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Incidents au Stade de France: l'UEFA et les autorités françaises pointées du doigt... ce qu'il faut retenir du rapport indépendant sur Liverpool-Real

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Plus de huit mois après la finale de Ligue des champions entre Liverpool et le Real Madrid, qui avait donné lieu à des scènes de chaos autour du Stade de France, un rapport indépendant publié ce lundi dénonce le mode opératoire de la police française le 28 mai 2022, ainsi que la responsabilité de l'UEFA.

Qui a commandé ce rapport ?

Bien qu’indépendant, ce rapport a été demandé par l’UEFA juste après les évènements de la finale de la Ligue des champions entre Liverpool et le Real Madrid, le 28 mai 2022. Le but était de revenir sur l’organisation catastrophique de l'événement, qui a notamment entraîné le retard du coup d’envoi de la rencontre. Cette enquête a été menée pendant huit mois par un panel de juristes, d’universitaires et de représentants des associations de supporters.

Qui est visé ?

Le rapport, dont Le Monde a pu prendre connaissance ce lundi, conclut que la responsabilité est à mettre au crédit de l’UEFA, qui, "en tant que propriétaire de l'événement, porte la responsabilité première des échecs qui ont quasiment mené au désastre". Au-delà de l'instance européenne, ce sont surtout les pouvoirs publics français qui sont pointés du doigt. Ce dernier démontre également la mauvaise réaction des forces de sécurité françaises dans la mise en danger de milliers de supporters britanniques et espagnols, menacés d’écrasement à plusieurs reprises, agressés par des bandes de délinquants aux abords du stade et aspergés de gaz par les forces de l’ordre.

Que dit le rapport ?

De nombreux points sont abordés pour détailler et comprendre le déroulé des évènements du 28 mai dernier. Selon le panel, tout a commencé par la "menace hooligan" fantasmée par les autorités, qui a conduit à un enchaînement d’erreurs d’appréciation qui avaient la volonté d'éviter le précédent entre l’Angleterre et la Russie à Marseille lors de l’Euro 2016.

La soirée a également été marquée par la fameuse affaire des faux-billets qui ont entraîné les déclarations fracassantes de Gérald Darmanin. Le ministre de l’Intérieur estimait que "35.000 supporters" étaient munis de billets falsifiés ou dépourvus de billet pour assister à la finale de Ligue des champions. S'appuyant sur les chiffres de l’UEFA ("2.589 présentations de billets avec des codes QR inconnus"), le panel n’a trouvé aucune trace de cette "fraude massive et industrielle". Il estime que "le problème des faux billets a été exagéré" et "que les parties prenantes qui ont affirmé ces chiffres, notamment les ministres, la préfecture de police, l’UEFA et la FFF ont agi de manière irresponsable" afin de "s’exonérer de la responsabilité des défaillances".

Mais comment expliquer le chaos qui a suivi ? Selon l’enquête, les problèmes d’accès au Stade de France, notamment en raison de la grève sur le RER B, ont accéléré le risque de piétinement sur le chemin menant à l’enceinte dionysienne. "J’étais certain que les gens seraient écrasés à mort", écrit notamment un supporter anglais dans l’un des 700 courriers sélectionnés par le panel sur 8.500 contributions écrites qui lui ont été adressées.

Le panel a également conclu que les agressions aux abords du stade ont débuté "dès le début de l’après-midi". "Aucune force de police" n’était présente sur place malgré "une situation peu claire, chaotique [...] et dangereuse". Afin d’éviter l’entrée de personnes sans billet, les portes d’accès du Stade de France ont été fermées vers 18h45. De nombreux fans ont alors été piégés entre les grilles et leurs agresseurs. "Au cours de toutes mes années passées à assister à des matchs de football, je ne me suis jamais senti aussi peu en sécurité et vulnérable", ont indiqué des fans espagnols au panel. Face à la situation, les forces de l’ordre ont utilisé massivement des gaz lacrymogènes, "des armes qui n’ont pas leur place dans un festival de football", tel qu’est la finale de la C1.

L’après-match a été également tendu. Face au risque d’intrusion, des policiers ont été déployés sur la pelouse. Mais à l’extérieur du stade, les agressions de supporters ont repris. Ted Morris, le président de l’association des supporters handicapés de Liverpool, se souvient d’une "expérience terrifiante […], 400 mètres d’enfer avec tout le monde qui court pour sauver sa vie" et "pas un seul policier".

Enfin, le panel indépendant s’alarme de la suppression "automatique" des "enregistrements des 260 caméras du Stade de France" une semaine après cette sombre soirée du 28 mai 2022. "La direction du Stade de France n’a pris aucune mesure pour assurer la conservation, et personne d’autre – y compris les autorités françaises, l’UEFA ou la FFF – ne leur a demandé de conserver les images", écrit le panel.

Quelles conséquences après ce rapport ?

Au terme de ce réquisitoire, le panel formule "respectueusement" vingt et une recommandations, parmi lesquelles la nécessité pour les ministères de l’Intérieur et des Sports français de "réviser leur modèle de gestion" des événements sportifs ou de déployer les "forces anti émeutes (…) de manière exclusivement proportionnelle." Une sorte d’avertissement, alors que la France doit accueillir la Coupe du monde de rugby à l’automne 2023, mais surtout les Jeux olympiques à l’été 2024.

Liverpool dénonce la fuite du rapport

Quelques heures après la publication du rapport, le club a publié un communiqué cinglant dans la soirée de lundi. "Il est extrêmement décevant qu'un rapport d'une telle importance pour la vie et la sécurité future des supporters de football, soit divulgué et publié de cette manière, ont pesté les Reds. Cela fait plus de huit mois de travail par le panel indépendant et il est juste et approprié de publier le contenu du rapport à nos partisans de manière appropriée. Nous attendrons de recevoir une copie du rapport et de le digérer soigneusement avant de faire d'autres commentaires."

AS