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Guirado : "Remettre en question le système ne va rien nous apporter"

Guilhem Guirado

Guilhem Guirado - AFP

Guilhem Guirado, talonneur de Toulon et du XV de France, se garde bien d’accabler son sélectionneur, Philippe Saint-André, ainsi que le système du rugby français. Pour lui, les principaux responsables de l’échec des Bleus à la Coupe du monde sont les joueurs. Dont il attend une réponse.

Guilhem, quel souvenir gardez-vous de la Coupe du monde ?

Il y en a beaucoup, avec notamment cette période de préparation qui a été très longue. C’était du bon travail. Et puis, il y a eu les premiers matches. On a réussi à bien rentrer dans la compétition. Mais on a vu que sur les matches couperets face à l’Irlande et la Nouvelle-Zélande, on a manqué de précision. On était derrière ces grosses équipes. Si jamais on est rappelé en équipe de France, il faudra tout faire pour élever notre niveau pour qu’on puisse rivaliser avec les grandes nations du rugby mondial.

Face aux Blacks, y avez-vous cru ?

On y croyait toute la semaine, sérieusement. Quand on a pris deux ou trois essais, ça commençait à être dur. On a cru qu’on allait recoller au score quand on est revenu un peu dans le match. Mais ce carton jaune (de Louis Picamoles, ndlr) et la pénalité nous ont fait du mal. Juste derrière, ils vont en touche et marquent un essai. Le match a été plié à ce moment. On s’est préparé pour y croire. Durant la première mi-temps, quelques signes nous encourageaient mais on a subi de la 1ere à la 80e minute. On n’a jamais pu les agresser ou ralentir les ballons. Ça a été une terrible conséquence et le score est très lourd.

Pensez-vous qu’il faille écouter les joueurs pour qu’ils partagent leur expérience et aident le rugby français ?

Pourquoi pas ? Mais on a quand même un emploi du temps assez chargé, ça va être compliqué. Il faut en tirer un bilan, savoir pourquoi ça n’a pas été et faire en sorte que ça aille bien dès le prochain Tournoi des VI Nations. Il fait le gagner parce qu’on en a besoin.

Avez-vous le sentiment que les joueurs ne sont pas assez écoutés ?

On est écoutés mais les entraîneurs donnent leurs consignes et c’est normal. Sur les trames de ce qu’on travaille, il y a 60% de boulot fait la semaine et le reste est une part d’initiative et de destin. Tout n’est pas écrit. Les joueurs doivent écrire leur histoire. L’emploi du temps est assez complexe et ne nous donnera pas assez de temps pour poser plusieurs questions.

Durant la Coupe du monde, les joueurs auriez-vous pu prendre plus d’influence ?

C’est un peu complexe comme question. Les entraîneurs font leur boulot. Le manager est là pour diriger l’équipe et on suit tous vers le même chemin. Par rapport à ce qu’ils nous ont proposé, on peut rectifier le tir et donner notre opinion. Mais on est 31 joueurs et si chacun donne son avis, ça devient l’anarchie et il faut savoir où il faut aller. Il faut de la communication et de la remise en question mais il ne faut pas que ce soit n’importe quoi.

« On est de simples joueurs et on ne peut pas se mêler de ces problèmes »

On pointe du doigt le rythme du Top 14 et les équipes qui font la part belle aux étrangers. Êtes-vous d’accord avec ça ?

On est de simples joueurs et on ne peut pas se mêler de ces problèmes. C’est à nos dirigeants de s’en occuper. Il y a beaucoup d’étrangers mais c’est le championnat qui veut ça notamment quand il faut remplacer des joueurs. Sur les premières journées, plusieurs jeunes ont eu l’occasion de jouer et c’est le plus important. J’espère que ça va continuer et que les clubs vont jouer ce rôle de formateur. Moi, j’ai commencé en 2007 quand la plupart des joueurs étaient en sélection et on a dû s’approprier un peu le vestiaire. Les années de Coupe du monde permettent à des jeunes d’intégrer le groupe pro comme le talonneur Camille Chat (Racing 92), qui a beaucoup joué.

Selon vous, Philippe Saint-André était-il l’homme de la situation à la tête du XV de France ? Avez-vous noté des failles dans son management ?

C’est assez délicat. Il m’a fait confiance et ça s’est plutôt bien passé. C’est trop facile de critiquer sur ça. Nous, les joueurs, avons été plus que responsables sur le terrain où nous n’avons pas été bons. On a plusieurs choses à se faire pardonner, j’espère que tous les joueurs en sont conscients. La meilleure des manières, c’est de répondre présent avec nos clubs.

Voulez-vous responsabiliser les joueurs plutôt que le staff ?

J’espère qu’on n’est pas dupe et qu’on est conscient qu’on est passé à travers sur ces deux derniers matches. C’est important de se remettre en question. On a pu le faire rapidement puisqu’on a bossé pour jouer contre Oyonnax. D’autres ont eu des vacances. Il y a deux manières de l’aborder. Ce qui est le plus important, c’est de savoir où on veut aller maintenant. Remettre en question tout le système et quatre ans de boulot, ça ne va rien nous apporter. Si on veut que le XV se donne les moyens de gagner le Tournoi des VI Nations, il faut se mettre au boulot dès maintenant et ne pas laisser la place au hasard.

Florent Germain, à Toulon