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Trois semaines pour se sauver: ce duel insensé entre Cofidis et Uno-X pour décrocher la dernière place en World Tour

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L'équipe cycliste Cofidis est lancée dans un sprint sous haute tension pour garder sa licence World Tour pour les trois prochaines années, convoitée par la formation norvégienne Uno-X Mobility. Et la dynamique n'est pas favorable à l'équipe nordiste...

Avis aux amateurs d'obscures kermesses belges de fin de saison: si vous assistez à un sprint acharné pour la 12e place entre Soren Waerenskjold et Milan Fretin sur Binche-Chimay-Binche le 7 octobre prochain, il ne faudra surtout pas vous étonner.

Se battre chaque jour, sur chaque course, pour chaque place: voilà en effet l'unique mission qui attend les coureurs des équipes Cofidis et Uno-X Mobility pour les trois dernières semaines de la saison 2025. Car loin, bien loin des joutes au sommet entre Pogacar, Vingegaard, Evenepoel et les autres se livre une autre bataille. Un duel peut-être moins prestigieux mais tout aussi crucial: celui pour le maintien en WorldTour, ce club ultra select des 18 meilleures équipes du monde qui ont l'immense privilège d'être automatiquement qualifiées pour toutes les plus grandes courses du circuit.

Et puisqu'elle ne dit jamais non à un petit supplément de drama, l'UCI a conçu un système de classement qui promet un mois d'octobre sous haute tension pour les deux formations, lancées dans leur course à la survie. Les licences WorldTour sont ainsi désormais réattribuées tous les trois ans sur la base d'un classement des performances enregistrées par les 20 meilleurs coureurs de chaque équipe sur les trois dernières saisons.

Plusieurs placés plutôt qu'un gagnant

Chaque course offre donc son lot de points, selon un barème établi en fonction de son importance. Par exemple, le vainqueur de Paris-Bourges le 9 octobre prochain offrira 125 points UCI à son équipe, soit autant qu'a rapporté Thymen Arensman à INEOS Grenadiers en terminant...12e du Tour de France. Un système dont ont su profiter certaines équipes malines comme la formation XDS-Astana qui, en misant sur les petites épreuves peu rémunérées mais où la concurrence est plus faible, s'est constitué un joli pécule lui permettant aujourd'hui d'être à l'abri de tout risque de relégation.

Mais si les Kazakhs dorment désormais sur leurs deux oreilles, ça n'est donc pas le cas de Uno-X Mobility et Cofidis, pour qui chaque course de cette fin de saison va ressembler à un quitte-ou-double. Respectivement 19e et 20e, les deux formations sont au coude à coude avec 25.260 points pour les Norvégiens et 25.054 points pour les Nordistes. Soit un minuscule écart de 206 points qui peut, en théorie, être effacé sur chacune des dernières courses du calendrier.

Devant, à la 18e place, l'équipe Intermarché-Wanty a pris une confortable avance de plus de 1200 points alors que derrière, à la 21e place, la formation Arkéa-B&B Hotels navigue à plus de 2000 points de Cofidis et devrait de toute façon disparaître, faute de sponsor pour 2026. Alors pourquoi cette bagarre pour la 19e place, alors que seules les 18 premières équipes recevront leur précieuse licence WorldTour pour les trois prochaines années? Tout simplement parce que la future fusion entre Lotto (actuellement 12e) et Intermarché-Wanty va libérer une place à la table des grosses écuries.

Le classement WorldTour au 1er octobre 2025

  • UAE Team Emirates-XRG, 104.958 points
  • Visma-Lease a Bike, 72.001 points
  • Lidl-Trek, 53.885 points
  • Soudal Quick-Step, 50.113 points
  • INEOS Grenadiers, 44.749 points
  • Red Bull-BORA-hansgrohe, 43.808 points
  • Alpecin-Deceuninck, 40.853 points
  • Decathlon AG2R La Mondiale, 36.073 points
  • Bahrain-Victorious, 35.459 points
  • Groupama-FDJ, 35.145 points
  • EF Education-EasyPost, 33.570 points
  • Lotto, 32.699 points
  • Israel-Premier Tech, 31.116 points
  • Movistar, 30.691 points
  • Jayco AlUla, 29.168 points
  • XDS Astana, 29.084 points
  • Picnic PostNL, 26.934 points
  • Intermarché-Wanty, 26.480 points
  • Uno-X Mobility, 25.260 points
  • Cofidis, 25.054 points
  • Arkéa-B&B Hotels, 23.011 points

Chaque point comptera

Une lutte sans merci qui change la manière d'aborder les courses pour ces deux formations en sursis. Car plus que la gagne, c'est la stratégie du tir groupé qui semble la plus efficace pour sauver sa peau.

"On se focalise sur les points, bien-sûr", confiait ainsi le directeur sportif de Cofidis Bingen Fernandez en marge de la Vuelta.

"Si on était plus tranquilles, on ferait les sprints à un seul coureur. Mais là, notre stratégie est de jouer avec deux mecs pour qu'ils fassent une bonne petite placette", poursuivait le dirigeant nordiste. Un raisonnement logique quand un simple coup d'oeil au barème permet de constater qu'il est plus rémunérateur pour une équipe de placer quatre coureurs aux 6e, 7e, 8e et 9e places de Paris-Tours (131 points) que de remporter la course (125 points).

Le mot d'ordre chez Cofidis et Uno-X Mobility est donc le même en cette fin de saison: tout le monde sur le pont. Les vacances attendront donc pour les coureurs des deux formations, qui vont devoir enfiler le bleu de chauffe jour après jour pour aller glaner le moindre point susceptible de faire pencher la balance de leur côté.

Et les occasions ne vont pas manquer en cette fin de saison, avec les traditionnelles semi-classiques italiennes d'octobre (Giro dell'Emilia le 4 octobre, Coppa Agostoni le 5 octobre, Coppa Bernocchi le 6 octobre, Tre Valli Varesine le 7 octobre et Gran Piemonte le 9 octobre) qui servent de tour de chauffe avant le Tour de Lombardie (11 octobre). Il faudra également viser juste sur le Tour du Münster (3 octobre), Binche-Chimay-Binche (7 octobre), Paris-Bourges (9 octobre) et Paris-Tours (12 octobre). Et toute la difficulté de cette lutte pour le maintien tient en cette capacité à se dédoubler pour marquer des points sur toutes les courses, quand bien même celles-ci ont lieu le même jour.

La menace du grand déclassement

Et puisque les mauvaises nouvelles ne naviguent jamais seules, l'équipe Cofidis pourrait avoir à faire face à une autre menace en cas de relégation en ProTour (la 2e division): celle de ne même pas figurer parmi les trois meilleures équipes ProTeam de la saison 2025, ce qui la priverait des invitations automatiques accordées à celles-ci pour toutes les épreuves WorldTour. En effet, si les 18 équipes WorldTeam sont assurées (et même obligées) de disputer toutes les épreuves WorldTour, l'UCI impose aux organisateurs de ces courses l'obligation d'inviter les trois meilleures équipes de 2e division de la saison passée, afin de leur permettre de "jouer la montée" à moyen terme.

Concrètement, si l'équipe Cofidis était reléguée en fin de saison mais finissait avec l'un des trois meilleurs totaux de points 2025 des formations non-titulaires de licences WorldTour, elle conserverait son droit d'accès aux courses les plus prestigieuses pour l'année 2026. Avec la lourde contrainte, toutefois, de devoir y performer en 2026 pour garder ce sésame l'année suivante.

Et le tableau n'est là non plus pas rose pour Cofidis. Car avec l'émergence de nouvelles et ambitieuses équipes comme Tudor Pro Cycling ou Q36.5 Pro Cycling, l'obtention de l'un de ces trois strapontins est loin d'être une formalité. Avec ses 6727 points marqués sur la saison 2025, l'équipe Cofidis finira quoi qu'il arrive loin de ces deux formations. Mais sa 3e place pourrait être menacée par une autre équipe française: TotalÉnergies, qui ne compte que 253 points de retard avant ce sprint final.

La double perte de sa licence WorldTour et de son droit aux invitations serait une véritable catastrophe industrielle pour l'une des institutions du circuit, Cofidis étant souvent présenté comme le sponsor le plus ancien du peloton (depuis la création de l'équipe en 1996). De quoi expliquer la nervosité ambiante qui a abouti à la mise à l'écart ces derniers jours de Cédric Vasseur, manager général de la formation, remplacé par Raphaël Jeune. Dont la première mission ressemblera plus à un SOS.

François de La Taille