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"Trop frêle", "pas le niveau pour jouer en réserve à Bordeaux"… Comment Jules Koundé a retourné l’opinion pour s’imposer au très haut niveau avec les Bleus

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A 24 ans, le défenseur du Barça est en train de s’imposer avec l’équipe de France au poste de latéral droit. A l’image de son début de Mondial avec les Bleus, la carrière de Jules Koundé a été longtemps soumise à de nombreuses interrogations sur son niveau de jeu. A chaque fois, le joueur formé aux Girondins de Bordeaux a su déjouer les pronostics et s’imposer.

Son dernier match contre l’Angleterre est probablement le symbole de sa carrière. Lorsque le niveau s’élève, Jules Koundé ne déçoit jamais. Mieux, on aurait presque tendance à penser que le Girondin se nourrit des critiques pour mettre tout le monde d’accord. "C’est vrai que, que ça soit depuis le centre de formation à aujourd’hui, il y a toujours eu des obstacles, confie-t-il en conférence de presse. Je suis très fier. Je réalise la chance que j’ai de pouvoir disputer une demi-finale. J’espère que ça va continuer encore longtemps."

Koundé n’a jamais été la comète que l’on voyait éclore à Bordeaux. "Il ne va pas y arriver, il est trop frêle", pouvait-on entendre chez certains de ses éducateurs. Les doutes ont toujours accompagné le parcours de Koundé. "Ce n’est pas le joueur qu’on remarque le plus mais on remarque quand il n’est pas là, analyse Patrick Battiston le responsable du centre de formation des Girondins de Bordeaux. Ce n’est pas un monstre athlétique (il mesure 1,78m, ndlr), ce qui a été un frein par rapport à son évolution mais il a une super vision du jeu, un grand timing. Je l’avais fait dépanner une ou deux fois sur le poste de latéral droit en lui disant que ça pouvait être une corde à son arc pour s’imposer au haut niveau."

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De gros doutes sur ses capacités physiques 

Lorsqu’il débarque de son petit club de La Brède, au sud de la Gironde, ils sont peu à croire à un destin professionnel. "Un éducateur de son ancien club nous avait dit : 'je ne comprends pas qu’il puisse jouer avec la réserve et s’entrainer avec les pros', poursuit Battiston. Mais il n’y a pas de limite à avoir et Jules a compris ça." Les Girondins ont même songé à le céder à Pau pendant un temps. "Mais il était au-dessus du lot sur le terrain à Bordeaux malgré les doutes qui l’entouraient, confie Alexandre Poirier, fondateur du site Formation FCGB. Jules a d’ailleurs toujours été capitaine en U17, U19 et avec la réserve. Techniquement il avait un truc en plus. C’est physiquement qu’il fallait qu’il passe un cap."

Pendant 14 mois, Koundé est intégré aux entrainements des pros avec les Girondins. Sans avoir sa chance. C’est Jocelyn Gourvennec qui lui fait disputer ses premières minutes en professionnel en janvier 2018 à 19 ans. Et lui aussi, avec la tentation de le décaler au poste de latéral droit. "C’est un garçon qui avait besoin de beaucoup s’entraîner, détaille l’ancien entraineur bordelais qui l’a retrouvé avec le LOSC quand Koundé jouait au FC Séville. Il a fait beaucoup d’entraînements avec nous avant de s’imposer. C’était pour moi l’évidence qu’il allait un jour s’imposer. Qu’il s’impose aussi vite - non pas à Bordeaux, mais ensuite à Séville, puis en équipe de France - c’est plus ce timing assez court qui est impressionnant. Et pas le fait qu’il soit là aujourd’hui, un joueur important en équipe de France."

"Quand il a fallu jouer à droite, je ne l’ai jamais fait à reculons"

"Ce n’est pas une surprise parce que le potentiel était là, c’est un garçon très intelligent, très structuré et très mature." En équipe de France aussi, les critiques ont été présentes. Une prestation décevante à l’Euro 2021 contre le Portugal à un poste de latéral droit auquel il ne joue quasiment pas en club. Mais Koundé n’a rien lâché et Didier Deschamps a échangé avec le nouveau défenseur du Barça sur son envie de continuer à l’utiliser latéral droit pendant la Coupe du monde alors qu’il jouait dans l’axe droit d’une défense à trois depuis la fin de l’Euro.

"C’est important de savoir quel rôle on va être amené à avoir, détaillait-il avant d’affronter la Tunisie. Je n’ai pas eu de réticence. Quand il a fallu jouer à droite, je ne l’ai jamais fait à reculons bien que mes performances n’aient pas été très bonnes à ce poste-là." Certaines critiques, chez les Bleus ou en début de saison au Barça, jugées injustes, ont pu l’affecter.  "Mais il est bien entouré, il reste fidèle à ce qu’il est, termine Patrick Battiston. C’est un garçon posé qui ne se laisse pas perturber parce qu’il se dit sur lui et c’est une qualité importante. Cette humilité lui permet d’analyser tout ce qu’il se passe autour de lui. Il est convaincu, il sait ce qu’il veut et il croit en lui." Dans la vie du groupe France aussi, le discret Jules Koundé est en train de se faire une place de plus en plus importante et de devenir un joueur qui compte. Le reflet d’une carrière parfois chaotique menée avec brio.

Nicolas Paolorsi, à Bordeaux