Comment Bruno Retailleau a réussi en un week-end... à unir les tribunes françaises

La rapidité et la longueur du communiqué de presse diffusé par le ministère de l’Intérieur, samedi après-midi, juste après la grande manifestation dans les rues de Saint-Etienne devait faire passer un message de fermeté. "Le dossier sur les supporters des Verts est très solide", admet une source proche du dossier à RMC. Et d’ajouter qu’aucun "pronostic" ne peut être fait avant les auditions de mardi, devant la commission nationale consultative de prévention des violences lors des manifestations sportives. Vingt-quatre heures après ce communiqué, le ministre de l’Intérieur reprend la parole sur son compte X pour condamner des "violences inacceptables" en marge du derby du nord entre Lille et Lens. Plusieurs problèmes lors des contrôles à l’entrée du parcage lensois seront aussi remontés par les fans du Racing Club de Lens.
"Il y a une véritable union"
À longueur de journée, et comme il l’avait fait en octobre sur RMC, Bruno Retailleau demande d’éviter la "complaisance" avec les auteurs des violences. Ce message vise en particulier les clubs mais aussi… certains élus locaux. Depuis plusieurs jours maintenant, des représentants politiques sont nombreux à s’opposer au processus de dissolution engagé par les services du ministère de l’Intérieur. Certains d'entre eux seront d’ailleurs reçus par la ministre des Sports, ce mardi. Un proche de Bruno Retailleau rappelle cependant que c’est le ministère de l’Intérieur qui "gère en priorité ce dossier" des violences à l'intérieur et autour des enceintes sportives.
Avant l’audition des deux groupes de supporters de l’ASSE, mardi, les fans français ont choisi l’humour et les banderoles pour faire passer des messages ce week-end. Bruno Retailleau et le ministère des Sports étaient particulièrement visés. "Il y a une véritable union", confie un leader d’un groupe de supporters à RMC. Et d’ajouter: "Ça fait du bien de voir ça. Il faut que tous les supporters prennent conscience du danger que peut représenter ce processus de dissolution qui n’est souhaité que par Bruno Retailleau, c’est juste une folie personnelle."
Trouver des voix favorables à ces dissolution est rare. Même impossible. Dans les rangs des forces de l’ordre, cette décision du ministre de l’Intérieur n’est pas totalement comprise. "Ça ne servira strictement à rien", admet un ancien cadre de la DNLH qui poursuit son explication en mettant en avant que les membres des deux groupes de supporters de l’ASSE, si la dissolution est actée, pourront retourner au stade "totalement normalement". "Avec ce dossier sensible, le ministre veut montrer que l’ordre public c’est lui, le dossier est devenu très médiatique et ça c’est un vrai risque pour Retailleau notamment au niveau des conséquences si ça se passe mal", admet un policier qui connaît parfaitement les tribunes de Ligue 1.
Le derby ASSE-OL pourrait devenir... ultrasensible
"Si le processus ne va pas au bout il ressortira comme un ministre qui a fait des mauvais choix", poursuit un responsable d’un groupe de supporters d’un grand club de Ligue 1. "En revanche, si le processus va au bout…" Ce dernier ne terminera pas sa phrase. "Des actions plus intensives pourraient suivre dans les prochaines semaines", avait prévenu des représentants de l’Association Nationale des Supporters, lors d'une conférence de presse organisée il y a quelques jours.
En cas de dissolution des deux groupes de supporters de l’ASSE, les policiers des services de renseignements spécialisés ont déjà regardé le calendrier du championnat. Le derby à Geoffroy-Guichard face à Lyon (le 20 avril) pourrait devenir le match le plus sensible de la saison, même sans les supporters lyonnais qui seront interdits de déplacement pour cette rencontre. Un match ultra-médiatique pour faire passer des messages.
D’autres groupes bientôt concernés?
Dans son communiqué diffusé, samedi après-midi, le ministre de l’Intérieur continue de demander un "retour au calme" dans les stades de football. Tout en rappelant que les clubs, les instances et les clubs de supporters "ont un rôle d’apaisement à jouer" aux côtés des autorités. Mais pour le moment, le dialogue reste au point mort, et les interdictions de déplacement explosent. D’après nos informations, les services de la place Beauvau regardent toujours plusieurs groupes de supporters, partout sur le territoire français, afin de constituer un dossier de dissolution. Un groupe de supporters de l’Olympique Lyonnais et une entité de fans du PSG sont scrutés de près par les autorités.
Cette volonté de dissoudre des groupes de supporters afin "de lutter contre la violence dans le football professionnel" devrait donc se poursuivre. En attendant, ce mardi, les deux groupes de supporters de l’ASSE, Magic Fans et Green Angels, se présenteront devant une commission spécialement constituée pour défendre leur cas. En cas de dissolution, qui doit être validée lors d’un conseil des Ministres et avant des recours possibles, le leader d’un grand groupe de supporters promet: "On touche à nos libertés, ça n’en restera pas là et ça va chauffer!"