"La mort n'est jamais loin", retraité à 21 ans parce qu'il trouvait le cyclisme trop dangereux, Louis Kitzki se confie

L'annonce avait fait l'effet d'une bombe dans le monde du cyclisme. En août dernier, Louis Kitzki annonçait qu'il prenait sa retraite avec effet immédiat à seulement... 21 ans. La raison? Les trop nombreux drames en compétition, lui qui avait été marqué par la mort de deux de ses collègues en un an. "Ce n'est probablement pas la fin de carrière que j'avais imaginée... Après avoir participé à ma dernière course, le Tour du Val d'Aoste, et le décès de Samuele Privitera, j'ai décidé de mettre fin à ma carrière de cycliste professionnel", avait annoncé le jeune Allemand sur son compte Instagram.
Une décision radicale qu'il ne regrette pas aujourd'hui. "Cela a été difficile d’écrire ce message d’adieu. Mais il le fallait. Je ne voulais pas disparaître sans rien dire. Et, aujourd’hui, je ne le regrette pas", a-t-il confié dans un entretien au Parisien publié ce jeudi. "Cette décision, je l’ai prise au printemps. J’y avais déjà songé il y a un an. Mais ce n’était pas encore très clair dans ma tête. Entre-temps, j’ai vu des choses toujours plus folles en course qui m’ont convaincu d’arrêter pour de bon."
"Ce qui se passe actuellement est très inquiétant"
En juillet 2024, Louis Kitzki était déjà dans le peloton du Tour d'Autriche lorsque le Norvégien André Drege, 25 ans, était mort des suites d'une chute dans une descente, lors de l'avant-dernière étape reine. Un premier tournant, selon lui. "Après ça, j’ai eu l’impression que je ne pouvais plus vraiment être performant. J’étais trop concentré sur le fait de simplement survivre." Un drame similaire sur le Tour du Val d'Aoste avec la chute mortelle du jeune italien Samuele Privitera (19 ans) en juillet dernier a ensuite été le point de non-retour.
"Les choses étaient claires dans ma tête", assure-t-il, même s'il n'a "pas été témoin direct" de ces accidents mortels.
S'il n'a pas subi de grosse chute dans sa carrière, avec simplement une main cassée lors de sa première année chez les U23, le désormais ancien membre de la réserve d'Alpecin-Deceuninck (qu'il a rejointe en février 2024 après avoir gagné la Zwift Academy) établit un constat pessimiste sur l'évolution de son sport. "Dès les juniors et la catégorie U23, on sait avant le départ que certaines courses vont être vraiment criminelles", lance celui qui dit avoir eu parfois l'impression d'être "envoyé à l'abattoir". "Attention, ce n’est pas nouveau que le cyclisme est un sport dangereux, mais ce qui se passe actuellement est très inquiétant."
"La moindre erreur que vous commettez peut être fatale"
Et de poursuivre: "Je ne pense pas qu’on aille vers plus de sécurité. Tant qu’il y aura des gens qui veulent faire ce travail, qui sont prêts à faire de tels sacrifices et à prendre de tels risques, il y aura encore des accidents. (...) C’est le principe même de ce sport de vouloir aller de plus en plus vite. Il faut se rendre compte que la moindre erreur que vous commettez peut être fatale. Et, en plus de ça, les 150 gars autour de vous peuvent aussi la faire (...) Parfois, j’ai l’impression que certains cyclistes sont tout simplement fous et qu’ils se fichent complètement des autres. Et de leur propre santé. (...) Je suis passé l’année dernière à côté de beaucoup, beaucoup de situations très graves où j’ai failli heurter des voitures, notamment dans des descentes. La mort n’est pas fréquente, mais elle n’est jamais loin."
Celui qui étudie désormais la chimie à la faculté de Hambourg - son "plan B" de "toujours - a bien tenté de surmonter ses peurs, mais elles ont fini par prendre le dessus. "Je ne suis pas brisé en tant que personne. La peur, elle montait seulement quand j’étais sur mon vélo. Le reste du temps, ça ne m’affectait pas (…) Cette peur de chuter, de tout perdre, vous ne pouvez pas la tuer." Au point que pour lui, "tout plaquer était la seule manière de (s)'en sortir".