jamais. Je suis humain et tout le monde peut être battu mais vous ne me verrez pas m’écrouler. Il faudra me tuer dans la cage! (…) Islam n’a jamais affronté quelqu’un comme moi." Volkanovski , qui a encaissé plus de coups significatifs lors de son dernier combat contre Max Holloway en juillet dernier (127) que Makhachev sur l’ensemble de ses treize combats à l’UFC (112), une stat folle, annonce son plan au micro de RMC Sport: "Gérer sa lutte puis l’éteindre au deuxième round".

Face à celui que beaucoup voient comme le meilleur striker de l’UFC à l’heure actuelle, Makhachev a lui aussi averti vouloir un KO pour prouver des choses à ceux qui critiquent ses poings. Info ou intox? "On sait qu’il ne tentera pas ça, sourit le challenger, mais qu’il va plutôt vouloir me mettre à terre pour m’attraper." Et le garçon de prévenir: "Ça va être dur de me mettre au sol. J’ai eu le temps de me préparer. J’ai passé mon temps à travailler sur le fait de me relever. On verra ensuite si sa boxe est aussi bonne qu’il le dit. Car je sais que je vais me relever." "J’ai presque envie d’être dans cette position, titille-t-il. Ce serait bon pour l’histoire et la dramaturgie de me relever et de le regarder genre: 'Alors, qui sourit maintenant?' Ou de résister à une tentative de soumission en mode: 'C’est tout ce que tu as?' Mais ne soyez pas surpris si mon jeu de jambes et ma défense d’amenée au sol font que je ne me retrouve pas dans cette position."

Pour Volkanovski, il s’agira aussi de remettre les points sur les i. La majorité des spécialistes le donnent perdant. Celui qui a surmonté des obstacles et fermé des bouches toute sa vie en fait un carburant: "Ça rendra ma victoire encore plus grande". Elle lui permettrait aussi d’enlever ce "sourire narquois" qu’il a vu chez Makhachev quand les deux ont partagé une interview avec l’ancien double champion (lourds et mi-lourds) Daniel Cormier ces derniers jours. "C’est de la suffisance, juge l’Australien. On verra bien s’il sourira encore à la fin. J’ai hâte de lui enfoncer son sourire dans le visage."

Encore plus motivé par ce feu allumé par l’attitude du Daghestanais, Volkanovski annonce savoir se servir de ce type d’énergie "pour combattre encore mieux". Au bout, il y a la possibilité de conserver son titre de numéro 1 toutes catégories confondues et de devenir le cinquième double champion en simultané de l’histoire de l’UFC. Celui qui a fait la promesse de défendre les deux ceintures en cas de victoire sur Makhachev a conscience du "risque" de ce défi. Mais il adore le prendre. "Dans la vie, si vous voulez avoir du succès, vous devez relever des challenges. Beaucoup disent que je ne suis pas le gars pour faire ça. Mais j’ai tout pour, tout ce qui a fait de moi un champion, l’éthique de travail, le cœur, etc. Si quelqu’un peut le faire, c’est moi."

Il aurait alors plus que mérité son statut de meilleur combattant de la planète. "Ça va être un moment énorme, historique. C’est une grosse opportunité pour moi, ce qui va définir mon héritage, et je suis impatient de la saisir." Sûr de ses qualités comme de son mental: "Je refuse de perdre, c’est plus important que tout pour moi". Makhachev a aussi de quoi bien le malmener. Mais le champion des légers est prévenu. Même au sol, Volkanovski ne lâchera pas facilement l’affaire.

https://twitter.com/LexaB Alexandre Herbinet Journaliste RMC Sport