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"Le pire joueur de l’histoire": pourquoi Rudy Gobert est l’homme le plus clivant de la NBA

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Après avoir conclu la série face aux Los Angeles Lakers par une performance monumentale, Rudy Gobert (Minnesota Timberwolves) s’apprête à défier les Golden State Warriors ce mardi à l’occasion du second tour des playoffs. Le Français a une nouvelle occasion de faire taire toutes les critiques qu’il essuie depuis tant d’années.

Mercredi 30 avril, le plus gros événement de la soirée n’a pas eu lieu sur le parquet des Los Angeles Lakers, où les Minnesota Timberwolves d’un immense Rudy Gobert (27 points, 24 rebonds) ont terrassé LeBron James et sa bande. Il s’est produit à plus de 3500 km de la Cité des Anges, plus précisément dans les studios de l’émission Inside the NBA, situés à Atlanta. Après tant d’années de critiques acerbes, Shaquille O’Neal, consultant pour la chaîne TNT Sports, a été obligé de dire du bien du pivot français. (Presque) sans broncher.

"Je n’aurais jamais cru que ces mots sortiraient de ma bouche, mais Rudy Gobert domine", a lâché l’emblématique pivot des Lakers. Le tout en faisant semblant de vomir entre chaque mot prononcé.

Patient 0 de la NBA et "pleurnicheuse"

Après la performance monumentale du joueur des Wolves lors du match 5 contre les Lakers, ils sont plus d’un à avoir dû faire profil bas. Présent en NBA depuis 2013, l’ancien joueur de Cholet est incontestablement l’un des joueurs les plus clivants de la ligue-nord américaine. Alors que Minnesota s’apprête à défier les Golden State Warriors lors du second tour des playoffs (match 1 dans la nuit de mardi à mercredi), l’intérieur tricolore se sait une nouvelle fois attendu au tournant. "J'entends le bruit. Depuis que j'ai commencé à jouer. J'ai toujours entendu le bruit, j'entends les gens qui ne croient pas en moi. J'ai toujours essayé d'être au-dessus de ça", a commenté le principal intéressé après la fin de la série contre les Lakers.

Difficile de trouver un point de départ à la longue histoire de désamour entre Gobert et la NBA. L’une des bascules, sans doute la plus symbolique, est intervenue au début de la pandémie de Covid-19. En mars 2020, afin de dédramatiser la situation, il décide de faire une blague en touchant tous les micros de la salle de presse… avant de devenir 48 heures plus tard le premier cas positif de la NBA. Ce faux pas avait considérablement terni son image. Un an plus tôt, ses larmes après avoir appris sa non-sélection au All-Star Game 2019 avaient déjà fait de lui un "pleurnicheur" aux yeux d’une partie des fans américains.

L’impulsivité du vice-champion olympique 2021 et 2024 l’a également placé dans l'œil du cyclone. En avril 2023, lors du dernier de match de saison régulière, il dégoupille et frappe Kyle Anderson, l’un de ses coéquipiers, lors d’un temps-mort. Son geste, capté par les caméras du monde entier, lui avait valu un match de suspension.

Élu "joueur le plus surcoté" par ses pairs

En dehors de ces événements ponctuels, preuves d’un caractère clivant et bien trempé, Gobert cristallise les critiques à cause de son style de jeu, notamment la faiblesse de son bagage offensif. Si la NBA actuelle est peuplée d’intérieurs capables de shooter de loin, Gobert, lui, est perçu comme un pivot "à l'ancienne", dominant près du panier mais parfois un peu rustre. Lors des Jeux olympiques de Paris 2024, Shaquille O’Neal avait ainsi publié une story Instagram montrant une photo de caissier avec le visage de Gobert, accompagnée de la légende: "Rudy Gobert s’il ne mesurait pas 2,16 m."

Même s’il a été élu meilleur défenseur de l’année (DPOY) à quatre reprises, un record dans l’histoire de la NBA (à égalité avec Ben Wallace et Dikembe Mutombo), son apport défensif est parfois remis en cause. En 2024, dans un sondage publié par The Athletic, seuls 6% des joueurs interrogés le désignaient comme meilleur défenseur de la ligue… quelques semaines avant que la NBA lui décerne le fameux trophée de DPOY. Dans ce même sondage, il héritait du titre peu glorieux de "joueur le plus surcoté de la ligue". Un autre signe de son impopularité. "C'est souvent pas mal de jalousie, et les gens sont des suiveurs, il y a des effets de mode", avait répondu Gobert. "Ça fait cool de dire qu'untel est surcoté, untel autre chose. Au final, les statistiques et le terrain ne mentent pas."

Un énorme contrat qui agace

La défiance envers Gobert a pris une autre dimension à partir de la fin de l'année 2020, date de la signature de son premier gros contrat (205 millions de dollars - 180 millions d’euros - sur cinq ans). Car si le Français agace autant, c’est aussi (surtout?) parce qu'il brasse beaucoup d’argent. Cette saison, il touche 43,8 millions de dollars (38,5 millions d’euros) de salaire, ce qui fait de lui le 16e joueur le mieux payé de toute la NBA. Des émoluments qui ont tendance à faire quelques jaloux. Son meilleur ami Shaquille O’Neal en tête. "Rudy Gobert est le pire joueur de l'histoire de la NBA. Tu sais pourquoi? Si tu signes un tel contrat tu dois me montrer que tu les vaux", a tranché l’ancien pivot. "Donc vous avez des mecs comme ça qui baisent le système, qui gagnent tout cet argent et ne savent pas jouer."

"J’en ai marre de cette aigreur", s’était agacé Fred Weis, consultant basket pour RMC Sport, dans les Grandes Gueules du Sport en septembre dernier. "On en a marre d’entendre le Shaq et les Américains en général critiquer Rudy Gobert. (...) Tu sais pourquoi il ne l’aime pas? Parce que Shaquille O'Neal a gagné ‘seulement’ 292 millions de dollars dans sa carrière. Rudy Gobert, sur les cinq dernières, sur le dernier contrat qu’il a signé avec Utah, il est à 205. En cinq ans, il aura gagné autant que Shaquille O’Neal."

Gobert a donc une nouvelle occasion de faire taire les critiques à l’occasion de la demi-finale de la série face aux Golden State Warriors. Il y retrouvera un autre de ses meilleurs ennemis, Draymond Green. En 2019, l’intérieur américain avait été le premier à se moquer des larmes de Gobert à la suite de sa non-sélection au All-Star Game. Il a par la suite multiplié les prises de position à l’encontre du pivot tricolore. La guerre entre les deux hommes a connu son point culminant en novembre 2023, lorsque Draymond Green a extirpé Gobert d’une mêlée en le prenant par le cou. De quoi prévoir des retrouvailles électriques dans ces playoffs 2025.

Felix Gabory Journaliste RMC Sport