RMC Sport

Le grand dossier RMC Sport (partie 7) - Le retour au Gil Vicente de Luis Campos

placeholder video
DOSSIER RMC Sport - Après la double désillusion de Setúbal et Varzim, Luís Campos retrouve le Gil Vicente au cours de la saison 2003-2004. Une opération de survie réussie qui lui vaudra la promesse d’un grand projet.

A Varzim, Rogério Gonçalves prend le relais de Luís Campos. La saison 2003-2004 démarre et Campos attend. Mais il ne chôme pas. Il voyage, mange des stages. En octobre 2003, une rumeur l’envoie à Paços de Ferreira. Le mois suivant, Record révèle qu’il a été invité par Bordeaux "pour intégrer l’équipe technique emmenée par Michel Pavon". Quelques temps auparavant, le Portugais avait effectué un séjour aux côtés d’Elie Baup chez les Girondins, qui aimeraient maintenant lui proposer un poste d’adjoint, "d’entraîneur de terrain", comme celui qu’occupe Carlos Queiroz à Manchester United.

Au cours de ce mois de novembre, Luís Campos reçoit surtout le coup de fil d’un ex. Gil Vicente est au plus mal. Il vient de se faire humilier en Coupe par le modeste Sanjoanense. Ruca, qui fut son adjoint, a été propulsé au poste d’entraîneur suite aux mauvais résultats de Mário Reis mais ça ne colle pas. L’équipe de Barcelos est au bord de la relégation. Même si le président Magalhães n’est plus là, recoller les morceaux n’est pas si facile. Luís et le Gil ont un litige depuis leur rupture. Une histoire de dette fiscale (75.000 euros, tout de même) qui doit se décider au tribunal. Une embrouille dont a hérité le nouveau président, Abílio Martins. L’affaire est mise entre les mains de leurs avocats et le 25 novembre 2003, Luís Campos est officiellement (et une fois encore) le nouvel entraîneur du Gil Vicente FC. "Je n’ai pas peur de l’avenir et je vais faire en sorte que cette équipe joue bien." Au diable le passé, Luís veut regarder devant.

Ça commence surtout par faire mal au derrière. Par une fessée (1-4) contre Porto adressée par son pote Mourinho. Campos demande "plus d’agressivité" à ses joueurs. Il a du taf. Comme il le dit lui-même, Mario Reis et lui ne partagent pas franchement "le même style". Alors à quand un Gil à son image? "J’aimerais que ce soit demain mais le magicien ce n’est pas moi, mais Deco", sourit-il à la presse.

Face au Nacional, le spectacle est assuré. Un 4-4 qui lui fait dire que son équipe est "sur le bon chemin". C’est carrément l’autoroute du bonheur. Bientôt six matchs sans défaite. LC se fait plaisir: défense à trois, à quatre ; deux milieux def, puis un ; et une constante : un jeu offensif avec une base de trois attaquants. Avant d’affronter les Panteras du Boavista, il s’amuse en conférence de presse: "Normalement, c’est difficile pour un coq de donner un coup de bec à une panthère mais nous sommes debout, crête dressée". Il va les manger 3-0. Au mercato d’hiver, il procède à plusieurs retouches, surtout en attaque. Campos supervise (déjà) beaucoup de joueurs et en met pas mal à l’essai.

"Un entraîneur petit dans un club sans grande dimension"

A mi-saison, les Barcelenses sont 11es de Liga. Les dirigeants du club entreprennent un vaste projet de développement du club – qui attend la livraison de son nouveau stade – visant à le stabiliser dans l’élite. A sa tête, Luís Campos à qui ses patrons prévoient de faire signer une rallonge de trois ans (autant dire, une éternité dans la réalité d’alors du foot portugais).

Côté terrain, après la belle séquence de fin d’année, les Coqs déchantent. Deux revers contre le Rio Ave et Paços. La victoire face à Braga (1-0) n’est pas plus convaincante que ça. Jesualdo accuse le Gil d’antijeu, comme António Sousa quelques matchs auparavant. Encore un nul contre l’Estrela da Amadora (1-1), avant la venue du Sporting. "Nous avons la claire intention de gagner, d’imposer notre football", assure Campos qui étale sa philosophie devant les journalistes: "Quand on joue en mettant la pression, il n’y a pas la nécessité d’un marquage strict. Un latéral ou un milieu peuvent combler. Si on ne pense qu’à défendre, on est déjà à mi-chemin de la défaite."

Une posture qui plaît à son confrère et adversaire. L’entraîneur des Lions s’appelle Fernando Santos. L’actuel sélectionneur du Portugal est très élogieux à l’égard de l’approche de son adversaire: "Luís Campos n’est pas basé sur le contre, même s’il joue en attaque rapide. Mais l’attaque rapide et le contre-attaque sont des choses différentes. L’une suppose une attitude essentiellement défensive quand l’autre transforme rapidement les actions défensives en offensives." Santos dont l’équipe jouera un long moment en infériorité numérique concède le 1-1.

Face à Leiria, le Gil ne prend pas plus d’un point. Et pourtant, il menait 2-0 jusqu’à dix minutes de la fin. "Mes grands-parents disaient déjà qu’un match dure jusqu’à la fin et ils avaient raison", ricane Campos dont la formation fait du surplace. Sa frustration grandit. Et se transforme en colère face au Benfica. Il est (encore) expédié en tribunes. Les Aigles s’imposent 2-1 à Barcelos. Beaucoup d’occasions ratées pour les Galos et Campos ne rate pas celle de voler dans les plumes de l’arbitre: "C’est facile d’expulser Luís Campos. Je suis un entraîneur petit dans un club sans grande dimension. J’ai déjà vu des collègues avoir des attitudes bien pires sans que rien ne leur arrive." Silenzio stampa, comme à Setúbal. Le groupe se remobilise à Guimarães (0-2) avant de s’incliner dans un autre duel de mal classés contre l’Académica (0-1). Avant d’aller à Belém, et alors qu’il reste sept journées à disputer, LC rompt le silence: "Nous allons à ce match avec la ferme intention de ramener les trois points et de donner un dernier coup de hache dans la course au maintien." Le prof a parlé trop vite. Il aligne une surprenante défense à trois et s’incline (0-2).

Le jour où il battu Mourinho

Le 3 avril 2004 reste comme l’une des dates les plus marquantes de la carrière d’entraîneur de l’actuel conseiller sportif du Paris SG. Son Gil Vicente reçoit le FC Porto de son ami José Mourinho. Les Dragons vainqueurs de la C3 lors de la saison précédente sont sur le chemin d’une triomphe en C1 (en plus d’un nouveau championnat). Ces retrouvailles ont lieu quatre jours avant le quart retour du Mou face à l’OL (qui se soldera par un 2-2 ; l’aller ayant été remporté 2-0 par Porto). Comme à son habitude, José fait tourner. Mais Campos n’a pas de quoi se réjouir. Cinq de ses éléments sont indisponibles et le duel est délocalisé à Guimarães – dont la capacité du stade est supérieure.

"Le match aurait pu être plus facile à Barcelos mais, avec le FC Porto, même en Chine c’est difficile, lance Campos. J’aimerais que notre samedi soit une nuit magnifique pour nous." Elle va l’être. Le Gil s’impose 2-0 et inflige la première défaite de la saison à Porto en Liga. Campos est alors le seul entraîneur à avoir battu le Mou sur l’exercice 2003-2004 avec Ancelotti (Milan) et Queiroz (Real Madrid). Cette confrontation sera la cinquième et la dernière entre les deux ex-étudiants de l’ISEF. Et le seul succès pour Luís face à son José. "Quand je me suis réveillé, je sentais que ça allait être un bon jour, sourit le Esposendense. Au milieu de l’après-midi, j’ai même envoyé un message à ma femme pour lui dire de jouer au loto foot."

La fin de saison est toutefois confuse. A un mois du dénouement, Campos bat le Moreirense (1-0). Le GVFC prépare l’avenir et ressort son fameux dessein. "Maintenant que la question du maintien est résolue, le projet pour le futur du Gil Vicente sera présenté cette semaine", annonce Campos. Sauf que le maintien n’est pas encore assuré… Le Boavista et le Marítimo repoussent la décision à l’ultime journée. Un couac suivi d’une autre annonce, celle de la prolongation de l’entraîneur. Campos signe un contrat de trois ans, juste avant le match de la survie, contre le Beira-Mar. La tension est énorme. Le souvenir de la fatale 34e journée de Varzim lors de la précédente saison est encore là. Mais les Gilistas ne tremblent pas et claquent un 3-0. "Une juste conclusion." Cette fois, Luís Campos peut respirer. Mais pas pour longtemps…

>>> RETROUVEZ TOUT NOTRE DOSSIER LUIS CAMPOS, AVEC TOUS LES EPISODES, EN CLIQUANT SUR CE LIEN

Nicolas Vilas