Judo : "Me confronter à la nouvelle génération", Riner évoque son premier combat depuis les JO

Plein soleil sur Lisses (Essonne). Teddy Riner a le sourire, il vient de gagner une partie de ping-pong face à l’un de ses coéquipiers du PSG Judo. Depuis l’or par équipes et le bronze individuel à Tokyo, le géant n’a pas remis le judogi en compétition. Samedi à Villebon-sur-Yvette (Essonne), il va tenter de remporter le titre national pour son équipe du PSG. Riner a hâte d’en découdre, l’œil rivé sur Paris 2024, clap de fin de sa carrière. En attendant les premières sorties à l’étranger et probablement les Mondiaux cet automne, malgré un corps qui grince, il multiplie les stages à l’étranger.
Il parait que vous avez cassé une dent à votre coéquipière Romane Dicko?
Mardi on a fait un foot. Sur une action j’y vais pour mettre la tête. Elle met la tête au même moment. Tête contre tête un gros choc comme quand deux lourds s’affrontent (rires). Elle a senti une dent qui bougeait, dent fissurée. Les médecins ont dû lui retirer un morceau.
C’est votre retour à la compétition. Votre première sortie depuis les JO. Ca vous tenait à cœur?
Je suis un enfant du PSG judo, c’était mon club formateur, j’ai grandi ici. Aller chercher un titre avec eux, le plus beau des podiums, recréer l’histoire, ça me tient à cœur d’autant qu’on a un bon groupe. C’est faire une belle histoire.
Vous avez l’air en forme!
Il faut que je sois bon, il faut être prêt. Budapest, c’est bientôt. Le grand frère doit être bon. Je sais qu’à chaque fois on attend beaucoup de moi. Je dois répondre présent.
Il y a deux ans, le PSG termine deuxième en perdant dans le match pour le bronze contre un autre club parisien, l’AJA XXe. Et sur un tour précédent vous aviez perdu face à Joseph Terhec de Sucy Judo (pénalités).
C’est aussi ça les France par équipes, il y a parfois des petites erreurs, parfois ça nous échappe. On a un beau groupe homogène, de la jeunesse et de l’ancienneté. Je suis un peu le grand frère. On est à l’écoute les uns des autres. L’objectif c’est d’aller chercher le titre.
Ça vous démange de retrouver la compétition?
Après les différents stages que j’ai faits, à ce moment de ma carrière, j’ai envie. J’ai envie de reprendre, de me confronter. Je reviens d’un gros stage en Mongolie, j’ai envie de me bagarrer un petit peu, c’est cool. Cette compétition n’est qu’une étape. On y va step by step en vue de Paris 2024. Je le répète, j’ai envie, c’est cool.
Vous n’avez pas voulu reprendre plus tôt?
Non, c’est le bon moment. Il faut laisser le temps au temps. Ca fait 15 ans que je pratique à haut-niveau. Là j’ai envie, il y a une belle histoire à aller chercher avec le club, pourquoi pas le doublé masculins-féminins, c’est l’objectif. Ensuite, s’aligner au Grand Chelem de Budapest (10 juillet) et voir comment on se situe à l’adversité internationale, pour bien préparer les prochains championnats et surtout les JO 2024.
Qu’avez-vous fait depuis les JO à Tokyo. Contrairement à d’autres années post-JO, vous avez peu coupé ?
Je ne voulais pas monter trop en poids, j’avais envie de continuer, de garder cette dynamique que j’avais à Tokyo. Ce que je ne voulais pas , c’est refaire les mêmes erreurs que lors de l’olympiade précédente où je reste dans un cadre où je n’ai rien pour m’entraîner. Aujourd’hui à l’Insep, j’ai parfois 2-3 lourds. Et quand je dis ça je suis gentil, c’est un lourd par-ci un lourd par-là, c’est compliqué. Ce n’est pas comme ça que je pouvais préparer Paris 2024. C’est pour ça que j’ai pris la décision, une des plus importantes de ma carrière, d’aller m’entraîner aux quatre coins du monde, pour prendre les meilleurs. Quand je vois les résultats que j’ai sur les sorties de stage, je suis très content.
Vous êtes comme un judoka d’un petit pays, obligé de courir les stages car vous n’avez pas assez d’adversité chez vous.
Aujourd’hui c’est ça. Si je veux préparer Paris 2024, je dois faire comme certains petits pays, aller chercher l’opposition à l’étranger. C’est triste parce que la France est une grande nation du judo. C’est dommage.
Votre premier stage vous a emmené au Brésil, pays réputé pour son travail au sol, où vous avez travaillé avec des spécialistes de JJB (jujitsu brésilien).
J’ai appris beaucoup de choses: à avoir plus de mobilité au sol, un peu plus de techniques au sol. Le jujitsu-brésilien, tu as des techniques qui peuvent se mixer parfaitement avec le judo. Je continue de travailler sur ça. Si quand tu arrives au sol, tu commences à réfléchir comment retourner le type c’est trop tard, il faut des automatismes. Il ne faut pas réfléchir.
Vous revenez d’un stage en Mongolie...
J’ai bossé, je me suis beaucoup entraîné avec beaucoup de lourds. Le judo mongol c’est beaucoup de corps-à-corps, d’attaques incisives. C’était une autre opposition par rapport au Brésil. C’était un très bon stage. J’avais une quinzaine de lourds par séance au minimum;
Vous allez continuer à sortir en stage?
Prochain stage en Croatie puis en Espagne. Ce sont des stages olympiques où il y aura beaucoup de nations et de judokas. Pour cette saison, ça sera terminé.
Quelle est la suite de votre calendrier après Budapest?
J’avais entendu que des championnats d’Europe par équipe mixte étaient prévus en France avant les Mondiaux. La Fédération a choisi de ne pas envoyer l’équipe 1. Je vais aller sur les championnats du monde en octobre en Ouzbékistan.
Lors de votre 10e titre mondial en 2017 vous avez déclaré '10 c’est un bon chiffre, j’arrête là'. Vous avez changé d’avis en voulant aller aux Mondiaux 2022...
C’est toujours un bon chiffre. Pour préparer les JO, c’est bien de monter sur un championnat du monde deux ans avant et voir où on se situe. J’aime bien rester caché mais demain, si aux Mondiaux, il ne passe pas ce qu’il doit se passer… Je suis un combattant. J’aime gagner, aller au challenge, demain ça passe pas, je n’ai rien à regretter de ma carrière. Le point d’interrogation est toujours dans ma tête, aller voir où je suis encore. Je sais que c’est possible. Tâter le terrain et j’ai envie de me confronter, d’aller chercher cette nouvelle génération, les anciens aussi. C’est important de se remettre dans un petit cadre sous pression, en se disant ‘il y a quelque chose à aller gagner’. Je tiens aussi à aller chercher des points pour être bien classé lors du tirage au sort de Paris 2024.
Comment va votre corps? Quelques mois avant les JO, vous vous êtes blessé au genou...
Je n’ai pas tenu à aller sur certaines opérations. On a changé certaines choses qui me permettent de tenir. On va voir si ça tient. C’est de la prévention, beaucoup de kiné, beaucoup de renforcement pour aider les articulations, pas mal d’articulations aussi car les douleurs sont intenses. Je ne suis pas là à me plaindre. Le poids des années fait que mon corps est un peu plus fragile. Je garde le sourire et j’avance comme ça. J’adapte mes tactiques ma préparation physique aussi. Il y a des choses que je ne peux plus faire parce que ça inflamme. Quand ça réagit on essaye de modifier les choses.