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Mondiaux de judo: Agbégnénou, un bronze qui énerve et qui motive

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Clarisse Agbégnénou n’a pas conquis un septième titre mondial ce mardi à Abu Dhabi. Le judo était là, le physique et le mental aussi. Une rature en quart de finale l’a renvoyé vers une médaille de bronze. Enervée contre elle-même mais rassurée sur ses capacités, elle semble quasi-prête pour les JO.

A 21 ans, Joanne Van Lieshout est une baby Clarisse Agbégnénou. La Néerlandaise au chouchou rouge est sacrée championne du monde des -63kg au même âge que la Française en 2014. Aucun doute qu’elle s’est biberonnée aux vidéos de l’implacable Tricolore. Suivra-t-elle la même trajectoire? Sur la troisième marche du podium, "Gnougnou", 31 ans, fourbit déjà sa vengeance pour le 30 juillet 2024. Elle vient d’assurer son 9e podium mondial, mais le premier en bronze.

"Il y a plein de feelings", résume Agbégnénou. "Il y a une déception, je n’ai pas célébré. Avoir une médaille mondiale ce n’est pas rien. J’ai montré que j’étais toujours sur un podium mondial." Dès la matinée, on s’imaginait une fin en or. Une entrée en matière de grande qualité. D’abord pulvériser la Polonaise sur un grand fauchage extérieur, puis éteindre le Japonaise Horikawa sur un mouvement de hanche terminé au sol.

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"J'ai fait une erreur stratégique"

"Quand je regarde le début de ma compétition je me dis que je suis prête, je me sens forte. J’ai un corps qui redevient comme avant", apprécie-t-elle. La machine de destruction a connu un raté en quart de finale. La Canadienne Catherine Beauchemin-Pinard est numéro une mondiale. Elle n’a pas un grand titre mais c’est un petit casse-tête avec ses appuis bas et son sens tactique au rasoir. Une erreur d’appui de la Française, une inspiration de CBP et un waza-ari de retard. Une situation rarissime pour la judoka de Champigny-sur-Marne.

Rarement menée dans sa carrière, elle avoue s’être un peu trompée dans la tactique. "J’étais très énervée envers moi. J’ai laissé passer la demie. C’était de ma faute. J’ai fait une erreur stratégique. A moi de marquer avant elle, d’aller tout chercher. Il n’y a pas de stratégie à avoir il faut les atomiser dès le début. J’ai le physique pour. Je me dis que c’est dommage parce que je sors avec du bronze. Je reste sur ce goût amer."

Elle ajoute: "On peut refaire le quart de finale?" Non. Trop tard. Elle se découvre une nouvelle piste de travail. Ce revers l’a fait revenir énervée en salle d’échauffement. D’après son entraîneur Ludovic Delacotte, cet énervement n’était peut-être pas totalement évacué au moment d’entrer dans les repêchages et même au moment de jouer le bronze face à la Slovène Leski, sortie aux pénalités.

Un léger problème de timing et de distance à régler

"La journée était riche d’enseignements" pour Ludovic Delacotte. "J’ai aimé la voir à nouveau à 100% physiquement, tenir la stratégie contre la japonaise. Alors que c’est ce que j’ai moins bien aimé face à la Canadienne." Un bilan de journée où il n’y a aucune raison de paniquer. Hormis la Japonaise Takaichi, toutes les filles des JO seront là. Agbégnénou a retrouvé son impact d’avant grossesse. Elle s’est ouvert des solutions techniques comme son grand fauchage intérieur. Reste un léger problème de timing et de distance pour conclure ses gestes.

"Je suis en colère. Avec la forme que j’ai aujourd’hui, je dois ramener l’or. Je me vois au-dessus quand je regarde la finale. C’est moi qui ai laissé passer la finale. Je n’en laisserai pas passer deux", promet-elle. Elle répète le mot d’intransigeance, convaincue qu’elle s’est mise sur le bon chemin avec les bons choix. Enervée oui, mais certaine que sa domination aux JO sera là. "Ce bronze me conforte si je suis comme ça dans deux mois, avec la concentration des Jeux je serai intouchable. Je me rapproche du but. Oui je perds le dossard rouge de championne du monde mais je vais garder le dossard doré de championne olympique. Je vais le garder encore quatre ans!" Foi de "Gnougnou".

Aujourd’hui, elle n’a pas rejoint Ryoko Tamura et Tong Wen avec sept couronnes mondiales. "Je ne vais pas vous dire que je suis content qu’elle soit troisième, ce serait stupide", prévient son coach. "Pourtant ça ne me déplaît pas, ça l’a piquée." Après son raté à l’Euro 2023 (7e), elle avait vite remis les pendules à l’heure à Paris. Agbégnénou ne tend pas deux fois la joue d’affilée.

Morgan Maury, à Abu Dhabi