CAN 2022: déjà plusieurs couacs et polémiques qui éclipsent le jeu

Critiquée par plusieurs entraîneurs dans les cinq grands championnats européens -principalement en raison de sa date - et même parfois considérée comme une surcharge pour les joueurs, la Coupe d’Afrique des nations 2022 a débuté le 9 janvier dernier au Cameroun. Si le football africain espère en profiter pour se défaire de certains clichés, la compétition a déjà connu quelques couacs et même une énorme polémique lors du choc du groupe F entre la Tunisie et le Mali.
"Ce qu’il s’est passé lors du match entre la Tunisie et le Mali est totalement ubuesque. C’est inadmissible, a lancé Jérôme Rothen dans l’émission Rothen s’enflamme sur RMC ce mercredi. Cela donne raison à tous les détracteurs de la Coupe d’Afrique. L’organisation mais qu’est-ce qu’ils foutent? Pourtant j’étais le premier à protéger cette CAN qui n’est pas mise sur un pied d’égalité avec l’Euro, une Copa America et j’en passe. C’est vrai que dans les paroles des dirigeants ou des entraîneurs, souvent je l’ai dit dans le vestiaire ils ne respectent pas assez la Coupe d’Afrique."
La fin de match folle de Tunisie-Mali
Impossible de ne pas aborder l’incroyable polémique du match entre la Tunisie et le Mali au moment de lister les difficultés rencontrées depuis le début de la CAN. En sifflant trop tôt, à deux reprises, la fin du match, l’arbitre zambien Janny Sikazwe s’est attiré les foudres de nombreux supporters et le football africain a été moqué par ses détracteurs, notamment sur les réseaux sociaux.
La sélection tunisienne a beau avoir déposé une réserve technique, aucune décision officielle concernant le résultat du match n’a été communiquée par les instances ou les organisateurs. De quoi donner lieu à de nouvelles critiques sur la manière dont a été gérée la situation.
Le patron des arbitres de la CAF a bien tenté de désamorcer la polémique en justifiant la boulette par une possible insolation mais cet incident ressemble à une mauvaise publicité pour le tournoi continental.
Des stades qui ne font pas le plein
Hormis le match d’ouverture entre le Cameroun et le Burkina Faso (2-1), aucune rencontre de cette Coupe d’Afrique des nations n’a fait le plein. Pas même l’entrée en lice du tenant du titre algérien ou le choc tant attendu entre le Maroc et le Ghana (1-0). La faute notamment à des prix prohibitifs, entre 3.000 et 20.000 Francs CFA soit entre 4 et 31 euros. A titre de comparaison, une place pour un match hors compétition du Cameroun ou une rencontre de Ligue des champions africaine coûte 1,5 euro en tribune populaire.
"Après pour protéger cette compétition et faire en sorte qu’elle soit attrayante et soit regardée à la télévision… Déjà les stades sont vides. Ce n’est pas à cause des jauges car il n’y en a pas pour 150 personnes, a encore pesté Jérôme Rothen sur RMC. Ce qui est sûr c’est que les gens doivent être vaccinés mais quand tu sais avant la compétition que les places sont chères et que seuls 7% de la population sont vaccinés, c’est un peu du foutage de gueule. Cela va dans le sens, en effet que l’on ne respecte pas assez cette CAN. Même les organisateurs ne respectent pas assez cette Coupe d’Afrique."
Le Covid-19 et sa gestion posent problème
Outre le prix des places, la crise sanitaire a clairement eu un impact sur la fréquentation des stades pendant la CAN 2022. Au Cameroun, où seulement près de 7% d’adultes sont vaccinés, les organisateurs ont réclamé une preuve de vaccination pour assister aux matchs ainsi qu’un test négatif de moins de 48h. Pour les joueurs engagés aussi, la question sanitaire est devenue un enjeu majeur du tournoi.

En plus des tests réguliers, et parfois usants pour les internationaux, apparaît aussi le risque de manquer un match décisif. Adversaire du Cap-Vert ce jeudi (20h) lors de la deuxième journée des poules, le Burkina Faso devra se passer de quatre membres de l’équipe, dont le capitaine Bertrand Traoré, après leur test positif au Covid-19. Des examens qui font suite à de premiers ennuis avant le duel contre le pays hôte. La semaine passée, le groupe burkinabè s’était plaint des conditions dans lesquelles s’étaient déroulées ses tests anti-Covid, allant même jusqu’à suspecter des malversations.
"Une équipe médicale s'est pointée à notre hôtel pour des tests, a raconté l’adjoint du sélectionneur du Burkina Faso à la veille de défier le Cameroun. Quand on a cherché à comprendre qui les avait envoyés, la CAF nous a dit clairement que ce n'était pas eux qui les avaient envoyés à l'équipe, nous avons refusé des faire les tests."
Le foot gabonais déjà en crise
Fragilisé par les absences de Pierre-Emerick Aubameyang et Mario Lemina, le Gabon est pourtant parvenu à gagner son premier match de la Coupe d’Afrique face aux Comores (1-0). Alors que l’ambiance aurait dû être joyeuse, le groupe du sélectionneur Patrice Neveu a refusé l’accès au vestiaire au ministre des Sports du Gabon.
La cause? Les joueurs réclament le paiement de leurs primes pour la compétition et ont même brièvement fait grève pendant leur préparation à Dubaï. Des primes qui auraient été en grande partie volées, selon le membre du gouvernement. Là encore, le tournoi commence à peine qu’une délégation engagée se retrouve dans l’œil du cyclone.
Le spectacle pas (encore) au rendez-vous
La première journée de la CAN 2022 s’est achevée mercredi avec la victoire de la Côte d’Ivoire contre la Guinée équatoriale (1-0). Cité parmi les favoris pour le titre, le groupe entraîné par le Français Patrice Beaumelle a bataillé pour l’emporter malgré un but rapide de Max-Alain Gradel. Une performance des Eléphants à l’image de des prestations signées par plusieurs grands noms du football africain pour leur entrée en lice.
Avec seulement 12 buts en 12 matchs, le spectacle n’a malheureusement pas été fantastique. Seul le match d’ouverture entre le Cameroun et le Burkina Faso a vu plus d’une réalisation. Et encore, Vincent Aboubakar a offert la victoire aux Lions Indomptables... sur deux penalties. Neuf rencontres se sont conclues sur un score de 1-0 et on compte déjà deux résultats nuls sans aucun but.
Plusieurs grandes nations du continent africain ont déçu pour leur premier match. C’est notamment le cas de l’Egypte, avec qui Mohamed Salah n’a pas forcément brillé contre le Nigeria (0-1). Idem pour le Sénégal, qui s’en est remis à un penalty de Sadio Mané au bout du temps additionnel pour battre le Zimbabwe (1-0). Etincelante en 2019, la sélection algérienne a peiné contre la Sierra Leone (0-0) et les partenaires de Riyad Mahrez ont mal entamé la défense de leur titre.
"Il n’y a personne dans le stade, donc déjà cela ne donne pas envie de regarder les matchs, a regretté Jérôme Rothen. Je me mets aussi à la place des joueurs. Avec le climat différent de l’Europe, Djamel Belmadi donc le sélectionneur du tenant du titre en parlait, forcément cela joue sur les organismes, cela joue sur le rythme des matchs où on voit en effet beaucoup d’erreurs techniques et un manque de rythme. Tout cela résumé fait que pour l’instant, c’est une parodie du football."
Forcément la préparation tronquée des joueurs, libérés quelques jours seulement par leurs clubs, a nui à la qualité du spectacle. Idem pour les conditions météo, plus chaudes qu’en Europe ou au Maghreb en cette période de l’année. Jérôme Rothen voit également l’état des terrains comme un facteur du jeu proposé lors de cette CAN.
"Je ne parle même pas de la qualité des matchs, je parle juste de l’état du terrain, a encore estimé le membre de la Dream Team RMC Sport. Comment on peut voir des terrains comme ceux que l’on a vus mardi pour l’Algérie par exemple. Oui, ils ont fait 0-0 contre la Sierra Leone. Mais n’empêche que, je suis désolé, jouer un match de football comme cela et l’un des premiers matchs de la Coupe d’Afrique sur un terrain avec un état comme ça. Imaginez dans quatre matchs." Le football africain manque pour l'instant l’opportunité de montrer un beau visage au reste du monde. Mais la donne pourrait encore changer dans les prochaines semaines et notamment lors de la phase finale de cette CAN 2022.