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6 Nations 2025: Jalibert vs Smith, la soif de revanche, des chandelles… les clés du Crunch Angleterre-France

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Le XV de France se déplace ce samedi à Twickenham pour y défier l’Angleterre lors de la deuxième journée du Tournoi des 6 Nations 2025 (17h45). Deux ans après leur démonstration à Londres, les Bleus vont encore devoir sortir un gros match pour venir à bout d’Anglais très déterminés et revanchards pour ce Crunch.

Malgré trois déplacements dans le Tournoi des 6 Nations 2025, les joueurs du XV de France ont clairement affiché leurs ambitions: la victoire et si possible avec le Grand Chelem. Lassés des deuxièmes places, les partenaires d’Antoine Dupont voudront poursuivre leur belle série de victoires ce samedi à Twickenham (11h45) face à l’Angleterre.

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Contre leur meilleur ennemi les Bleus de Fabien Galthié vont pourtant devoir sortir le grand jeu dans un Crunch plus serré qu’il n’y paraît. Si la sélection tricolore part favorite contre son éternelle rivale, gare à l’excès de confiance. Surtout que certains secteurs risquent de faire basculer le choc en un éclair.

Jalibert contre les Smith

Revenu après une pige à 7 en 2024, le temps d’y décrocher l’or olympique, Antoine Dupont a affiché un superbe niveau contre le pays de Galles (43-0). Mais contrairement au duel face au XV du Poireau, le demi de mêlée sera privé de Romain Ntamack. Logiquement suspendu après son rouge de la semaine passée, l’ouvreur du Stade Toulousain laisse donc sa place au revenant Matthieu Jalibert.

La recomposition de cette paire, régulièrement utilisée pendant la précédente absence de Ntamack, est même apparue comme "une évidence" pour Fabien Galthié malgré la possibilité de replacer Thomas Ramos à l’ouverture face aux Anglais. Une belle confiance que l'ouvreur bordelais devra récompenser par un gros match.

"La titularisation de Matthieu est cohérente pour nous. Ça fait partie de son chemin", a estimé le sélectionneur des Bleus. "Il a plus de 30 sélections et un vécu important en équipe de France."

Côté tricolore, Fabien Galthié a donc fait dans le classique pour son animation offensive. En face, Steve Borthwick a choisi d’innover. Aligné en numéro 10 lors de la défaite en Irlande (27-22), Marcus Smith glisse à l’arrière contre la France. Une volonté du sélectionneur du XV de la Rose d’offrir plus de liberté à son créateur.

"Si vous regardez la façon dont Marcus joue, en particulier dans ces situations un peu désorganisées (les phases de relance), vous voyez à quel point il est dangereux", s’est ainsi justifié le technicien britannique. "Si vous lui donnez du temps et de l’espace, il peut faire mal à l’adversaire."

Marcus Smith avec Fin Smith lors d’un entraînement de l’Angleterre en novembre 2024
Marcus Smith avec Fin Smith lors d’un entraînement de l’Angleterre en novembre 2024 © Icon Sport

Marcus Smith placé comme un détonateur, l’Angleterre utilisera donc Fin Smith dans un rôle de régulateur. Champion avec Northampton la saison passée, l’ouvreur de 22 ans sera attendu au tournant pour cette affiche du Tournoi. Et pour cause, Fin Smith va connaître sa première titularisation avec le XV de la Rose contre la France. Aux Bleus de mettre en danger un néophyte qui suscite de nombreux espoirs outre-Manche.

"Fin n'a pas encore commencé un test-match pour l'Angleterre, mais je n'ai aucune inquiétude quant à son intégration pour Le Crunch. Il a montré avec Northampton - en les guidant pour remporter le titre la saison dernière - qu'il avait le caractère pour jouer les matchs", a analysé Sir Clive Woodward, sélectionneur anglais champion du monde en 2003, dans un édito pour le Daily Mail. "Je pensais que Marcus avait l'air perdu lors de la défaite contre l'Irlande à Dublin. Je pense qu'il a essayé de trop en faire."

Thomas Ramos et les Bleus vont voir 38 chandelles

En alignant Fin Smith à l’ouverture, l’Angleterre risque donc bien de se concentrer sur un aspect bien précis de ce Crunch: le jeu au pied. Si Fabien Galthié l’avait anticipé, et a confirmé jeudi que cela "n’impacterait pas la préparation" des Bleus, ça pourrait faire des ravages sur le terrain. Lors du choc de la première journée du Tournoi perdu en Irlande, les Anglais ont enchaîné les coups de pied avec 38 ballons joués de cette manière, soit le plus haut total devant les Irlandais (31) et un duo franco-écossais (28 ballons au pied).

Une stratégie mise en place à la fois pour casser le rythme du XV du Trèfle et aussi pour tenter de les pousser à la faute. Le demi de mêlée anglais, Alex Mitchell a utilisé son pied plus que tout autre joueur du Tournoi sur le premier week-end avec 13 ballons exploités dans ce domaine devant, notamment Marcus Smith (troisième avec 11 ballons joués au pied).

Et malheureusement pour la France, la défense de ces ballons aériens n’est pas vraiment le point fort des Bleus. Lors de la cruelle défaite contre l’Afrique du Sud (28-29) pendant le Mondial 2023, les Boks avaient usé et abusé de cette technique pour mettre les ailiers tricolores et Thomas Ramos en difficulté.

Le Gallois Tom Rogers et le Français Thomas Ramos sur un duel aérien dans le Tournoi des 6 Nations, le 31 janvier 2025
Le Gallois Tom Rogers et le Français Thomas Ramos sur un duel aérien dans le Tournoi des 6 Nations, le 31 janvier 2025 © Icon Sport

Samedi à Twickenham, les Anglais devraient essayer d’en faire autant. Surtout que, depuis la tournée de novembre, World Rugby a mis fin à la règle des 'escortes' permettant à des joueurs protéger et d’encadrer les sauteurs sur les chandelles. En clair, on risque d’assister à plus de duels dans les airs entre les Français et Anglais. Bonne nouvelle Thomas Ramos et ses coéquipiers ont prévu le coup pour éviter d’être étourdis par les chandelles adverses.

"Même si Marcus Smith n'est pas le plus à l'aise de leur équipe sous les ballons hauts, ils ont de très bons joueurs dans ce secteur. Et ils sont capables, notamment à la charnière, de mettre des bons ballons de pression", a prévenu l’arrière du XV de France lors de son passage face à la presse mercredi. "On va faire un focus sur ce point-là, dans les pays anglo-saxons on est attendus là-dessus. On a fait notre petite étude, on est prêts à répondre présents."

Les Anglais en quête d’une revanche après la déroute de 2023

En l’envie des Anglais de mettre les Bleus à la faute constituera sûrement une clé du match. Face à l’une des meilleures équipes du moment, le XV de la Rose voudra probablement casser le rythme et les attaques tricolores pendant ce Crunch. Le tout avec un objectif des plus simples, la victoire à tout prix. Deux ans après l’humiliation subie à domicile (10-53), l’Angleterre a pansé ses plaies et les survivants de la débâcle comptent bien se venger.

"Il y a une grosse méfiance à avoir parce qu'ils ont tous en tête à mon avis la défaite cuisante qu'ils ont subi il y a deux ans à Twickenham. Donc je pense que rien que par vengeance ils vont nous attendre de pied ferme", a averti l’ancien joueur Yann Delaigue pour RMC Sport avant la rencontre. "Et puis pour avoir vu le match Irlande-Angleterre, les Irlandais ont été incroyables et très constants sur 80 minutes, en mettant une pression constante offensivement sur les Anglais qui avaient dressé un vrai mur, qui étaient vraiment présents physiquement sur ce match-là."

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Si Emmanuel Meafou n’a pas eu peur de répliquer aux attaques venues du camp anglais, la bataille psychologique et la guerre des mots ont bel et bien débuté. Tommy Freeman a ainsi lâché qu’Antoine Dupont restait un joueur comme les autres. Du côté du capitaine Majo Itoje, on a aussi expliqué ne pas avoir peur de l’actuelle quatrième meilleure équipe mondiale.

"C’est une grosse opportunité pour nous. C’est une grosse opportunité d’affronter la France, c’est une grosse opportunité de jouer notre jeu et de nous imposer de la manière dont nous le souhaitons", a assuré le deuxième ligne au micro de Sky Sports. "Donc on voit ce match comme une énorme opportunité pour laquelle nous sommes prêts. […] Bien sûr, la confiance est très élevée. On a été là-bas l’année dernière et c’était un match serré où on a mené jusqu’aux derniers instants même si ça n’a pas suffi. Mais croyons que nous pouvons franchir un cap."

La machine à plaquer française

Et pour infliger une nouvelle défaite à l’Angleterre, qui n’a gagné que trois de ses dix derniers matchs (dont deux succès face au Japon), la France devra encore s’appuyer sur sa défense. Si la faiblesse de l’équipe galloise ne permet pas de se faire une idée bien nette, les partenaires d’un Peato Mauvaka en grande forme défendent comme des morts de faim.

Face au XV du Poireau, les Français ont effectué 93 plaquages avec seulement 12 manqués et n’ont pas encaissé le moindre point. En défense, Grégory Alldritt (18 plaquages) et la paire de centre Moefana-Barassi (respectivement 16 et 15 plaquages) ont découpé les adversaires. Une belle réussite dans le combat qui a aussi fait des différences dans les rucks où la troisième ligne tricolore a sorti une performance XXL contre le pays de Galles.

Méfiance toute de même, malgré une grosse présence française au soutien dans les rucks (première équipe à apporter du soutien devant… l’Angleterre), les joueurs du XV de la Rose sont ceux à avoir gratté le plus de ballon dans ce domaine (5 ballons volés) lors des regroupements. Samedi à Twitckenham, il faudra donc bien plaquer et bien se projeter pour exploiter des ballons de récupération. Mais si les Bleus arrivent à tenir dans le combat, et notamment, pendant la première heure de jeu, l’Angleterre pourrait finir par craquer physiquement et offrir un quatrième succès consécutif au XV de France dans le Crunch.

Jean-Guy Lebreton (avec MA, DC, PT et WT)