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TOUT COMPRENDRE - A quoi ressemble le nouveau projet de Super League ?

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La société à l’origine de la Super League cherche à révolutionner le football continental et a lancé cette semaine une nouvelle mouture de son projet pour concurrencer les compétitions de l’UEFA.

Le football est passé tout près d’une incroyable révolution avec la création de la Super League le 18 avril 2021. Mais en seulement 48 heures, le projet d’une ligue fermée porté par douze clubs mythiques s’est effondré face à la grogne des supporters et l'opposition de certains dirigeants de puissants clubs. Après le retrait des six représentants anglais, des deux clubs de Milan et de l’Atlético de Madrid, les frondeurs ont semblé perdre le combat face à l’UEFA.

Mais après presque deux ans à peaufiner leur projet et à batailler devant les tribunaux, la société A22 Sports Management a présenté ce jeudi une nouvelle version de la Super League.

• Qui participera à cette (potentielle) Super League ?

En avril 2021, les fans européens s’étaient insurgés contre le manque de rotation parmi les participants de la Super League. L’entreprise à l’origine du projet a donc écouté les contestations des supporters ainsi que d’une cinquantaine de clubs et a revu le système de qualification pour la compétition. Terminé le projet de championnat avec seulement 20 équipes dont 15 automatiquement qualifiées.

"Après avoir parlé à plusieurs clubs, le constat est clair, tout le monde veut être traité de la même manière, a répondu Anas Laghrari, cofondateur de la société A22 lors de son passage sur RMC dans l’émission l'After Foot ce jeudi. Tout le monde sera traité de la même manière. Personne n’aura de privilège. Ce sera une compétition complètement ouverte. Les critères de qualification sur la base du mérite sportif doivent être définis. Personne n’aura de privilège ni de traitement de faveur."

Contrairement à la première version où les 12 clubs fondateurs (Real Madrid, Barça, Atlético de Madrid, Inter Milan, AC Milan, Juventus Turin, Manchester City, Manchester United, Arsenal, Liverpool, Chelsea et Tottenham) étaient automatiquement qualifiés, la Super League 2.0 ne prévoit aucun passe-droit.

En clair, c’est toujours sur la base des performances dans le championnat national que se jouera la qualification même si le processus exact (ni le nombre de places par pays) n’a pas encore été dévoilé par les organisateurs de la Super League.

• Quel format ?

Le format initial de la Super League prévoyait une sorte de grand championnat entre les participants avec des rencontres organisées en milieu de semaine. Répartis en deux poules de dix, les clubs devaient ainsi s’affronter sous la forme de matchs aller-retour avant une phase finale démarrant par les quarts de finale. Dans son nouveau projet, il y a du changement.

La Super League promet désormais une "compétition ouverte avec plusieurs divisions" et un total de 60 à 80 équipes. Le nouveau projet se veut donc plus ouvert et va permettre aux clubs d’affronter des adversaires d’un niveau, sur le papier, équivalent au leur. Encore une fois, sans préciser très clairement comment seront répartis les rencontres, la société A22 promet un minimum de 14 matchs par saison à chaque participant."

Après avoir présenté sa nouvelle version de la Super League, A22 Sports Management doit encore patienter pour le mettre en place, comme l’a confirmé Anas Laghrari auprès de RMC. L'avenir du projet demeure soumis à la décision que rendra cette année la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) sur la légalité des mécanismes de protection de l'UEFA face à la Super League et sur le monopole de l’instance continentale.

En décembre, l'avocat général de l'instance européenne a rendu un avis favorable à l'UEFA. Les conclusions de l'avocat général sont fréquemment suivies par les juges mais Anas Laghrari a fait preuve d’optimisme ce jeudi dans l’After Foot: "Une fois qu’on aura cette résolution, l’UEFA aura du souci à se faire." En attendant une décision de justice, la Super League 2.0 a lancé son opération séduction.

• Vers un nouveau fair-play financier?

L’émergence de clubs-états est souvent accompagnée de nombreuses critiques ces dernières années. Afin de convaincre une majorité de club de la viabilité de son nouveau projet, la Super League compte se diriger vers une plus grande équité financière. Les promoteurs insistent sur des "règles de viabilité strictes" afin de limiter les dépenses folles des équipes soutenues par des fonds souverains comme peuvent l’être le Paris Saint-Germain ou Manchester City.

"Je pense que tout le monde devrait être à l’abri d’une inflation incontrôlée qui vient du fait que quelqu’un peut se permettre de faire joujou avec un club de foot et perdre 400 millions d’euros par an et pourquoi pas deux milliards par an d’ailleurs en achetant tous les joueurs et en créant une inflation dans le système, a encore estimé Anas Laghrari auprès de RMC ce jeudi. On pense que c’est très mauvais d’avoir des gens qui perdent constamment de l’argent en opérant un club. Ce n’est pas bon car ça crée de l’inflation, parce que quand un club arrive, et qu’il a les moyens de perdre de l’argent, il crée de l’inflation pour d’autres clubs qui n’ont pas les moyens et qui malheureusement peuvent suivre et se retrouver dans des situations très délicates."

Par conséquent, et afin de tendre vers une plus grande équité entre les participants, la Super League appliquera des règles de viabilité financière assez strictes afin que les dépenses ne dépassent par les ressources générées par les clubs. De la même manière, A22 Sports Management a prévu d’introduire une sorte de plafond de dépenses: les équipes ne dépenseront qu'un pourcentage fixe de leurs recettes liées au football pour les salaires des joueurs et les transferts.

• Un calendrier encore plus chargé pour les joueurs ?

Avec des matchs en semaine, comme cela peut déjà être le cas pour la Ligue des champions ou la Ligue Europa, les footballeurs européens vont encore devoir jongler avec des calendriers bien remplis. Mais la nouvelle mouture de la Super League compte placer leur santé au cœur de la programmation. On trouve ainsi une volonté bien affirmée de préserver la santé des joueurs avec un calendrier moins chargé que sous la gouvernance de l’UEFA.

"La santé des joueurs doit être un élément clé pour déterminer le nombre de matchs chaque année, a ainsi assuré l’entreprise à l’initiative de la Super League parmi ses principes fondateurs. Le nombre de jours de matchs européens ne devrait pas dépasser celui des calendriers des compétitions actuelles. Les organisations de joueurs devraient être impliquées pour protéger la santé des joueurs et le dialogue social dans toute l'Union européenne devrait être encouragé."

• Les supporters vont-ils encore s'y opposer ?

En avril 2021, le projet de Super League s’était notamment écroulé à cause de la mobilisation des supporters. En Angleterre, où Manchester City avait été le premier à faire marche arrière, les fans avaient immédiatement manifesté pour exprimer leur opposition à cette ligue fermée. En ce début d’année 2023, et si comme l’explique la presse locale les équipes de Premier League ne sont pas encore certaines de participer à la Super League 2.0, A22 Sports Management espère séduire les fans de football. Pas question de créer une nouvelle compétition sans l’adhésion des supporters à qui on veut offrir "l’événement sportif le plus excitant au monde" car "les fans de football méritent les meilleurs matchs et la meilleure expérience".

Le promoteur promet désormais de "faciliter" la présence des fans dans les stades pour les matchs à l'extérieur avec l’obligation pour les clubs de développer leur stade afin d’apporter une meilleure expérience aux supporters en marge des matchs.

• Peut-on aussi imaginer une Super League féminine ?

Non, la V2 de la Super League ne prévoit pas d’organiser une compétition féminine en parallèle de la ligue masculine. Il n’en n’est pas fait mention parmi les principes du nouveau projet. Mais A22 Sports Management n’a pas oublié le football féminin qu’il faut continuer à développer en faisant grimper les budgets alloués aux compétitions actuelles. Cela passe donc nécessairement par une plus grande professionnalisation et un soin particulier apporté à la formation des joueuses.

De la même manière, et comme pour montrer sa volonté de faire profiter l’ensemble des acteurs du foot, la Super League a promis de reverser "un minimum de 400 millions d'euros par an dédiés à la solidarité avec le monde amateur, les clubs non-participants ainsi qu’aux causes sociales" soit plus du double des contributions actuelles des compétitions de clubs organisées par l’UEFA.

Jean-Guy Lebreton